Bien entendu, la rédaction des amendements identiques ne me satisfait pas, s'agissant en particulier de l'information du président du conseil départemental.
J'en ai fait l'expérience : j'ai visité un foyer d'accueil avec le président du conseil départemental – depuis son élection, c'était d'ailleurs la première fois qu'il se rendait dans ce foyer. Nous avons constaté que chaque groupe de douze enfants était bien pris en charge par deux éducateurs. Les enfants jouaient, plusieurs activités leur étaient proposées, et ils ont même eu droit à de la pizza ; tout était formidable.
Quelques jours après, les éducatrices ont pris rendez-vous avec moi. Je les ai reçues dans ma permanence sous le sceau du secret, sans le noter dans mon planning. Elles m'ont avoué que la réalité était complètement différente de ce que j'avais vu sur place : deux éducatrices par groupe, c'était formidable, mais cela n'arrivait jamais. En général, elles étaient toutes seules, avec de temps en temps quelqu'un qui pouvait jongler entre les trois groupes. Au grand maximum, elles étaient donc quatre pour trois groupes, sachant que chaque groupe comprenait entre dix et douze enfants.
Lors de ma visite, on m'avait également caché le cas d'une enfant violente qui déstabilisait complètement tous les groupes : quand elle était violente, une éducatrice d'un autre groupe devait venir en soutien en laissant son propre groupe sans éducateur. Je ne vous dis pas ce qui se passait derrière.
Surtout, ce qui m'a marquée, c'est que sur ces cinq éducatrices, deux se sont mises à pleurer. Depuis, ces dernières ont cessé d'exercer leur métier. Pourquoi ? Depuis des mois, elles demandaient d'être soutenues face à la situation de cette petite fille qui mettait tout le monde en danger. Elles ont quitté leur métier parce qu'un jour, en l'absence de soutien de leur hiérarchie, poussées à bout, elles ont collé cette enfant contre un mur. Elles m'ont dit qu'elles n'avaient pas choisi d'être éducatrices pour agir ainsi ; elles ont donc décidé d'arrêter.
Monsieur le secrétaire d'État si nous voulons vraiment changer les choses, il ne faut pas prévenir le président du conseil départemental, et surtout pas sept jours avant. Rien de tel si nous ne voulons rien voir. Vous avez été nommé à la suite de reportages qui ont montré la nécessité de voir les choses telles qu'elles sont. Je pense que le délai de prévenance est une aberration.