Passé ce moment de stupeur et de sidération, les réactions ont été rapides. Des initiatives ont fleuri pour coopérer, cordonner, faciliter la gestion de la crise. D'abord, à travers les échanges bilatéraux, comme en témoigne le transfert de patients entre pays voisins – par exemple dans la région Grand Est, la plus touchée au début de la crise, avec 200 patients transférés vers les pays voisins. Mais également sous la forme d'initiatives spontanées, les bonnes relations entre épidémiologistes italiens et français ont par exemple permis de faire circuler les informations disponibles sur la contagiosité du virus dans les premiers instants de la crise.
Puis progressivement, il y a eu une montée en puissance de la coopération européenne. Elle a permis à l'ensemble des institutions européennes de se mobiliser de manière efficace et plus forte pour mieux répondre aux enjeux de la crise. Cette mobilisation s'est notamment concrétisée par l'adoption de la stratégie vaccinale commune. Elle a su surmonter les difficultés des premiers instants, liées à la diversité des besoins et des positions des États membres. Il a en effet été reproché à l'Union d'avoir été trop lente dans l'acquisition de vaccins, se concentrant trop sur les prix ou sur les questions de concurrence là où les pays anglo-saxons ont d'emblée donné la priorité à la disponibilité et à la production.
Néanmoins, l'Union européenne est parvenue à ses fins puisque les chiffres de vaccination sont spectaculaires : au 5 juillet, 63 % de la population adulte a reçu au moins une première dose de vaccin et plus de 380 millions de doses ont été administrées dans l'Union européenne.
Alors que la production de vaccins monte en puissance, nous relevons que l'Union n'a jamais cessé d'exporter des vaccins tout au long de la crise, à la différence des États-Unis et de la Grande-Bretagne, qui ont refusé d'exporter les vaccins produits sur leur territoire. En d'autres termes, cette stratégie vaccinale a donné une traduction concrète aux valeurs européennes en permettant à l'ensemble des États, petits ou grands, riches ou pauvres, d'avoir accès à ce qui était devenu un bien collectif.
Malgré un démarrage tardif, l'Union n'a pas à rougir, aujourd'hui, de ses résultats. Au 5 juillet, les chiffres de vaccination par rapport à la population totale nous montrent que 52 % des habitants ont été vaccinés en Europe, de même 52 % aux États-Unis, 65 % en Israël et 66 % au Royaume-Uni, des espaces moins peuplés. Cet ensemble européen, qui a réussi à se mobiliser, a atteint son objectif.
À présent, il nous faut regarder vers l'avenir et penser l'Europe de la santé de demain dans un contexte qui est, en outre, particulièrement propice à au moins trois égards. En premier lieu, la Commission européenne a déjà fait un certain nombre de propositions en novembre dernier sur l'Europe de la santé et les négociations sont en cours au niveau européen. En outre, la Conférence sur l'avenir de l'Europe qui a été lancée à Strasbourg le 9 mai comporte un thème spécifique sur la santé, contrairement aux consultations citoyennes sur l'Europe de 2018. Ce contexte illustre à la fois la prise de conscience collective de l'importance du domaine de la santé et la demande de nos concitoyens. Enfin, la présidence française de l'Union européenne au 1er semestre 2022 fournit une opportunité pour faire avancer la coopération sanitaire.
Nos propositions sont à la fois conjoncturelles et structurelles, ambitieuses pour construire une Europe de la santé résiliente et solidaire.
En premier lieu, il nous faut apporter une réponse à la conjoncture de crise, celle de mieux coordonner et organiser notre réponse aux crises. Il convient donc de mener une évaluation exhaustive de la façon dont la crise a été gérée, en faisant remonter du terrain les bonnes pratiques développées pendant la crise, de manière à créer des plans de nature à faire face aux crises futures que nous pourrions avoir à affronter. Cette évaluation doit nous conduire à préparer deux types de plans : des plans nationaux pour les différents types de crise (sécurité, civil, sanitaire) interopérables qui tiennent compte de l'échelon européen ; des plans spécifiques aux zones transfrontalières, qui seraient pensés et mis en œuvre aux échelles pertinentes, puisque les bassins de vie transfrontaliers sont vivement affectés par les décisions unilatérales.