Intervention de éric Dupond-Moretti

Séance en hémicycle du mardi 18 mai 2021 à 15h00
Confiance dans l'institution judiciaire — Présentation commune

éric Dupond-Moretti, garde des sceaux, ministre de la justice :

Bien sûr, la prison est nécessaire pour mettre à l'écart des individus dangereux et préserver la sécurité de nos concitoyens. Mais elle doit également favoriser leur réinsertion. En fin de peine, nous le savons tous, une libération accompagnée divise par deux le risque de récidive, or trop de détenus sont encore libérés sans aucune prise en charge. Nous avons donc conçu un mécanisme systématique de suivi des détenus à trois mois de leur libération.

Par ailleurs, s'agissant des réductions de peine, je souhaite à la fois durcir le régime applicable aux condamnés pour des faits de violence contre les forces de l'ordre et mettre un terme aux crédits de réduction de peine automatiques (CRP), système parfaitement hypocrite de régulation carcérale, que nos concitoyens ne comprennent pas. Le nouveau mécanisme que nous avons conçu met fin à cette automaticité pour mettre en valeur le mérite, les efforts et la bonne conduite envers le personnel pénitentiaire, qui sont des gages tangibles de la volonté du détenu de se réinsérer. L'objectif essentiel de cette réforme est de favoriser la réinsertion, de rappeler que les exigences de la vie en société ne peuvent s'effacer en entrant en prison et que le sens de l'effort et du travail ne sont pas des sens interdits. Cette mesure incitera les détenus à accomplir des efforts qui pourront prendre des formes différentes : apprendre à lire, se soigner, se désintoxiquer, suivre une formation, ou travailler, bien sûr.

Dans les années 2000, 50 % des détenus travaillaient. Ils ne sont plus aujourd'hui que 29 %. Pour inverser cette tendance, j'ai dès à présent mobilisé un grand nombre d'acteurs économiques susceptibles d'offrir du travail en prison. Dans cette optique, j'ai souhaité créer un contrat d'emploi pénitentiaire pour le détenu qui exerce une activité professionnelle. Il sera assorti de certains droits sociaux, dès la libération, tels que l'assurance chômage et l'assurance vieillesse. Il s'agit là d'une question de dignité et d'un levier essentiel pour mieux lutter contre la récidive.

Enfin, le présent projet de loi vise à restaurer la confiance envers les professionnels du droit, qui constituent souvent le premier contact de nos concitoyens avec le monde judiciaire. Les règles déontologiques qui régissent les professions des officiers publics et ministériels comme des avocats sont anciennes et complexes et donnent lieu à très peu de sanctions. Nos concitoyens ont parfois le sentiment d'un entre-soi et d'un contrôle disciplinaire défaillant. Le texte modernise en profondeur les règles applicables, en prévoyant d'abord que chaque profession devra se doter d'un code de déontologie. Il renforce en outre la place de l'usager, qui devra être systématiquement informé des suites données à sa réclamation et pourra saisir directement la juridiction disciplinaire, en l'absence de conciliation et de poursuites. La refonte du système passe également par la modernisation de l'échelle des sanctions et par la création de véritables juridictions disciplinaires, composées, pour une plus grande impartialité, de manière échevinale, avec des avocats et des magistrats.

Je tiens enfin à remercier le rapporteur, Stéphane Mazars, ainsi que la députée Laetitia Avia, pour la qualité de leur travail de construction de ce texte et pour leur engagement continu en matière de justice. Plus largement, c'est l'engagement de l'ensemble des députés de la majorité que je tiens à saluer – je pense en particulier à Mme Vichnievsky et à M. Houbron.

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