. Les arrêts du 6 octobre 2020 portant sur les questions préjudicielles française et belge obligent à s'arrêter sur la solution retenue par la Cour constitutionnelle belge le 22 avril 2021, une semaine après l'arrêt du Conseil d'État. Les juges belges tirent en effet des conséquences différentes du même arrêt en imposant un changement de perspective par rapport à la législation belge, mais aussi française : l'obligation de conserver les données des communications électroniques doit être une exception, et non la règle. C'est ainsi qu'elle a annulé l'obligation d'une conservation généralisée et indifférenciée de ces données. Cette divergence entre les juridictions belges et françaises, pourtant de tradition juridique proche, interroge dans un espace juridique intégré comme celui de l'Union européenne.
En outre, l'arrêt du Conseil d'État, qui répond à une demande explicite du gouvernement, prête le flanc à des critiques de nature politique. La France se singularise en effet par rapport aux autres États membres qui se mettent en stricte conformité avec la jurisprudence européenne. Ainsi, les autorités allemandes sont en attente d'une décision de la Cour européenne de Justice sur l'affaire Spacenet ; tant que celle-ci n'est pas rendue, l'Allemagne a suspendu sa législation sur la conservation des données.
Si le spectre d'une condamnation en manquement semble écarté, il n'en reste pas moins que le message qui demeure est celui d'une divergence, à l'heure où l'exemplarité est un atout pour faire appliquer les principes de l'État de droit. À titre personnel, j'ajouterai que la question du partage des données entre États membres au titre de la coopération policière et militaire devra être elle aussi examinée avec attention.