Dans la série de textes dont on nous demande d'autoriser ce matin la ratification, celui-ci est tout de même un peu particulier : il s'agit, je le cite, d'un « partenariat stratégique » entre l'Union européenne et le Japon. Le mot est joli, mais la chose est en réalité fort vilaine.
Disons, tout d'abord, que l'on soumet à notre ratification un texte qui est déjà pour partie entré en application depuis deux ans. Ce texte a beau parler du souci de la démocratie, que nous aurions comme prétendue valeur commune avec le Japon, la pratique nous instruit assez que la démocratie n'est vraiment pas le sujet, ni pour Paris, ni pour Bruxelles, ni pour Tokyo. D'ailleurs, chacun ici sait dans quelles conditions d'opacité la Commission européenne mène ce genre de négociations : une véritable phobie des peuples la mène à interdire, même aux parlementaires, de consulter librement le projet d'accord. Comme on sait, ce genre de privilège est réservé aux lobbys, qui ont table ouverte à la Commission. Avec ce genre de procédure, on peut bien exciper de son amour pour la démocratie ; personne n'est convaincu, et tout ce qui suit cette hypocrite profession de foi ne peut susciter que notre défiance.
Ainsi donc, ce partenariat serait justifié parce que nous aurions des objectifs communs en matière de préservation de l'environnement. Je n'en crois rien, mais c'est possible, après tout : l'Union européenne est si peu exemplaire. De toute façon, la réalité dément ce discours : comme vous le savez, cet accord complète un autre accord signé en même temps, un accord commercial qui a créé la première zone de libre-échange au monde, une zone représentant 30 % du PIB mondial. C'est-à-dire qu'on a levé toutes les barrières qui pouvaient encore éviter que les marchandises parcourent plusieurs fois la planète entre l'Asie et l'Europe avant d'arriver devant leur consommateur ou utilisateur final. De cette façon, il est impossible que nous n'ayons pas participé à une hausse sensible des émissions de gaz à effet de serre.
Après cela, venir parler d'environnement est d'une hypocrisie totale, et cela l'est d'autant plus en raison de l'actualité. Comme vous le savez, le Japon prévoit de déverser dans l'océan 1,25 million de tonnes d'eau contaminée au tritium radioactif de Fukushima. Il faut dire que nous partageons ce genre de pratiques polluantes. On comprend mieux que l'on a affaire à un accord entre pompiers pyromanes de l'écologie. Nous aurions mieux fait de nous associer pour trouver les moyens de démanteler les installations nucléaires que nous avons sur les bras.