La pandémie s'est propagée dans le monde dès la fin de 2019, montrant la fragilité de l'humanité face aux virus qui l'attaquent régulièrement : je ne vais pas revenir sur l'histoire des pandémies, l'actualité mondiale nous rappelle à ses souvenirs et aux moyens contraignants mais nécessaires à notre protection. Le risque de propagation des zoonoses est bien réel, comme l'atteste la grippe aviaire. Nous surveillons les mutations virales pour éviter les propagations de l'animal à l'homme, mais la pandémie virale est un risque bien réel pour l'humanité.
Je veux avoir une pensée pour les 110 000 morts français du covid-19 : il ne s'agit pas d'un chiffre mais de personnes qui avaient une famille et des amis ; ce sont autant de deuils, parfois très difficiles, que nous devons garder en mémoire. Je veux aussi redire, au nom de mon groupe mais certainement de toute l'Assemblée, notre reconnaissance aux personnels médicaux et paramédicaux, hospitaliers ou de ville. Leur exemplaire abnégation mérite le respect, ce qui veut aussi dire que nous devrons mieux prendre en compte à l'avenir les difficultés auxquelles ils sont confrontés.
Sur ce point, le premier bilan que nous devrons tirer porte sur la question de l'adéquation de l'offre de soins à l'évolution de la santé des Français. Un an de pandémie a modifié nos comportements et contribué à l'émergence de pathologies psychiatriques que nous devons comprendre et guérir. Dans les écoles, nous connaissons tous les exercices contre les incendies : les enfants et les équipes de la vie scolaire sont désormais confrontés à des exercices contre le terrorisme et ont appris depuis un an le port constant du masque et les gestes barrières. Nous savons que de telles expériences laisseront des traces durables. Depuis mars 2020, Santé publique France mène une étude sur 2 000 personnes destinée à évaluer les conséquences psychologiques, notamment sur les troubles du sommeil et les symptômes dépressifs qui touchent un tiers des personnes interrogées dans l'enquête « CoviPrev 21 ».
Nous mettons en place un dispositif de prise en charge intégrale pour les enfants âgés de 3 à 17 ans et le chèque Santé psy étudiant est disponible depuis le 1er février : voilà du concret ! Il nous faut cependant former davantage de psychiatres et de psychologues pour l'avenir.
Je veux insister sur le besoin de moyens auprès du ministre de l'éducation nationale et de la ministre de l'enseignement supérieur pour les jeunes et les équipes qui les accompagnent quotidiennement. Nous devons renforcer la médecine psychiatrique préventive dans les établissements : il faut le faire en lien étroit avec les régions, les départements et les communes pour répondre aux besoins dans les territoires.
L'autre défi auquel nous sommes confrontés est celui du retour aux soins et à la prévention des maladies. Durant cette période, nous avons enregistré un recul massif du recours aux soins pour différentes raisons, tenant des difficultés d'accès à la peur de la propagation du virus. Nous savons que le renoncement aux soins est une réalité quotidienne : notre système de couverture sociale n'empêche pas 25 % des Français de renoncer aux soins en temps normal ; avec la pandémie, 39 % des personnes interrogées par l'assurance maladie ne sont pas allées chez le généraliste.
Le Gouvernement a incité au maintien des soins d'urgence et du suivi des grossesses, des maladies chroniques et des enfants. Il a encouragé le nécessaire développement de la téléconsultation, qui peut et doit prendre encore plus d'ampleur. La télémédecine n'a pas été suffisante, particulièrement pour les populations précaires que nous devons continuer d'accompagner, quelles que soient leurs origines : il y va de la santé publique. Sur ce point, l'accès aux instruments du numérique est essentiel, mais il faudra aussi améliorer les connexions, notamment dans le monde rural.
Les soins dentaires et ophtalmiques ont même reculé de 90 % lors de la première vague : cette situation a conduit au non-recours aux soins d'urgence vitale. La Fédération hospitalière de France (FHF) a mis l'accent sur la surmortalité pour cause de crise cardiaque non prise en charge à temps. La prévention du cancer a été également touchée de plein fouet : l'Institut national du cancer (INCa) montre qu'entre mars et juillet 2020, 32 000 opérations programmées n'ont pas été réalisées. Avec le recul des visites chez le généraliste, c'est toute la politique de prévention et de soin qui a été touchée, et nous devons malheureusement nous attendre à une surmortalité de l'ordre de 5 à 7 % dans les cinq prochaines années, avant que le système ne retrouve sa pleine capacité de fonctionnement.
Le redémarrage que nous connaissons ne doit pas nous faire oublier ce qui s'est passé et se passe encore chaque jour à cause de la covid-19. L'apparition du covid long va nous obliger à traiter une multitude de patients pour des états de fatigue et de fragilité supplémentaires. Nous n'avons d'ailleurs pas attendu la fin de la crise : lors de la dernière loi de financement de la sécurité sociale, nous avons tiré les leçons de cette épreuve en investissant massivement dans le système de santé ; nous poursuivrons nos efforts dans le prochain PLFSS en nous appuyant sur les premiers bilans de l'impact de la crise sur la santé et l'espérance de vie des Français.