Le texte dont nous discutons ce matin peut sembler technique. Il l'est, puisqu'il concerne une petite niche réglementaire du ministère de la cohésion des territoires ; néanmoins, il est au cœur du questionnement démocratique. Qu'est-ce qu'être élu ? Comment exerce-t-on un mandat électif ? Les qualités nécessaires à l'acquisition d'un mandat sont-elles les mêmes que celles qui permettent son bon exercice ? Voilà la question. L'accession au mandat est régie par la règle de la libre concurrence : dans une démocratie libérale comme la nôtre, chacun se débrouille pour y arriver. Mais ce n'est pas tout d'acquérir le mandat, encore faut-il l'exercer. Pour cela, il faut comprendre le système et les règles de l'État de droit – une tâche moins évidente que l'élection. Vous l'avez dit, la France compte plus de 500 000 élus ; c'est une chance, mais celle-ci pose une difficulté qu'il nous revient de résorber.
Les ordonnances que nous nous apprêtons à ratifier ont été prévues par la loi « engagement et proximité ». Par principe, nous sommes toujours vigilants face aux ordonnances et au dessaisissement du Parlement qui les accompagne. Pourtant, madame la ministre, je tiens à saluer la qualité des échanges et du travail effectué avec vos services pour préparer la discussion de ce texte. Ce n'est pas toujours le cas, il faut donc le souligner.
Ce texte améliore de façon efficace le système de formation des élus, dont il maintient les spécificités sans créer de dispositif nouveau. Cet équilibre est important. Un mandat électif n'est pas une mission de salarié, on ne peut pas les traiter de la même façon. L'équilibre qui a été trouvé nous semble cohérent. Il respecte à la fois le caractère bénévole de l'engagement de la majorité des élus, qui peuvent faire appel à un outil qu'ils connaissent déjà, et la spécificité de leur mandat, qu'il ne faut pas confondre avec une activité salariée.
Au risque de mettre les pieds dans le plat, j'insiste sur une question qui nous préoccupe, celle de la place des partis politiques et de leurs organismes de formation. En effet, qui peut former un élu à exercer sa fonction ? Exclure les partis politiques et leurs organismes de formation de la liste des organismes susceptibles de remplir cette mission poserait un problème démocratique. Cette possibilité est maintenue. J'espère que les partis politiques sauront s'en saisir pour continuer à former des élus locaux, départementaux et régionaux, parce que c'est aussi cela, le cœur de la démocratie. On ne rappellera jamais assez que notre Constitution assigne aux partis politiques le rôle de contribuer à l'expression des suffrages, ce qui passe non seulement par la formation des candidats, mais aussi par celle des élus.
Je vous livre enfin quelques regrets, que j'ai déjà exprimés en commission.
Il aurait été intéressant de moduler la forfaitisation des moyens de formation sur la durée du mandat. En effet, le besoin de formation n'est pas linéaire et ne peut se résumer à un simple recyclage ou à une mise à jour. Ainsi, c'est souvent en début de mandat que les nouveaux élus ont un besoin accru de formation. Mais j'ai bien compris que les travaux sur ce sujet se poursuivront et que c'est un texte d'urgence que nous votons aujourd'hui. Ce regret est donc aussi un espoir.
Une attention particulière doit également être portée, au travers de mesures réglementaires ou d'un contrôle de légalité, à la formation des élus par leur collectivité, sur le budget de celle-ci. Dans ce domaine, il reste de l'espace pour les dérives et il faut absolument adopter une logique de contrôle de la dépense, avec l'appui de notre réseau de trésorerie, qui fonctionne très bien. Quand la dépense est inscrite à la ligne « formation », les trésoriers doivent être tenus de s'assurer que ladite formation est bien assurée par des organismes qualifiés et certifiés et non, comme j'ai pu le voir dans ma commune, par un coach privé qui vient émarger à 5 000 euros pour effectuer deux demi-journées d'animation de l'équipe d'adjoints. De telles pratiques sont inacceptables et contraires à l'honnêteté qui doit caractériser le service électif.
Voilà nos principaux sujets de préoccupation. Je rejoins mon collègue Rémy Rebeyrotte sur la nécessité d'être vigilant quant aux petites associations d'élus, qui doivent continuer à assurer le maillage territorial. Mais vu la qualité du travail que nous avons effectué en amont de cette discussion, et étant donné que ce texte constitue un point d'étape, le groupe Les Républicains soutiendra son adoption.