Nous avons été confrontés à l'une des plus grandes récessions survenues depuis 1945. Le plan de relance est intervenu il y a six mois, dans un contexte d'urgence où l'économie française faisait face à de très grandes incertitudes – et nos craintes se sont hélas révélées justifiées. Ce plan exceptionnel de 100 milliards d'euros s'inscrit dans la continuité des 470 milliards déjà mobilisés depuis mars 2020 pour financer les mesures d'urgence destinées aux entreprises et aux salariés affectés par la crise sanitaire du covid-19. Nous devons donc veiller à ce que sa mise en œuvre soit rapide ; nous souhaitons que ce plan soit un outil d'accompagnement structurellement efficace, en adéquation avec ses objectifs.
Aussi, je veux partager avec vous, monsieur le ministre de l'économie, des finances et de la relance, les questions que de nombreux Français se posent aujourd'hui, à commencer par celle-ci : où en est-on ? La Banque de France a relevé, lundi 14 juin, sa prévision de croissance pour l'économie française cette année à 5,75 % ; le gouverneur parie sur un fort rebond aux troisième et quatrième trimestres, estimant qu'elle aura même retrouvé son niveau d'avant-crise plus tôt que prévu, dès le début 2022. Nous nous féliciterions évidemment de ce rebond de notre économie après un violent passage à vide en 2020.
Le groupe UDI-I a approuvé les dispositifs de soutien à notre économie et à nos entreprises. L'enjeu est maintenant de garantir que tous les crédits prévus dans ce plan de relance auront bien un impact sur l'accélération de la croissance potentielle. Pour cela, il faut surtout que le plan se déploie le plus rapidement possible dans nos territoires. Or aujourd'hui, qu'en est-il sur le terrain ? On observe que nos concitoyens n'arrivent pas à s'y retrouver face à la complexité administrative ; il y a un réel défaut de pédagogie et de simplicité de la part notre administration face au foisonnement de types d'aides et au nombre de guichets. On doit bien reconnaître que la mise en œuvre concrète du plan de relance semble quelque peu ardue.
Ainsi, vous comptez déployer 70 milliards d'euros d'ici à la fin de l'année sur les 100 milliards annoncés jusqu'en 2022 pour impulser la transition écologique, la compétitivité, la reconquête industrielle et la cohésion des territoires. Nous approuvons bien sûr ces orientations, mais rappelons qu'à ce stade, seuls 30 milliards d'euros ont été engagés, dont 20 milliards seulement décaissés. Pourtant, grâce à l'Union européenne, la France va recevoir en juillet son premier acompte de 5,2 milliards sur les 40 milliards qui lui reviennent dans le cadre du plan de relance européen. Notons que celui-ci permet une coordination continentale, avec des orientations partagées qui favoriseront demain un modèle économique plus écologique et plus résilient afin d'éviter de prochaines crises.
La feuille de route pour la refondation économique, sociale et écologique du pays que vous présentez, monsieur le ministre, montre malheureusement quelques limites sur le terrain.
La multiplication des guichets, j'en parlais à l'instant, et les appels à projets tous azimuts sont la première grande difficulté à régler, sachant que nombre de PME ou de petites communes n'ont pas la ressource humaine pour y répondre. Les entreprises croulent sous les procédures administratives, elles ne connaissent pas les circuits, elles n'en ont pas l'habitude. Il faut donc, monsieur le ministre, que les sous-préfets chargés de la relance déployés dans chaque département fassent un réel effort de simplification et de pédagogie.
Je pense, par exemple, au fonds de transformation des friches industrielles, dont la partie « dépollution » est administrée par l'Agence de la transition écologique, l'ADEME, alors que le volet consacré à l'aménagement et à la revitalisation des cœurs de ville est piloté par les préfets de région. Le parcours des utilisateurs de ces appels à projets est parfois un cauchemar ; ils nous le disent : ils s'y perdent, ce qui nuit à la relance que nous souhaitons tous.
En revanche, je tiens à saluer le succès des appels à projets Résilience industrie et Industrie du futur, sachant qu'ils sont, eux, pilotés par un acteur unique, ce qui est gage d'efficacité : Bpifrance. De nombreux projets ont ainsi été financés de manière rapide, ce qui est un réel facteur de succès pour nos jeunes entrepreneurs et pour notre tissu économique. Les 105 nouveaux projets sélectionnés, suite aux appels à projets Résilience industrie, représentent aujourd'hui un potentiel de 6 700 créations d'emplois, ce dont nous nous félicitons.
Enfin, je tiens à insister sur le fait qu'il ne peut y avoir de relance sans emploi. Aussi, nous souhaiterions que le Gouvernement indique au Parlement, afin qu'on puisse savoir où va l'argent public accordé aux entreprises, quelle est la part consacrée à la sauvegarde d'emplois existants et celle à la création de nouveaux emplois, notamment dans les secteurs du numérique et de la transition écologique.
Vous nous parlez d'un deuxième temps du plan de relance, mais nous aurions souhaité qu'au lieu de se concentrer sur une relance de l'existant, voire de s'en contenter, ce plan soit davantage encore orienté vers la transformation de notre économie pour une transition plus économe en ressources naturelles, mieux répartie dans les territoires, aidant à rattraper notre retard numérique et, surtout, favorisant la relocalisation industrielle dans les domaines stratégiques qui conditionnent notre indépendance.