L'ordonnance no 2017-644 du 27 avril 2017 a introduit plusieurs types d'incompatibilités entre les fonctions juridictionnelles et les fonctions administratives au sein des ordres des professions de santé : impossibilité, d'abord, pour les conseillers d'État siégeant dans les conseils nationaux des ordres de présider les chambres disciplinaires nationales et les sections des assurances sociales de ces chambres ; incompatibilité, ensuite, d'une part, entre les fonctions d'assesseur dans une juridiction nationale et dans une juridiction de première instance, et, d'autre part, entre les fonctions d'assesseur et les fonctions de président ou de secrétaire général du conseil ordinal auquel est rattachée la juridiction. L'alinéa 2 du I de l'article 14 de l'ordonnance a prévu une entrée en vigueur de l'ensemble de ces règles d'incompatibilité au 1er janvier 2018.
L'article 4 du projet de loi de ratification issu de l'amendement adopté par la commission des affaires sociales prévoit une entrée en vigueur des nouvelles règles d'incompatibilité au premier renouvellement de chaque instance ordinale. Cette proposition est pertinente pour les membres élus des juridictions ordinales. En effet, les assesseurs des instances disciplinaires sont élus à chaque renouvellement des conseils ordinaux ; dès lors, une application uniforme des nouvelles règles d'incompatibilité au 1er janvier 2018 pourrait, en cas de situation d'incompatibilité, contraindre les ordres à élire de nouveaux assesseurs, indépendamment du renouvellement des instances ordinales.
La situation est néanmoins différente pour les présidents des juridictions nationales, dont la nomination ne résulte pas d'une élection et ne dépend donc en rien du renouvellement des instances ordinales. Or il y a urgence à faire cesser le cumul par les conseillers d'État des fonctions de président d'une chambre disciplinaire nationale ou d'une section nationale des assurances sociales avec celles de membre du conseil national de l'ordre concerné.
C'est déjà ce cumul qui avait suscité les critiques de la mission permanente d'inspection des juridictions administratives du Conseil d'État, dans un rapport de juin 2013 sur les juridictions de l'Ordre des médecins communiqué au Gouvernement, au motif qu'il n'est plus compatible avec les règles d'impartialité objective qui prévalent désormais dans l'ensemble des juridictions nationales et européennes. La Cour des comptes a formulé publiquement les mêmes critiques dans son rapport de février 2017 sur l'Ordre des chirurgiens-dentistes : elle a recommandé, dans sa proposition 6, de « prohiber l'exercice, par une même personne, des fonctions de président de la chambre disciplinaire nationale et de conseiller des instances nationales ».