Intervention de Caroline Janvier

Réunion du mercredi 2 février 2022 à 15h20
Commission des affaires européennes

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaCaroline Janvier, rapporteure :

Les députés ont un rôle à jouer concernant les propositions de réforme et nous devons poursuivre ce dialogue pendant les prochains mois.

Concernant la détention de la dette, je n'ai pas la réponse, il me semble qu'il est difficile de déterminer exactement qui détient cette dette et qui sont nos créanciers.

Par rapport à la question de la gouvernance et de la mise en commun des politiques budgétaires, j'estime que la singularité de notre modèle d'union économique et monétaire, qui fait que nous sommes liés les uns aux autres, nous permet d'avoir une monnaie forte et une zone économique qui peut concurrencer les États-Unis et la Chine. Ainsi, je ne soutiens pas ce que proposent certaines formations politiques qui souhaitent se soustraire à nos obligations en matière de remboursement de la dette ou encore de ne pas tenir compte des recommandations de la Commission européenne. De cette union, un certain nombre de contraintes émergent. Par exemple, une situation de dérapage budgétaire d'un État membre affecte tous les autres pays ; l'augmentation du taux d'intérêt dans un pays peut, par contagion, entraîner l'augmentation du taux d'intérêt des autres pays de la zone. D'autres contraintes sont également importantes dont la règle européenne de non-renflouement des pays se trouvant dans des situations désastreuses afin de garantir la crédibilité de l'Union pour les investisseurs ou encore les contraintes liées à la conduite de la politique monétaire en lien avec les politiques budgétaires nationales.

Nous ne sommes pas encore arrivés à une harmonisation parfaite. Nous ne pouvons que constater que les écarts, au lieu de se réduire, se creusent. Il est donc nécessaire de continuer le débat sur la révision des règles budgétaires au niveau national et avec nos homologues européens, car il pourra permettre d'atteindre un niveau d'acculturation plus important.

Le sujet le plus problématique reste celui de la dette, davantage que le déficit. Les personnalités politiques et experts que j'ai auditionnés ne croient pas que le rétablissement des règles budgétaires d'ici début 2023 soit réalisable. L'option la plus plausible est que les règles seront appliquées avec indulgence en 2023.

Concernant, la trajectoire par pays, ce sujet fait de plus en plus consensus bien que les détails concernant la construction de cette trajectoire ne soient pas encore connus. Il serait nécessaire d'accorder un rôle plus important aux autorités indépendantes nationales dont le Haut Conseil des finances publiques en France. Cette proposition oblige également à accroître le dialogue avec les instances européennes et à renforcer le travail d'acculturation des citoyens et de l'opinion publique pour éviter de transformer les discussions en débat d'experts.

La question des investissements écologiques est primordiale et interroge les règles établies par le pacte de stabilité et de croissance. Le plan de relance et la stratégie France 2030 témoignent de la prise de conscience de cet enjeu. Sans investissements massifs, il n'y aura pas de transition écologique, ni de transition numérique. La question principale sera de déterminer quel investissement pourra être considéré comme participant à la transition écologique. Les sources d'énergie à privilégier devront également être déterminées. De nombreux échanges seront nécessaires pour arriver à un compromis.

Sur le sujet de la fétichisation politique de la soutenabilité de la dette et de l'importance d'avoir une souveraineté nationale, je soutiens, au contraire, que la solidarité entre les États et la responsabilisation de chacun des acteurs de l'Union économique et monétaire continuera de faire notre force. De plus, concernant l'annulation de la dette, elle n'est pas permise par les traités et serait donc illégale. Une annulation de la dette aurait de nombreux effets sur le plan monétaire en raison de la diminution de l'actif de la banque centrale qui entraînerait l'augmentation du risque inflationniste et des variations du taux d'intérêt, mais également une perte de crédibilité auprès des investisseurs étrangers. Le mécanisme actuel participe ainsi à l'équilibre du système et à la crédibilité de nos institutions.

Enfin, le dernier point que je souhaite aborder porte sur la façon de convaincre les pays frugaux, dont l'Allemagne peut faire partie, d'accepter les réformes de la zone. Je ne pense pas que ce sujet doit être approché comme un combat politique entre d'un côté des pays dispendieux souhaitant s'exonérer des règles et de l'autre, des pays ayant une maîtrise trop stricte de leurs dépenses. Les règles communes ont un intérêt sur le long terme pour les générations futures, notamment pour conserver la marge de manœuvre des États pour maintenir une charge de la dette soutenable. Ces débats sont donc l'opportunité de trouver un nouvel équilibre.

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