Intervention de Marie-France Lorho

Séance en hémicycle du mardi 6 juillet 2021 à 21h30
Protection des enfants — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaMarie-France Lorho :

Avec plus de 300 000 enfants bénéficiant chaque année d'une mesure de protection de l'enfance, il semblait essentiel de se pencher sur ce sujet majeur. Ce projet de loi, qui tend à l'amélioration des conditions d'accueil et de la vie quotidienne des enfants bénéficiant de ces services, était donc bienvenu. Je regrette néanmoins qu'il s'inscrive dans un tel calendrier, au lendemain de l'adoption d'un projet de loi relatif à la bioéthique dont on peut remettre en question l'intérêt pour les enfants. Comme pour ce projet de loi voté le mois dernier, j'aurais aimé que dans le présent texte, il s'agisse nommément du « respect de l'intérêt supérieur de l'enfant », mots qui ne sont même pas inscrits dans le titre Ier .

Il faut néanmoins saluer des dispositifs de bon sens, comme la possibilité que l'enfant soit accueilli par un membre de la famille ou un tiers de confiance. Le travail de la commission, qui a ouvert la voie à la consultation de l'enfant concerné, est un ajout précieux, même s'il serait préférable de définir de manière plus complète les éléments nécessaires à la reconnaissance du discernement de l'enfant. Comme le soulignait un récent rapport de l'INED – l'Institut national d'études démographiques –, « la gestion du degré d'information de l'enfant constitue une problématique à part entière dans le cadre de la protection de l'enfance. » Peu associés aux décisions qui les concernent, les enfants vivent mal ces placements. C'est d'ailleurs la raison pour laquelle je déplore que le projet de loi ne prenne en compte à aucun moment la question de la fratrie. Le directeur général de la fondation Action enfance expliquait pourtant : « Il est très important de pouvoir garder ses frères et sœurs avec soi quand on est placé, pour le soutien et parce que cela crée des liens ».

Au nom de l'intérêt supérieur de l'enfant, il paraît donc légitime de plaider pour la préservation de l'unité fraternelle au sein des établissements où les enfants sont placés. C'est ce que je proposerai à mon tour au travers d'un amendement, à la suite de plusieurs de mes collègues qui l'ont fait en commission.

Je m'étonne par ailleurs que le Gouvernement veuille faire prévaloir les compétences du ministère des solidarités et de la santé au lieu de renforcer l'échelon départemental qui a l'expérience du terrain, qui connaît les acteurs et qui gère depuis quelques années maintenant la protection de l'enfance. De la même façon, je m'étonne de voir l'avis de la Haute Autorité de santé s'immiscer dans le référentiel national d'évaluation des situations de risque pour la protection de l'enfance. N'est-ce pas en contradiction avec le code de l'action sociale et des familles, aux termes duquel le président du conseil départemental est chargé du recueil, du traitement et de l'évaluation des informations préoccupantes relatives aux mineurs en danger ou qui risquent de l'être ?

Mais c'est surtout sur la question des mineurs non accompagnés que je souhaitais attirer l'attention du Gouvernement. Le fait de sous-traiter aux départements la gestion des mineurs non accompagnés en les répartissant sur l'ensemble du territoire, à l'heure où le taux d'acceptabilité de l'immigration est de plus en plus bas, relève du plus pur cynisme. Par-delà les logiques budgétaires dont se préoccupe le Gouvernement, de telles politiques contribuent à encourager la venue illégale de ces mineurs. Le fait de déployer des dispositifs de prise en charge, alors que très peu de reconduites à la frontière des personnes demeurant illégalement sur le territoire sont exécutées, est un signal laxiste envoyé aux réseaux clandestins. On invite ainsi les passeurs à poursuivre leur abominable entreprise.

Les coûts déployés pour la prise en charge de ces mineurs ne font d'ailleurs que croître : le sénateur Arnaud Bazin souligne ainsi que lorsqu'il était à la tête du Conseil départemental du Val-d'Oise en 2011, un peu plus de 3 millions d'euros étaient dépensés pour ces jeunes, contre plus de 40 millions d'euros aujourd'hui. C'est un budget conséquent, notamment lorsque l'on se penche sur le nombre important de fraudeurs se faisant passer pour des mineurs.

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