Je me réjouis que nous puissions procéder à des auditions conjointes. Cela me paraît de bonne méthode lorsque le sujet est éminemment transversal.
Monsieur le secrétaire d'État, nous vous remercions d'avoir accepté notre invitation, pour être entendu sur la question des accords commerciaux négociés par l'Union européenne. Le sujet est vaste, si bien que trois commissions de notre assemblée s'y intéressent.
Nous le savons tous, nous assistons à un mouvement de fond. L'Union européenne a multiplié ces derniers temps les négociations en vue de conclure des accords commerciaux avec de nombreux États ou espaces économiques : le Canada, l'Australie, la Nouvelle‑Zélande, le Japon ou encore le Mercosur. L'objectif affiché par l'Union, avec ces accords, est de libérer les échanges dans une perspective de croissance et de bénéfice mutuel.
Cette position donne lieu à des débats, comme on le sait. Il me semble que l'intérêt de votre audition, Monsieur le ministre, n'est pas d'opposer tenants et opposants du libre‑échange – nous connaissons d'ailleurs les arguments dans un sens ou dans l'autre.
Pour ce qui concerne la commission du développement durable et de l'aménagement du territoire, la question centrale est celle de la prise en compte des considérations environnementales et climatiques par ces accords commerciaux. Nous devons être lucides et reconnaître qu'à cet égard, ils suscitent parfois des inquiétudes.
Certes, pour certains, l'Union européenne n'est pas assez volontariste en matière de politique environnementale. Il est vrai que des rigidités subsistent parfois ; des divergences peuvent apparaître entre les États membres et freiner le mouvement vers une économie plus respectueuse de l'environnement. C'est d'ailleurs l'ambition de la France de nous faire progresser collectivement dans cette voie, par la négociation, au niveau européen.
N'oublions pas, cependant, que l'Union européenne, si on la compare à d'autres espaces économiques, est aussi un espace politique caractérisé par une réelle ambition de développement durable. La législation européenne, avec ses imperfections, progresse, au fil du temps, vers des prescriptions environnementales plus affirmées à l'égard des acteurs économiques. Ce mouvement n'est certes pas aussi rapide que certains pourraient l'espérer, mais des avancées ont été réalisées dans divers domaines et ont un impact indéniable sur les activités, qu'il s'agisse de la production agricole, de l'industrie ou de l'énergie.
La perspective d'une ouverture du marché européen à des produits provenant de pays tiers soulève, dès lors, plusieurs questions : ces produits présentent-ils les mêmes garanties que des produits européens en termes de pratiques respectueuses de l'environnement ? Si tel n'est pas le cas, qu'implique cette ouverture pour les acteurs économiques européens qui risquent d'être confrontés à une concurrence qui tire vers le bas les coûts ou la qualité, voire les deux ? Et l'ouverture de notre marché ne risque-t-elle pas de légitimer des pratiques dont on sait qu'elles sont néfastes pour l'environnement au sens large ? Je pense à la déforestation, avec les atteintes à la biodiversité et l'augmentation des gaz à effet de serre qu'elle implique, ou encore à l'utilisation de produits phytosanitaires ou d'organismes génétiquement modifiés.
Enfin, à l'heure de la nécessaire lutte contre le changement climatique, le bilan carbone de l'augmentation des échanges internationaux à la suite de tels accords a-t-il été évalué ?
Je sais, Monsieur le secrétaire d'État, que vous allez nous éclairer sur toutes ces questions.