Ma question s'adresse au ministre des solidarités et de la santé. Monsieur le ministre, depuis plusieurs mois, les retards s'accumulent dans le traitement des dossiers de la CAF – caisse d'allocations familiales –, ce qui entraîne des conséquences désastreuses. Plus de 5 millions de pièces sont en attente de traitement ; en moyenne, les caisses accusent un retard de trois à quatre mois et dans certains endroits, les dossiers reçus le 12 mai dernier viennent seulement d'être traités. La réforme de l'APL – aide personnalisée au logement –, finalement entrée en vigueur le 1er janvier dernier, a catalysé les difficultés.
Tout d'abord, les jeunes dont les revenus sont compris entre 800 et 1 300 euros mensuels ont vu leur APL diminuer en moyenne de 95 euros par mois, et la baisse va jusqu'à 106 euros pour les salaires compris entre 1 201 et 1 521 euros. Par ailleurs, la réforme a introduit un nouveau mode de calcul très complexe, pris en charge par un nouveau logiciel qui s'est superposé à l'ancien système, devenu complètement obsolète. Cela a eu pour conséquence des bugs en cascade, des erreurs de calcul et d'importants ralentissements. Les salariés nous ont confié que pour verser l'allocation de rentrée scolaire à temps, il a fallu suspendre le système informatique pendant trois heures dans toute la France, tant il est dépassé.
À cela s'ajoute le manque d'effectifs. La convention d'objectifs et de gestion (COG) 2018-2022 prévoyait 2 100 suppressions de postes, et les accueils physiques continuent de fermer. Une telle situation n'est pas tenable pour les allocataires, qui attendent depuis plusieurs mois les prestations auxquelles ils ont droit, alors que le contexte de crise sanitaire et économique a fragilisé de nombreux foyers. Elle ne l'est pas non plus pour les salariés des CAF, qui se voient imposer des heures supplémentaires ou des rachats de RTT pour suivre la cadence, et qui doivent parfois faire face à la colère de personnes en souffrance.
Monsieur le ministre, ma question est donc simple : allez-vous enfin engager les moyens nécessaires pour mener à bien la réforme sur le terrain, dans des conditions décentes pour les allocataires et pour les salariés ? Allez-vous en particulier décider d'un moratoire sur les suppressions de postes, dans le cadre des négociations de la prochaine COG ? M. le Premier ministre vient d'annoncer la recentralisation du RSA ; on peut donc craindre le pire.