Intervention de Bertrand Pancher

Séance en hémicycle du mercredi 29 septembre 2021 à 15h00
Création de la fonction de directeur d'école — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaBertrand Pancher :

Régulièrement, nous débattons de la situation des directeurs d'école, conscients que celle-ci n'est plus satisfaisante, compte tenu des difficultés rencontrées au quotidien par ces femmes et ces hommes pourtant si dévoués à leur métier et au service public. Rappelons-nous qu'en 2019, lors de l'examen du projet de loi pour l'école de la confiance, ce sujet avait ressurgi à l'occasion d'un amendement introduit au Sénat qui créait un statut hiérarchique pour ces directeurs d'école, disposition supprimée par la suite. L'an dernier, le débat autour du caractère hiérarchique ou non du statut a refait surface à l'occasion de la première lecture de cette proposition de loi et nous voici, un an plus tard, réunis pour sa deuxième lecture.

Ces deux dernières années ont largement plaidé en faveur d'une évolution du métier de directeur d'école, avec un sentiment d'urgence accru. En septembre 2019, le dramatique suicide de Christine Renon dans son école maternelle à Pantin a remis en lumière le quotidien difficile des directeurs. Dans la lettre qu'elle a laissée, elle racontait sa charge de travail, l'absurdité des tâches administratives et, finalement, la perte de sens de son métier. Ces constats, nous ne les connaissons que trop bien. À cela s'est ajoutée la crise sanitaire qui n'a pas fini de sursolliciter les directeurs d'école et, plus largement, tout le personnel éducatif.

Ce n'est évidemment plus acceptable. Chaque année, nous continuons à déplorer un nombre toujours plus élevé de postes vacants de directeur. Certains directeurs finissent par abandonner, d'autres reconnaissent ne pas avoir demandé à exercer cette fonction, la majorité heureusement fait le choix de rester malgré les difficultés, animés qu'ils sont par le sens du service public et l'amour de la pédagogie.

La consultation mise en place par le Gouvernement a permis de premières avancées, notamment pour limiter le sentiment de solitude des directeurs et pour pérenniser la prime de rentrée. Cependant d'autres messages continuent de susciter des inquiétudes chez les enseignants et les directeurs sur l'avenir de leur profession, et c'est à ces inquiétudes qu'il faut répondre.

Prenons d'abord celles nées de ce texte. Initialement, il était question d'emploi fonctionnel, mais une évolution s'est faite vers la notion d'autorité fonctionnelle.

Or cette autorité fonctionnelle, si elle n'est pas une autorité hiérarchique, continue de diviser.

À cela s'ajoutent les récentes annonces d'Emmanuel Macron à Marseille et son souhait d'expérimenter dès la rentrée 2022, dans une cinquantaine d'écoles de la ville, la liberté, pour les directeurs d'école, de choisir les enseignants de leur équipe pédagogique. Une fois encore, l'idée d'une potentielle autorité hiérarchique est revenue en filigrane alors même, nous le savons, que la profession reste très attachée au fonctionnement en équipe et que beaucoup de directeurs d'école ne souhaitent pas la création d'un statut comparable à celui des chefs d'établissement du second degré.

Surtout, ils tiennent au cumul de leur fonction avec le travail en classe. Les enquêtes menées auprès d'eux l'attestent : ce qui les anime, ce sont les missions pédagogiques et le suivi des élèves. Voilà pourquoi la majorité d'entre eux rejettent l'idée de se voir offrir un statut hiérarchique, qui impliquerait d'appartenir à un autre corps administratif que celui des enseignants.

Ne nous trompons toutefois pas de débat et ne tombons pas dans le piège qui consisterait à penser que la seule question pertinente est de savoir s'il faut ou non créer un statut hiérarchique. La priorité est d'améliorer les conditions de travail des directeurs d'école au quotidien : ils ont besoin de plus de temps de décharge et de soutien humain pour gérer la complexité des tâches au sein de l'école.

Le texte contient des mesures positives qu'il faut saluer, telles que la création d'un référent. Les décharges et la revalorisation de l'indemnité sont renvoyées à des décrets, mais la proposition de loi constitue un premier pas sur ces questions. En revanche, elle n'apporte pas de solution satisfaisante quant à l'absence d'aide administrative et de secrétariat dans certaines écoles.

La diminution drastique des emplois aidés depuis 2017 a créé un vide, obligeant certains directeurs d'école à travailler du lundi au dimanche sans aucune aide. Pour y remédier, le texte propose la mobilisation de jeunes en service civique et la possibilité pour l'État et les collectivités de mettre à leur disposition une aide administrative ou matérielle. Cette mesure, introduite par l'article 2 bis , n'est pas satisfaisante compte tenu des inégalités territoriales et du caractère facultatif de cette assistance. Nous proposerons donc de revenir à la rédaction du Sénat afin que l'État prenne systématiquement en charge ces moyens.

Vous l'aurez compris, le groupe Libertés et territoires conserve ses réserves quant à ce texte, qui répond insuffisamment aux demandes des directeurs et des enseignants, toujours dans l'attente d'une amélioration de leur quotidien.

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