Cette juste représentation, nous y travaillons partout. Dans la lignée de la loi Sauvadet, nous avons considérablement renforcé les obligations de l'employeur public. Les mesures qui encadrent notre fonction publique sont parmi les plus ambitieuses au sein de l'Union européenne. Sans chercher à les modifier dans un sens ou un autre alors même qu'elles commencent tout juste à s'appliquer, ce texte vise à faire en sorte que les plus grandes entreprises de notre pays suivent également cette voie afin de réduire les inégalités salariales que l'index de l'égalité professionnelle entre les hommes et les femmes permet de mesurer. Les articles 6 et 6 bis nous permettront de franchir un cap supplémentaire.
Avant d'en arriver au prochain article, je veux prendre le temps de saluer l'engagement et la détermination de ma prédécesseure, Mme Marie-Jo Zimmermann. Mesurons ensemble la réussite de sa démarche : au-delà de son texte, c'est une logique qui a été entérinée, permettant de corriger l'effacement des femmes de la vie économique, de rectifier la défaillance de notre universalisme à l'endroit des femmes. Grâce à l'instauration de quotas, les femmes sont désormais plus de 46 % dans les conseils d'administration des grandes entreprises françaises, plaçant ainsi la France derrière l'Islande au niveau mondial en la matière.
Pourtant, dix ans plus tard, les femmes à la tête de grandes entreprises en France se comptent encore sur les doigts d'une main. C'est pourquoi, mes chers collègues, je vous propose d'écrire une nouvelle page grâce à l'article 7 de cette proposition de loi. Nous proposons un dispositif ambitieux : mesurer la part des femmes au sein des instances dirigeantes des entreprises de plus de 1 000 salariés, et fixer à ces dernières des objectifs chiffrés, selon un rythme réaliste, afin de parvenir à une juste représentation de chaque sexe. La part des femmes au sein des instances dirigeantes de ces entreprises passerait à 30 % d'ici à cinq ans, puis à 40 % de femmes d'ici à huit ans. Ce rythme me semble être le bon pour insuffler cette dynamique paritaire au sein de nos entreprises.
Le partage du pouvoir économique doit être réinventé de manière active au sein des entreprises. Rappelons que la mixité de la gouvernance économique – et donc des instances dirigeantes des entreprises – est certes un enjeu d'égalité professionnelle et de justice sociale, mais elle est également un levier de performance et de croissance pour les entreprises. Rappelons aussi le mantra du collectif Sista : « Il faut compter les femmes pour que les femmes comptent. » C'est ce que je vous propose, à travers les articles 8 et 8 bis , qui renforcent les objectifs de représentation des femmes au sein des comités d'investissement de Bpifrance et des fonds d'investissement, ainsi que la part des femmes bénéficiaires de leurs actions.
Pour conclure, permettez-moi de citer Virginia Woolf : « Et alors que j'écrivais cette critique, j'ai pris conscience que si je voulais faire de la critique littéraire, je devrais vaincre un certain fantôme. Ce fantôme était une femme, et quand j'en suis venue à mieux la connaître, je lui ai donné le nom de l'héroïne d'un poème bien connu, l'ange du foyer. » Tuer l'ange du foyer faisait partie de la tâche de la femme écrivain. Ce fantôme rôde toujours et demeure un obstacle pour nombre de femmes cherchant à se libérer de contraintes instaurées par de puissantes règles sociales. Aussi, une fois les derniers bastions sociaux, économiques et politiques conquis, il reste à chacune d'entre nous d'accepter la grande aventure d'être soi et de tuer l'ange du foyer, jour après jour.