Intervention de Christine Cloarec-Le Nabour

Séance en hémicycle du jeudi 6 mai 2021 à 9h00
Revenu de solidarité active pour les jeunes de 18 à 25 ans — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaChristine Cloarec-Le Nabour :

Il est plus difficile mais plus courageux de revoir les politiques en faveur de la jeunesse et de réussir à créer les conditions d'une insertion sociale et professionnelle durable pour tous. C'est ce que nous faisons.

L'extension du RSA à tous les jeunes à partir de 18 ans est une fausse bonne idée. Pourquoi ? D'abord, parce que le RSA reste stigmatisant, quoi qu'en disent certains. Ensuite, l'extension à tous les jeunes serait une mesure injuste : certains en bénéficieraient alors qu'ils n'en ont pas besoin ; nous préférons donner plus à ceux qui ont moins. En outre, nous conservons la volonté de conditionner la garantie de ressources à un contrat d'engagement réciproque entre le jeune et la structure qui l'accompagne, comme pour les bénéficiaires du RSA aujourd'hui, comme pour un jeune qui signe un parcours d'accompagnement vers l'emploi et l'autonomie (PACEA) avec une mission locale. En d'autres termes, le RSA jeune existe déjà, mais il est versé en contrepartie d'études ou dans le cadre d'un parcours d'insertion.

Tout le monde s'accorde aujourd'hui à considérer que la garantie jeunes – dispositif d'accompagnement renforcé d'un an renouvelable six mois à la main des missions locales – est un formidable outil d'émancipation et d'insertion des jeunes. Ainsi, le rapport du Conseil d'orientation des politiques de jeunesse (COJ) conclut : « La garantie jeunes doit être demain la porte d'entrée pour tous les parcours d'accompagnement des jeunes en situation de précarité puisqu'elle allie "accompagnement" et "garantie de ressources", ce qui constitue un atout pour lutter efficacement contre la pauvreté des jeunes. La réussite de la garantie jeunes tient à ce modèle spécifique, contrairement aux dispositifs RMI et RSA, pour lesquels la faiblesse du volet accompagnement a été relevée dans de nouveaux rapports. »

Si vous voulez en savoir plus sur ces jeunes qui frappent à la porte des missions locales et entrent en garantie jeunes, je vous recommande, en tant que présidente de mission locale, un excellent reportage écrit et réalisé par Ilan Teboul, Entendez-vous dans nos campagnes, qui passe ce soir sur La Chaîne parlementaire, documentaire très touchant, sur de jeunes Alsaciens vivant dans un territoire rural, qui ont intégré le dispositif garantie jeunes quelques jours avant le premier confinement.

Vous pourrez suivre ces jeunes au parcours de vie difficile. Certains ont subi l'échec scolaire, la stigmatisation, la honte. D'autres ont été victimes de violences. Tous sont persuadés qu'ils ne valent rien. Ils doutent, ils manquent de confiance en eux, ils sont perdus. Ils souffrent de l'isolement, de la solitude, n'ont pas le permis, pas de moyen de locomotion. Ils rêvent de partir, de trouver un travail, d'être autonomes. Ce documentaire montre bien quelle est la diversité des profils, comment ces jeunes passent des doutes à l'envie, comment ils se reconstruisent peu à peu et comment ils apprennent à valoriser ce qu'il y a de bien chez eux quand ils n'ont rien à valoriser sur un CV. De belles histoires, et d'autres qui se poursuivent, car certains ont besoin d'un peu plus de temps.

Alors, plutôt que de créer un RSA jeune, nous préférons poursuivre la réflexion sur les contours d'une garantie jeunes universelle qui allie accompagnement et garantie de ressources. Le Président de la République vient de s'engager dans ce sens et fera des annonces avant l'été. Le ministère du travail, de l'emploi et de l'insertion consulte en ce moment les acteurs de terrain, le service public de l'emploi, Pôle emploi et les missions locales. L'Union nationale des missions locales (UNML) a d'ailleurs rendu une première contribution et poursuit ses travaux de réflexion au sein de son réseau.

Des chantiers, il en reste encore énormément, comme la prévention du décrochage scolaire et universitaire, la situation des étudiants, la formation sur les droits, les offres de formation, le repérage des invisibles ou la mobilisation effective et complémentaire de tous les acteurs de l'éducation, de l'orientation, de la formation et de l'accompagnement, ainsi, bien sûr, que celle des entreprises, associations et collectivités. Nous avons demandé des efforts monumentaux aux jeunes. Nous leur devons aujourd'hui tout notre engagement.

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