Intervention de Laurent Pietraszewski

Séance en hémicycle du vendredi 23 juillet 2021 à 15h00
Convention no 190 de l'organisation internationale du travail relative à l'élimination de la violence et du harcèlement dans le monde du travail — Présentation

Laurent Pietraszewski, secrétaire d'État chargé des retraites et de la santé au travail :

Le 21 juin 2019, réunie à l'occasion de sa cent huitième session, dite session du centenaire, la Conférence générale de l'Organisation internationale du travail (OIT) adoptait la convention n° 190 visant à éliminer la violence et le harcèlement dans le monde du travail.

Cette convention était attendue de tous : des États membres de l'OIT, de nos concitoyens, des organisations non gouvernementales, des partenaires sociaux. Ce texte est pionnier, car il s'agit de la première norme contraignante, de portée universelle, visant à éradiquer la violence et le harcèlement dans le monde du travail.

L'ambition de la convention est d'assurer à chacun et à chacune d'entre nous le droit d'évoluer dans un monde du travail où aucune violence ne doit avoir sa place. Pour ce faire, le présent texte met en place un cadre international structuré et cohérent. La convention repose sur un principe simple : le monde du travail doit assumer ses responsabilités lorsqu'un acte de violence ou de harcèlement est commis « à l'occasion, en lien, avec ou du fait du travail ».

L'article 1er donne la première définition internationale de la violence et du harcèlement au travail, caractérisée par « un ensemble de comportements et de pratiques inacceptables, ou de menaces de tels comportements et pratiques, qu'ils se produisent à une seule occasion ou de manière répétée, qui ont pour but de causer, causent ou sont susceptibles de causer un dommage d'ordre physique, psychologique, sexuel ou économique, et comprenant la violence et le harcèlement fondés sur le genre ». Oui, mesdames et messieurs les députés, la violence et le harcèlement au travail sont multiformes : cette définition vise l'ensemble de ces actes inacceptables subis dans la sphère professionnelle, encore trop souvent passés sous silence.

Ainsi, la convention reconnaît le droit de chaque personne à vivre dans un monde du travail libéré de la violence et du harcèlement. Elle porte une attention particulière aux violences fondées sur le genre. À cet égard, son article 2 rappelle que personne ne doit être victime de la violence et du harcèlement au travail. Les États qui auront ratifié le texte se verront imposer des obligations de moyens pour protéger chacun dans le monde du travail, quel que soit son statut : salarié, contractuel, stagiaire, bénévole, demandeur d'emploi. Il s'agit de ne laisser personne de côté, sans protection particulière.

Dans ce but, et afin de prévenir le plus en amont possible les cas de harcèlement et de violence au travail, la convention appelle toutes les parties prenantes – pouvoirs publics, employeurs, travailleurs, partenaires sociaux – à se mobiliser, afin d'unir leurs efforts dans la prévention et la protection contre toute forme de violence et de harcèlement sur le lieu de travail. La recommandation n° 206, qui n'est pas un texte contraignant soumis à la ratification des États, précise la mise en œuvre de la convention.

Il était essentiel que la convention définisse un niveau de normes qui garantisse les protections fondamentales contre le harcèlement et les violences, et qui, dans le même temps, puisse être adoptée par le plus grand nombre de pays dans le monde. Son champ d'application est particulièrement large. Il doit être lu à la lumière d'obligations qui sont, quant à elles, adaptées aux responsabilités de chacun.

La convention prévoit ainsi que les employeurs doivent prendre des mesures appropriées « correspondant à leur degré de contrôle » pour prévenir la violence et le harcèlement dans le monde du travail, « dans la mesure où cela est raisonnable et pratiquement réalisable ». Ce faisant, elle appelle l'ensemble des acteurs du monde du travail, employeurs privés ou publics, travailleurs, organisations syndicales et patronales, clients et tiers, à agir avec tous les moyens dont ils disposent pour lutter contre les violences et le harcèlement.

En assurant le rôle de porte-parole de l'Union européenne et de ses États membres durant les deux années de pourparlers, la France a joué un rôle moteur dans la négociation comme dans l'adoption de ce texte. Les résultats sont à la hauteur de nos attentes.

Vous l'aurez compris, le présent projet de loi ratifiant la convention n° 190 de l'OIT revêt une importance majeure pour notre pays, qui, grâce à votre approbation, sera parmi les premiers à ratifier ce texte ambitieux. À cet égard, le Gouvernement se réjouit de l'adoption du texte à une belle unanimité, mardi dernier, par la commission des affaires étrangères : ses objectifs, tant politiques que diplomatiques, permettent de transcender les différentes sensibilités.

La ratification de la convention permettra de consacrer l'engagement du Président de la République en faveur de l'égalité entre les femmes et les hommes. L'émergence du mouvement #MeToo, ces dernières années, a mis en lumière la persistance encore forte du harcèlement et de la violence dans nos sociétés ; elle n'épargne, bien sûr, pas le monde du travail. Une enquête récente menée en France, en Allemagne, en Espagne, en Italie et au Royaume-Uni, montre que 60 % des Européennes interrogées ont déjà été victimes d'une forme de sexisme, ou de harcèlement sexuel au travail, au cours de leur vie professionnelle.

Le Président de la République a fait de l'égalité entre les femmes et les hommes la « grande cause nationale » du quinquennat : la lutte contre le harcèlement et contre les violences dans le monde du travail en fait pleinement partie. Quatre ans après, le constat est sans équivoque : les actes ont suivi les paroles et les engagements que nous avions pris, ce qui s'est traduit par la tenue du Grenelle contre les violences conjugales, dans le cadre duquel le Gouvernement a pris toute une série de mesures pour lutter plus efficacement contre les violences faites aux femmes, notamment dans le monde du travail.

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