Monsieur le président, monsieur le président de la commission des affaires étrangères, monsieur le rapporteur, mesdames et messieurs les députés, nous voici réunis ce soir pour examiner le projet de loi qui autorise l'approbation de la déclaration de 2017 relative à la phase d'exploitation des lanceurs Ariane, Vega et Soyouz au Centre spatial guyanais – CSG. Vous me permettrez en ce moment d'avoir une pensée pour toutes celles et tous ceux qui œuvrent dans ce territoire pour endiguer la propagation de la pandémie. Le ministre des outre-mer, vous le savez, était il y a quelques jours en Guyane pour superviser les mesures sanitaires déployées sur place. Malgré ces épreuves, je veux rappeler combien la Guyane a d'atouts. Souvenez-vous que le général de Gaulle disait en 1964, quand il faisait le choix d'y localiser ce centre : « toutes les régions du monde sauront où est la Guyane. » Il est vrai que nous avons là des infrastructures de première qualité.
Notre filière spatiale est en proie à une concurrence majeure, intra-européenne, mais aussi et surtout américaine et asiatique. Dans ce contexte, il est impératif de poursuivre les investissements européens dans le domaine spatial et de continuer les innovations de rupture dans ce secteur, en prenant appui sur la nouvelle génération de lanceurs. C'est tout le sens de l'inauguration par Sébastien Lecornu du nouveau pas de tir des fusées Ariane à Kourou il y a quelques jours. Nous nous dotons également des moyens nécessaires pour préserver ce savoir-faire technologique français : le plan de relance consacre ainsi 500 millions d'euros à la filière spatiale.
Si l'investissement à l'échelle nationale demeure important, notre ambition ne peut se réaliser que grâce à une coopération interétatique européenne forte et structurée. Les événements récents en matière d'armement ont le mérite d'illustrer un enjeu fondamental : la souveraineté européenne doit reposer sur des alliances sûres avec nos partenaires européens. Dans ce cadre, l'Agence spatiale européenne joue un rôle majeur, tout autant que le Centre national d'études spatiales (CNES), notre agence spatiale nationale.
Pour porter les ambitions européennes dans un contexte d'accélération des projets d'exploration portés par les grandes puissances spatiales et de concurrence de plus en plus sévère entre les acteurs publics et privés du secteur, l'Agence spatiale européenne (ASE – ESA en anglais) s'appuie sur trois lanceurs : Ariane 5, à laquelle succédera très prochainement Ariane 6, Vega et Soyouz.
Le texte, signé par dix-huit États européens, qui vous est aujourd'hui soumis, constitue l'instrument encadrant la gouvernance de l'exploitation de ces lanceurs au Centre spatial guyanais. C'est un véritable accord intergouvernemental qui succède à la déclaration du même nom adoptée il y a des années. La mise en œuvre de cette déclaration a permis le lancement d'environ soixante-quinze satellites institutionnels européens qui ont couvert des besoins stratégiques dans les domaines de la défense, de la navigation et de l'observation.
Il est aujourd'hui proposé de prendre en compte la responsabilité croissante des maîtres d'œuvre industriels Arianespace, ArianeGroup et de la société italienne Avio pour la construction de Vega. L'accord précise notamment les entités chargées de l'exploitation dans une logique de dévolution. Les États parties confient à l'Agence spatiale européenne un mandat visant à s'assurer du respect de la déclaration par ces industriels. La responsabilité juridique liée aux lancements est répartie, selon un schéma propre à chaque lanceur, entre l'État français, l'Agence spatiale européenne et l'opérateur de lancement Arianespace.
L'accord prévoit enfin un principe de préférence européenne en matière de lancement – je sais que ce point a fait débat au sein de votre commission. Il constitue un engagement fort de la France, contribuant à réaliser l'autonomie stratégique européenne, mais soyons très clairs : la France continuera à œuvrer pour que le champ d'application de ce principe de préférence s'étende dans les années à venir et qu'il devienne plus affirmatif qu'incitatif. Il y a là encore des progrès à accomplir, car c'est une dimension essentielle pour que l'Europe prenne son destin en main en la matière.
Tels sont, brièvement esquissés, les enjeux essentiels du texte mis en débat ce soir. Je suis sûr qu'il viendra conforter l'apport que l'activité du CSG constitue pour un territoire cher à notre cœur.