Le contrôle des comptes des collectivités locales relève d'abord de la Cour des comptes, et je n'ai pas son autorité. Je ne suis associée à ce contrôle qu'en ma qualité de régulateur des commissaires aux comptes. La réglementation applicable aux commissaires aux comptes pose vraiment des difficultés quand il s'agit pour eux de contrôler des collectivités territoriales. En effet, celles-ci sont étroitement liées à la direction générale des finances publiques (DGFiP), notamment. Un commissaire aux comptes a l'obligation de s'interroger sur les chiffres que lui propose l'entité auditée. Or, s'agissant des collectivités territoriales, ces chiffres sont souvent liés à des données fiscales, ce qui percute les prérogatives de la DGFiP. Il en va de même avec la Banque de France, qui détient les comptes des collectivités. Au-delà de l'évaluation des immobilisations, les commissaires aux comptes rencontrent donc des difficultés pour évaluer l'exactitude des recettes qui leur sont indiquées. Les dispositions du code de commerce relatives à l'audit doivent être modifiées si l'on souhaite que la procédure soit adaptée aux collectivités territoriales. C'est un vaste chantier, et il faudra du temps pour le mener à son terme, mais il est important de l'ouvrir. Les collectivités territoriales et les commissaires aux comptes vont devoir s'accoutumer à travailler ensemble, dans le cadre de la législation.
La récurrence des contrôles est fixée par la loi : ils ont lieu tous les trois ans quand il s'agit d'EIP, tous les six ans pour les autres types de mandat. Toutefois, la modernisation de nos contrôles va nous permettre de vérifier plus souvent si nos recommandations ont été appliquées. En effet, il n'est pas satisfaisant d'attendre six ans pour contrôler de nouveau un commissaire aux comptes chez qui des manquements ont été constatés. Nous allons donc procéder à de nouvelles vérifications, mais il s'agira de contrôles « spots », ou de suivi – c'est-à-dire destinés à voir si les recommandations ont été appliquées –, ou encore portant sur des sujets d'actualité, par exemple la comptabilité des maisons de retraite. Le collège et moi-même avons la possibilité de ne pas tenir compte de la récurrence triennale ou sexennale. Nous pouvons sélectionner les mandats qui concernent les maisons de retraite, identifier les commissaires aux comptes qui en sont chargés et contrôler ces derniers sur des points très spécifiques, par exemple les marges arrière.
Les commissaires aux comptes délégués pour effectuer des contrôles sont rémunérés à hauteur de 120 ou 130 euros de l'heure. Ils sont environ 450. Le turnover est régulier : nous remercions des commissaires pour leurs services et lançons des appels à candidature, comme ce fut le cas récemment. Nous faisons en sorte qu'un commissaire aux comptes soit contrôlé par une personne exerçant dans une autre région. Par exemple, ceux de Paris, qui sont très actifs en la matière, contrôlent l'outre-mer.
Le Haut Conseil a axé sa réponse à la consultation européenne sur l'extension du modèle français du co-commissariat aux comptes. Il conviendrait de rendre celui-ci obligatoire à l'échelle européenne pour certaines entités, notamment les plus grosses, qui présentent des risques systémiques. Cet enjeu rejoint la question relative à la concentration du marché : la règle du co-commissariat aux comptes, associée au fait que le mandat soit accordé pour une certaine durée, permet de desserrer le marché. À cet égard, nous sommes opposés à l'idée selon laquelle le mandat du commissaire aux comptes ne devrait durer qu'un an : un temps aussi court ne permet pas d'asseoir l'indépendance du commissaire vis-à-vis de l'entité qu'il contrôle. Lorsque l'entité en question est très grosse, le commissaire ne peut pas appréhender la complexité en si peu de temps, alors que c'est la condition de la qualité d'un audit. Un commissaire aux comptes ne travaille bien que s'il dispose de plusieurs années pour structurer sa démarche et renforcer ses moyens humains et techniques, au service de l'entité qu'il contrôle. La règle de la rotation permet à des cabinets de taille intermédiaire de se voir attribuer des mandats plus complexes. Associée au co-commissariat, cette règle permet également d'assurer le tuilage.
Le deuxième message que nous avons fait passer à la Commission européenne concerne la réduction du nombre des options ouvertes au niveau européen, dans le cadre de la réglementation de l'audit. Toutes les EIP doivent avoir un comité d'audit, lequel est, avec la direction financière, l'interlocuteur privilégié du commissaire aux comptes. C'est un gage de qualité pour le contrôle interne des entreprises. Ce sont environ 250 cabinets qui interviennent dans le domaine du contrôle légal des EIP. Le chiffre est énorme par rapport à la situation dans les autres pays européens.
Troisièmement, nous voulions faire savoir à la Commission européenne que les pouvoirs d'enquête et de sanction, notamment ceux du CEAOB, devaient être renforcés. Surtout, les pratiques en la matière doivent être unifiées, car les différences entre États membres sont trop importantes.
La Commission européenne a reçu 220 réponses à cette consultation, dont 23 % émanent de la France. Notre pays est de très loin celui qui a le plus répondu : l'Espagne arrive en deuxième position avec 16 %, suivie de l'Allemagne avec 10 %. L'essentiel des répondants de notre pays est constitué par les organisations professionnelles et les entreprises.
Le chiffre de 18 000 commissaires aux comptes renvoie à la totalité des personnes morales et physiques. En revanche, il y a 12 000 commissaires qui sont signataires de rapports.