Intervention de Sabine Thillaye

Réunion du mercredi 26 mai 2021 à 16h00
Commission des affaires européennes

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaSabine Thillaye, Présidente :

. Nous poursuivons aujourd'hui nos échanges relatifs à la jurisprudence de la Cour de justice de l'Union européenne afférente à la conservation des données de connexion. Lors de notre table ronde, le 17 mars 2021, nous avions reçu des intervenants de grande qualité pour nous présenter les enjeux juridiques et opérationnels de l'arrêt La Quadrature du Net, rendu le 6 octobre 2020.

Comme ce fut le cas lors de notre précédente réunion, les recoupements existants entre les affaires européennes et les sujets de défense nationale justifient que nos deux commissions abordent ce sujet conjointement.

Depuis cette table ronde, la longue saga juridictionnelle a pris fin. La Cour de Justice de l'Union européenne a répondu aux questions préjudicielles posées par le Conseil d'État français. Le juge administratif national a ainsi pu donner sa position définitive sur la législation française, en étant éclairé par cette interprétation qui fait corps avec le droit primaire et dérivé.

Comme l'a rappelé le président de la Cour de Justice, M. Koen Lenaerts, lors de son audition, la semaine dernière, les juridictions nationales et européennes sont des alliées naturelles. Il n'est pas question de créer des clivages en opposant artificiellement les positions françaises et européennes.

Au-delà des précisions techniques apportées par la Cour de justice, c'est le principe même d'un régime de conservation des données, générale et indifférenciée, qui est pourtant en cause. Le gouvernement français n'a pas fait mystère de sa position. Parti au litige, le Premier ministre a fait valoir des arguments juridiques très audacieux visant en substance à demander au Conseil d'État de ne pas appliquer l'arrêt de la Cour de Justice au motif qu'elle aurait excédé sa compétence.

L'utilité opérationnelle des données de connexion dans la protection de la sécurité nationale, comme dans la prévention et la répression des infractions pénales, est au demeurant indiscutable.

Le fait de nous saisir, en tant que parlementaire, de cette question trouve, en cette période, une résonance particulière : cet arrêt est en lien direct avec le projet de loi relatif à la prévention des actes de terrorisme et au renseignement. Il revêt un intérêt significatif en raison des réponses apportées au fond et sur le plan contentieux.

Les enjeux européens, même lorsqu'ils sont particulièrement techniques, sont au cœur des grands dossiers politiques qui fondent notre mission à l'Assemblée nationale.

Plutôt que de dénoncer un hypothétique gouvernement des juges, il faut s'interroger sur les marges de manœuvre démocratiques dont disposent les représentants élus. Ces réflexions doivent s'intégrer dans le cadre des traités en vertu desquels nous avons librement consenti d'exercer certaines compétences en commun, dans une communauté soumise à la règle de droit.

À ce titre, je me réjouis qu'en étroite liaison avec la commission de la défense, la commission européenne remplisse son rôle d'information et d'alerte sur des sujets européens susceptibles d'exercer une influence sur les politiques nationales.

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