Intervention de Marie-Caroline Bonnet-Galzy

Réunion du mercredi 6 décembre 2017 à 17h00
Commission des affaires sociales

Marie-Caroline Bonnet-Galzy :

Je vous remercie pour ces questions passionnantes, qui m'inspireront pour l'avenir. J'espère que vous comprendrez que je n'aie pas, aujourd'hui, toutes les réponses.

Madame Wonner, vous l'avez constaté, nous avons bien avancé dans un certain nombre de domaines : les équipes étaient en face de vous.

Le débat sur les vaccinations l'a bien montré : nous devons organiser un discours public qui recrée la confiance, avec les professionnels et avec les populations. Quelquefois, les messages se perdent, se diluent et des contre-messages apparaissent Pour créer cette confiance, il ne faut pas être naïf : de nouveaux outils existent et nous devons y prendre toute notre place.

C'est le cas dans le débat concernant les vaccinations, mais la situation est identique sur beaucoup d'autres sujets. Nous devons apparaître suffisamment haut dans les moteurs de recherche. Parfois, cela se paie, mais il faut être sûr que le discours légitime apparaisse à un bon niveau dans les recherches et qu'il soit étayé, avec des preuves médicales fortes. Sinon, il sera contrebalancé par ce que les uns et les autres peuvent penser ou diffuser. Il faut savoir se battre sur les bons terrains et utiliser pleinement, avec intelligence et pertinence, les nouveaux outils.

J'ai bien entendu votre message sur la santé mentale, auquel je souscris pleinement. Ce point est identifié dans le contrat d'objectifs et de performance de l'Agence. Dans ce COP figurent l'ensemble des réformes et toute la programmation associée, que vous avait annoncées le Dr Bourdillon. Le COP ayant été voté, il sera sur le site de l'Agence dans quinze jours. Les orientations, programmes et actions se déclineront dans ce cadre et il nous faudra les suivre pendant cinq ans. Un calendrier sera associé.

La santé mentale a été identifiée comme une des priorités dans le domaine des expertises utiles aux politiques menées. Il s'agit de répondre à la question : comment construit-on une expertise puis la fait-on rejaillir sur la politique appliquée ? C'est de cette façon que nous serons un influenceur incontournable. Vous l'avez dit, notre ministre est extrêmement déterminée à ce sujet ; c'est une force pour notre agence. Nous sommes chargés d'agir auprès des maîtres d'ouvrage des politiques, mais aussi de constituer des bases de données intelligentes, à partir desquels des analyses seront réalisées, étayées par des éléments de preuve incontournables nous permettant d'expliquer, de convaincre, d'orienter.

Nous sommes, là encore, face à de nouveaux modes de faire. Cette capacité à construire, stocker, croiser les données doit nous permettre des progrès importants. Nous devons disposer d'orientations claires : il faut choisir les secteurs que l'on juge prioritaires pour l'analyse, puis les exploiter pour aboutir. L'agence doit porter ce message : mesurer nos priorités pour creuser le sillon des données correspondantes.

S'agissant des personnes en situation de handicap, je ne travaille pas encore à l'agence mais je sais que ce sujet est d'ores et déjà intégré, et l'était depuis longtemps par l'INPES. Sur le site, des formulaires sont dédiés aux personnes handicapées.

Il est important de développer ces missions, en lien avec la CNSA, afin de mieux nous coordonner. S'agissant de la coordination, l'agence m'a transmis des fiches d'entretiens réalisés entre mai et septembre avec l'ensemble des interlocuteurs et des agences – dont la CNSA. Nous savons désormais sur quels points nous avons besoin de coopérer et sur lesquels nous avons besoin de clarification et d'articulations.

Monsieur Lurton, vous avez eu la chance de visiter Santé publique France ; je suggérerai une nouvelle visite avec les membres de la commission qui le souhaiteront. J'y trouverai tout autant d'intérêt que vous et apprendrai également beaucoup car c'est auprès des professionnels, qui sont chacun d'autant plus compétents que les secteurs sont diversifiés, que l'on apprend le mieux.

S'agissant des restructurations, le Dr Bourdillon considère que les établissements ayant intégré l'agence avaient déjà réalisé près de 10 % d'économies sur leurs fonctions supports avant l'intégration. Depuis que la structure existe, 10 % d'économies ont à nouveau été demandés. L'objectif est quasiment atteint. L'impact sur les effectifs est réel, je l'ai indiqué : ils étaient initialement de 600 personnes et ils ont connu deux diminutions de 15 %. L'exercice aura évidemment ses limites car les fonctions support sont très utiles, notamment pour porter les systèmes de bases de données. En effet, les enjeux en termes de systèmes d'information sont très lourds. Il a fallu unifier ces systèmes et ils sont quelquefois vieillissants. Il faut donc garder à l'esprit que ces investissements seront nécessaires dans le futur et qu'il s'agira de marchés sensibles pour le conseil d'administration. De même, il faut pouvoir articuler les fonctions support aux fonctions de compétences et aux fonctions opérationnelles.

Vous avez raison, lorsque vous débattez du budget de l'État, comme de celui de la sécurité sociale, vous êtes amenés à identifier ces problématiques. Notre structure fonctionne, mais nous devons être très vigilants pour qu'elle conserve ses moyens. En effet, la situation actuelle m'amène à penser que nous aurons des besoins supplémentaires ou des besoins par projet. Pour autant, les crédits de l'assurance maladie dans les fonds de prévention doivent aussi pouvoir financer des projets. À l'heure actuelle, la politique de lutte contre le tabac n'est pas financée par l'assurance maladie : nous devons trouver des ponts. Certes, le ministère des Finances tient à décroiser les financements mais, sur la base de projets, la prévention devrait pouvoir faire l'objet de cofinancements.

Vous avez évoqué, comme Mme Wonner, la lutte contre le SIDA. Comme dans la lutte contre le tabac, les messages connaissent une forme d'usure. Certes le SIDA ne tue plus – heureusement ! –, contrairement à ce que j'ai connu à l'AP-HP. Le sujet reste prégnant et l'incidence importante, notamment auprès des hommes – sur les 5 000 à 6 000 nouveaux cas par an, 2 600 concernent les relations entre hommes. Cela dénote d'un relâchement. Nous devons donc absolument rappeler que le SIDA reste présent, même si on peut le soigner et qu'on vit durablement. C'était le but de la campagne de l'an passé, qui avait surpris mais qui visait à toucher les principaux concernés.

Monsieur le président, je vous rejoins s'agissant du tabac. En France, nous déplorons 73 000 morts par an et un taux de tabagisme de 26 %, alors qu'il est de 19 % au Royaume-Uni. Nous sommes au troisième plus mauvais rang européen en la matière, après la Bulgarie et la Grèce, malgré un prix élevé des cigarettes. Des femmes et des jeunes continuent de devenir fumeurs. Nous souhaitons les empêcher de démarrer ou de rechuter.

Sur ces sujets, la déception est réelle et nous devons rester vigilants. Nous devons nous adresser aux plus jeunes – à l'école, au lycée –, mais aussi aux étudiants, cible majeure dans la lutte contre le sida, le tabac, mais aussi l'alcool. Il faut leur faire comprendre que ces addictions ne sont ni un bon usage, ni un style de société. Mais il y a encore du travail…

La campagne menée à l'occasion du mois sans tabac a tout de même été efficace puisque, selon les derniers chiffres dont je dispose, nous avons obtenu les mêmes effets d'inscription pour arrêter le tabac en quinze jours cette année qu'en un mois l'an passé.

Nous devons maintenir et renouveler ces initiatives, en nous adressant à des populations plus jeunes, par le biais de la bande dessinée, des nouvelles technologies, de messages qui choquent ou dérangent quelquefois, car cela permet de mieux toucher les populations concernées.

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