Je ne peux que vous rejoindre, nous avons suivi les négociations concernant le dernier cadre pluriannuel et l'évolution des négociations sur les ressources propres avec un brin de frustration. La redevance numérique était compliquée à mettre en œuvre de façon technique et politique, comme l'a découvert la France, qui est l'un des rares pays à avoir mis en place une taxe à vocation analogue. Au-delà de cet aspect, elle n'avait pas de portée majeure et il était difficile de concevoir comment elle aurait pu en avoir en termes de financement du budget européen. Cette taxe aurait été un symbole important, notamment car certains acteurs concernés ne payent pas les impôts qui sont dus aux États dans lequel ils opèrent. Cette situation est anormale, amorale et inacceptable pour nos concitoyens, nos entreprises et nos artisans.
Avec la réforme du marché du carbone européen et le mécanisme carbone aux frontières, il y a une possibilité de ressources pérennes, au moins sur le moyen terme. Ces ressources permettent de revenir à ce qu'était le budget européen à l'origine : le mécanisme carbone est aujourd'hui une forme de ce qu'ont été les droits de douane au vingtième siècle. Ces ressources propres remplissent plusieurs objectifs de politique publique : elles permettent non seulement d'abonder le budget européen, mais elles permettent aussi de responsabiliser budgétairement la Commission, puisqu'elles évoluent en fonction de l'activité économique. Ce sont aussi des ressources qui permettent d'atteindre les objectifs climatiques, sans exporter les émissions de carbone. La réforme du mécanisme ETS permet de respecter une trajectoire climatique européenne, tandis que le mécanisme carbone aux frontières permet d'éviter les fuites de carbone. Les deux ressources sont absolument indissociables, et il me paraît essentiel de soutenir leur développement.
À propos du soutien européen au plan de relance national, il y a eu un changement philosophique majeur à propos de l'endettement européen pour subventionner des plans de relance nationaux. Nous sommes parvenus collectivement à ce changement au niveau européen, dont le sous-jacent est une solidarité ancrée pour les décennies à venir. La concrétisation de cette philosophie nouvelle passe en revanche par les collectivités et gouvernements nationaux : arrivée sur le terrain, elle ne se matérialise pas toujours. Mais le secrétaire d'État aux affaires européennes s'assure que les Français savent que derrière France relance, il y a les fonds européens.
Derrière la question des obligations vertes, il y a une transformation profonde du système financier et le verdissement de nos activités financières. L'attention est focalisée sur l'argent public investi, par exemple avec les 100 milliards d'euros investis dans le cadre du plan de relance national, mais on devrait aussi s'intéresser aux capitaux privés nécessaires à la transition écologique. Ces obligations vertes créent des actifs qui permettent de verdir tout le système financier et de créer en fin de ligne des produits d'épargne verte qui répondront aux attentes des épargnants.
Le consommateur ne peut toutefois pas acheter directement d'obligations vertes. La majorité des Français détiendront, par intermédiaires interposés comme l'assurance-vie, des obligations vertes, mais il faut une intervention d'institutions financières.