Notre assemblée aborde aujourd'hui l'examen, en troisième lecture, du projet de loi relatif à la bioéthique. Il convient de rappeler que la loi du 7 juillet 2011 prévoit le réexamen des lois de bioéthique tous les sept ans par le Parlement, afin que ce dernier puisse débattre des enjeux éthiques liés aux avancées de la médecine et de la biologie. C'est dans ce cadre que des travaux ont commencé, dès janvier 2018, avec la tenue d'états généraux de la bioéthique, sous l'égide du Comité consultatif national d'éthique pour les sciences de la vie et de la santé. Ils ont été suivis d'un avis du Conseil d'État, du rapport de l'Agence de la biomédecine, d'une évaluation de l'application de la loi de 2011 par l'Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques, ainsi que du rapport de la mission d'information de l'Assemblée nationale sur la révision de la loi relative à la bioéthique.
Près de trois ans après le début de l'examen du texte qui nous a été soumis, et après l'audition d'un grand nombre de parties prenantes, il est grand temps, chers collègues, de statuer sur les dispositions nouvelles dont nous pensons qu'elles constituent des avancées utiles et attendues. Lors de la deuxième lecture, le Sénat a supprimé de nombreuses dispositions majeures sur lesquelles notre assemblée était parvenue à un équilibre : c'est donc à un important travail de rétablissement que la commission spéciale s'est attelée la semaine dernière. Contrairement à ce que veulent laisser penser des esprits chagrins, ce texte n'entraîne pas de rupture anthropologique, mais l'encadrement nouveau qu'il propose – concernant l'ouverture de l'AMP aux couples de femmes et aux femmes seules, l'autoconservation des gamètes, le don d'organes, l'utilisation des informations sur les caractéristiques génétiques, l'encadrement des travaux de recherche ou encore l'extension du dépistage néonatal – s'inscrit dans une évolution juste et proportionnée des pratiques.
S'agissant des aspects scientifiques, lorsque la matière est ardue, les explications nécessaires et utiles qui nous seront à nouveau données à l'occasion de cette nouvelle lecture devraient lever les dernières inquiétudes qui se sont à nouveau exprimées en commission spéciale la semaine passée. En ce qui concerne l'ouverture de l'AMP à toutes les femmes, je crains qu'il soit plus difficile de rallier l'ensemble de l'hémicycle, bien que l'ouverture de cette technique à toutes les femmes ne pose aucun problème bioéthique – les travaux préalables l'ont démontré. Rappelons qu'il s'agit de permettre à chaque femme de devenir mère, quelle que soit son orientation sexuelle, sa volonté d'être en couple ou la possibilité qu'elle a eu de l'être. Cette situation existe, en dehors de toute considération morale. Il s'agit donc de la traiter comme un fait social. Or, comme celui-ci ne contrevient nullement à l'ordre social, il appartient au législateur d'apporter à nos concitoyennes la reconnaissance pleine et entière de leur mode d'accès à la maternité.
Avant de conclure, je souhaite souligner une autre avancée du texte : l'accès des enfants à leurs origines génétiques. Même si tous ne se soucient pas de les connaître, cette possibilité peut faciliter la construction de l'enfant en lui permettant, au besoin, de trouver les réponses qui se révéleraient nécessaires à son épanouissement et à son équilibre. Sur ce point, nous pensons d'ailleurs que le questionnement d'un enfant à l'adolescence peut justifier que ses parents puissent avoir accès aux données non identifiantes du donneur, si cela se révélait nécessaire avant la majorité de l'enfant. Nous vous proposerons un amendement en ce sens.
D'un point de vue sociétal, ce texte comporte des avancées importantes issues des engagements pris par notre majorité devant les Français en 2017. Elles sont attendues et espérées par beaucoup de nos concitoyens : il est donc de notre devoir de les rendre désormais possibles. Notre groupe s'engage à le faire avec conviction, tout en respectant la liberté de conscience et de vote de chacun de ses membres.