Intervention de Lamia El Aaraje

Séance en hémicycle du jeudi 1er juillet 2021 à 15h00
Respect des principes de la république — Explications de vote

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaLamia El Aaraje :

Le débat que nous nous apprêtons à conclure a été parfois passionné, parfois mesuré, mais finalement assez peu apaisé et rassembleur ; je le regrette. Je déplore en particulier qu'à cause de certains propos tenus dans cet hémicycle, des personnes ou des groupes de personnes se sont sentis stigmatisés, pointés du doigt. Je le déplore d'autant plus que nous avons déjà été durement éprouvés par des années qui ont été extrêmement difficiles, sur le plan moral comme économique – je pense que c'est un constat que nous partageons tous, ou alors nous ne vivons pas dans les mêmes territoires.

Plus globalement, cette période a été difficile pour la République. On a évoqué à de nombreuses reprises les attentats terroristes et les nombreuses formes de haine, que ce soit en ligne ou de façon physique, qui ont fracturé notre société, y laissant de profonds stigmates. Notre République en a été éprouvée et c'est peut-être ce qui a été quelque peu oublié dans nos débats, du moins selon la perspective qui est celle du groupe Socialistes et apparentés.

La République inclut, la République apaise, la République donne du sens, elle donne l'espoir de la promesse républicaine, elle donne des perspectives – elle le devrait du moins – à tous nos enfants. La laïcité, qui a souvent été évoquée dans cet hémicycle, est censée enrichir cette république puisque c'est elle qui permet à qui le souhaite de pratiquer sa foi dans le respect des autres et, surtout, dans le respect de la République.

C'est le sens que nous aurions dû retrouver dans ce texte, c'est la vocation qui aurait dû être la sienne : défendre une vision de la République pour toutes et tous. Or ce texte a échoué sur ce point : il est fourre-tout, il stigmatise, il divise.

J'ai été stupéfaite et choquée par la teneur de ces débats, marqués par un amalgame systématique, et probablement volontaire sur certains bancs. À chaque fois qu'on a parlé d'intégrisme, on a désigné l'islam, l'islam politique, l'islam radical, à juste titre, certes, mais je pense que nous aurions gagné à parler plus globalement d'intégrisme, à parler de ce qui nous divise, de ce qui divise cette république, et pour moi c'est un très grand regret. L'intégrisme, pour moi, c'est tout ce que la République n'est pas. L'intégrisme, c'est le rejet de l'autre, c'est la haine, le rejet de la société. Au fond, c'est le rejet de nous toutes et tous, dans la diversité de nos opinions, de nos familles, de nos positions politiques.

L'enjeu de ce texte était d'y répondre. C'était notre volonté et c'était le sens du discours du Président de la République, dont on s'est à mon sens beaucoup éloigné. On y répond, certes, en partie par la répression et la sanction, quand des manquements sont constatés, quand des infractions, des délits, des crimes sont commis, mais je pense qu'on y répond aussi et surtout par plus d'amour, plus de cohésion, plus de lien. Ce n'est pas là une vision naïve, mais au contraire juste et réelle, une vision solidaire qui nous aurait permis de faire République ensemble.

Nous devons être tous ensemble intransigeants sur la laïcité, sur la République, mais cela suppose que nous soyons intransigeants sur la cohésion sociale et le vivre-ensemble et c'est sur ce point que nous avons échoué. Le groupe Socialistes et apparentés aurait voulu plus de moyens pour les services publics, plus de moyens pour les gens, plus de moyens pour les travailleuses et les travailleurs, plus de moyens pour l'école, pour les associations, pour les clubs sportifs. Au lieu de ça, on a stigmatisé, on a vilipendé, on a pointé du doigt. À partir de quelques comportements déviants, de responsabilités individuelles, on a fait des généralités et je le regrette.

On a beaucoup parlé des femmes – de leur tenue, de leur façon d'être citoyennes, de leur façon d'occuper l'espace public. On a parlé de répression, on a parlé de punition ; on a très peu parlé de cohésion et de vivre-ensemble. C'est pourquoi nous voterons contre ce texte.

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