Je commencerai par la garantie jeunes, dont nous avons discuté lors d'une précédente commission d'évaluation des politiques publiques. Ce dispositif a été créé et expérimenté sous le précédent quinquennat pour accompagner vers l'emploi les 16-25 ans sans emploi ni formation, sans même un projet de vie parfois. L'indicateur 3.4 du programme 102 Accès et retour à l'emploi montre que le taux de sortie positive vers l'emploi et l'autonomie des jeunes ayant bénéficié de la garantie est passé de 76 % en 2019 à 35,4 % en 2020, soit une baisse de 40,6 points, ce qui est énorme. Et ce n'est pas la faute de la crise car les prévisions contenues dans le budget annuel de performance du PLF pour 2020 fixaient une cible à 39,5 %, soit un taux à peine supérieur.
Vos précédentes réponses ne me convenant pas, je vous interroge à nouveau sur cet effondrement du taux de sortie vers l'emploi ou l'alternance. Comment l'expliquez-vous ? Que comptez-vous faire pour y remédier, avant d'annoncer l'universalisation prochaine de ce dispositif ? Je vous remercie d'avance pour le caractère concret et précis de votre réponse, qui ira, je n'en doute pas, au-delà de l'autopromotion de votre dispositif « 1 jeune, 1 solution ».
La garantie jeunes prend une résonance particulière face au sort que subit notre jeunesse. Je pense que nous pourrons convenir au moins d'une chose : la précarisation accrue des étudiants du fait de la crise du covid-19 est inacceptable et les images des files d'attente devant les distributions alimentaires nous bouleversent. En réponse à cette situation insupportable, diverses mesures de soutien ont été prises depuis un an et les aides spécifiques sont passées de 22,7 millions d'euros pour 45 000 bénéficiaires en 2019 à 33,8 millions pour 62 000 bénéficiaires en 2020.
Toutefois, sur le terrain, la réalité est tout autre. En l'absence d'informations sur ce dispositif, le taux de non-recours est particulièrement élevé. Pour désigner les aides à la jeunesse, l'expression consacrée reste le millfeuille de dispositifs, du fait tant de leur nombre que de la diversité des opérateurs – centres régionaux des œuvres universitaires et scolaires (CROUS), universités, régions, villes. Faute de savoir ce à quoi ils ont droit et à qui s'adresser pour obtenir des aides, nos jeunes y renoncent. Et nous ne parlons même pas des freins psychologiques et de la lourdeur des démarches administratives.
Comment améliorer le recours aux aides étudiantes ? Que pensez-vous d'un guichet unique, qui pourrait être l'université, proposant automatiquement à l'étudiant, au moment de son inscription, des informations sur l'ensemble des aides auxquelles il a droit ? Je vous invite une fois encore à me donner une réponse sincère, concrète et précise.
J'irai même plus loin en me risquant à vous faire une proposition qui rejoint les deux sujets que j'ai déjà évoqués : pourquoi ne pas instaurer pour les jeunes un droit opposable à l'emploi et à la formation ? Si nous ne sommes pas en mesure le leur offrir, malgré tout ce qui peut être fait, alors nous nous devons de leur proposer, au moins temporairement, un soutien d'urgence pour leur permettre de s'en sortir face à la crise. Je persiste et signe : les repas à 1 euro et le dispositif « 1 jeune, 1 solution » ne suffisent pas.
Nous vous avons proposé maintes fois d'ouvrir aux 18-25 ans le revenu de solidarité active (RSA), temporairement ou non, avec ou sans conditions. Aujourd'hui, monsieur le rapporteur général, vous l'appelez « revenu d'urgence » pour la campagne des régionales, ce qui est un peu la même chose. Aujourd'hui, monsieur le ministre, vous rendez plus lâches les conditions de la garantie jeunes et le journal Le Monde laisse entendre que le Président de la République réfléchirait à un RSA jeune. Mais pendant que vous tergiversiez, refusant comme toujours de reconnaître que vos oppositions peuvent avoir raison et vous faire des propositions pertinentes, nos jeunes faisaient la queue devant les banques alimentaires. Ils n'ont pas le temps pour ces enfantillages.
Ce qui me dérange plus encore, c'est qu'aucune de vos annonces des derniers mois – qu'il s'agisse de la garantie jeunes, des primes pour les professeurs, du plan psychiatrie, du plan montagne ou encore des millions d'euros manquants au budget alloué à la ligne téléphonique 3919 censée répondre à 100 % des appels – et non à 60 % –, ne soit inscrite dans le projet de loi de finances rectificative. Pouvez-vous nous préciser, monsieur le ministre, où sont budgétées ces annonces et quand, renonçant enfin à vous contenter d'actions temporaires, vous instaurerez ces mesures durables visant à soutenir celles et ceux qui en ont le plus besoin ?
Nous serions presque portés à croire que vous ne souhaitez pas que les Français s'aperçoivent que la plupart des annonces intervenues durant ces derniers mois, en pleine campagne électorale, ne prendront pas forme au Parlement. Vous les gardez bien entendu pour le projet de loi de finances qui sera examiné en novembre 2021. Ces manières de faire sont malheureuses : les publics pour lesquels nous vous avons interpellés à de multiples reprises dans le passé ont besoin de ces aides dès maintenant et non dans un an. Votre opportunisme qui consiste à attendre le budget de 2022, lequel interviendra pendant la campagne présidentielle, est irresponsable.
Si j'ai beaucoup parlé de la jeunesse, qui tient à cœur aux membres du groupe Socialistes et apparentés, je vais également aborder un sujet qui me touche : celui de l'allocation aux adultes handicapés, qui a fait l'objet de ma question au Gouvernement cet après-midi. Cette allocation, nous le savons tous, ne permet pas aux bénéficiaires d'être autonomes financièrement et les rend dépendants de leur vie de couple : cette injustice, indigne de l'idéal de justice sociale que nous défendons, doit être corrigée.