Intervention de Émilie Cariou

Séance en hémicycle du vendredi 11 juin 2021 à 9h00
Projet de loi de finances rectificative pour 2021 — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaÉmilie Cariou :

Le projet de loi de finances rectificative pour 2021 montre la nécessité que la représentation nationale, dans la continuité de son action passée, s'investisse pour organiser le soutien de l'État et de la puissance publique durant cette crise hors norme. Nous, députés, devons répondre présent pour nos concitoyens et les acteurs économiques.

Aussi prenons-nous acte du maintien des dépenses publiques qui vise à maintenir l'activité dans notre pays. Nous avons tous soutenu les aides au chômage partiel, le fonds de solidarité, ou l'annulation des charges fiscales et sociales au bénéfice des TPE les plus durement touchées, ces mesures nécessaires. Oui, nous devons dégager des moyens financiers pour soutenir notre économie et nos concitoyens.

Toutefois, le « quoi qu'il en coûte » commence à coûter cher pour nos finances publiques et l'argent n'est pas forcément versé aux bons endroits. On ne peut, au lendemain d'un scrutin qui a porté si haut l'urgence écologique, rester aussi timide en matière d'éco-conditionnalité des aides allouées aux grandes entreprises, voire absolument inactif quand il s'agit d'inciter les grosses fortunes à participer à l'effort national, le temps de la reconstruction de notre économie.

Nous avons donc mis des propositions sur la table : assimiler aux biens inclus dans l'actuelle assiette de l'IFI – impôt sur la fortune immobilière –, les liquidités et contrats d'assurance vie non investis en unité de compte, c'est-à-dire en actions d'entreprises ; réguler le régime mère-filles, source particulière de l'érosion des bases imposables en matière d'IS pour les groupes disposant de filiales hors de l'Union européenne ; moduler le mécanisme de la taxe sur les excédents de provision des entreprises d'assurance de dommages ; moduler la niche Copé, afin d'éviter l'accroissement de son coût ; relever la part fiscale du PFU – prélèvement forfaitaire unique – de trois points pour les dividendes et les cessions de valeur mobilière, donc pour les revenus du capital ; augmenter la contribution exceptionnelle des très hauts revenus ; établir un suivi enfin exigeant, avec des contreparties écologiques clairement définies, pour l'ensemble des dispositifs d'aide et de subvention instaurés par l'État. Avec ces quelques mesures, saisissons l'occasion de réorienter les aides et de verdir notre action politique et financière. Le collectif Écologie démocratie solidarité propose de faire plus et mieux : j'ose espérer que nos débats vous convaincront de suivre cette orientation.

S'agissant de la dette, on ne peut se contenter d'engager l'État à des niveaux record, sans intervenir sur l'optimisation fiscale, disproportionnée. Les possibilités d'échapper à l'IS sont encore bien trop nombreuses pour certaines grandes entreprises, mais aussi pour des secteurs qui ont bénéficié mécaniquement de la crise, comme la finance et, plus spécifiquement, l'assurance. À ce titre, le dispositif de carry back, déplafonné dans ce projet de loi, me paraît assez inquiétant : il nous faudra revenir sur son chiffrage. Par ailleurs, on ne peut laisser filer la fiscalité des plus aisés : c'est un enjeu de justice fiscale et sociale. Certes, l'accord du G7 est un premier pas.

Nos amendements répondent à un besoin d'équité, sans nuire à la compétitivité, contrairement à ce qu'affirme le rapporteur général, au cours de ses différentes prises de position publique.

Par ailleurs, comme l'année 2020, l'année 2021 sera une année noire pour les jeunes, si nous n'étendons pas exceptionnellement de nombreux droits en leur faveur. Je souhaite que, dès le présent PLFR, des mesures structurelles beaucoup plus fortes soient élaborées d'urgence pour les soutenir, en particulier quand ils sont en situation de précarité. Nos amendements visent, par ailleurs, à réduire les niches dont seuls les très grands groupes, et non les PME, bénéficient et qui entraînent un effet de distorsion, renforçant la concurrence déloyale, au détriment des entreprises qui créent de l'emploi en France. Certaines propositions de la Convention citoyenne pour le climat mériteraient d'ailleurs d'être reprises. J'ai donc déposé de nouveau un amendement appelant les grandes entreprises à réaliser un bilan carbone complet si elles souhaitent être soutenues par l'État.

Vous comprendrez que je sois favorable aux mesures du présent projet de loi de finances rectificative pour 2021, tout en souhaitant l'enrichir de mesures massives de justice sociale, conformément aux propositions que je soutiens depuis des mois, ainsi que de mesures de recettes, afin que chacun contribue à l'effort national à hauteur de ses capacités. S'il est vrai que l'investissement de l'État a permis de soulager un grand nombre d'entreprises durant cette crise économique, grâce au chômage partiel et aux prêts garantis par l'État, des lacunes persistent. Je suis au regret de vous dire que le déploiement et l'efficacité des aides, durant cette pandémie, à destination de la jeunesse et des plus vulnérables doivent être étudiés de nouveau. Et quel cynisme ! Ceux qui refusent ces aides au plan national se réservent des annonces pour leur campagne aux élections régionales.

Alors que les discours deviennent de plus en plus violents, il est urgent que le Gouvernement écoute les propositions de l'opposition, afin d'apaiser une société dépitée, qui attend un gouvernement portant un vrai projet de progrès social.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Cette législature étant désormais achevée, les commentaires sont désactivés.
Vous pouvez commenter les travaux des nouveaux députés sur le NosDéputés.fr de la législature en cours.