Intervention de Alain Bruneel

Séance en hémicycle du jeudi 17 juin 2021 à 21h30
Mesures d'urgence en faveur des intermittents de l'emploi — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaAlain Bruneel :

Depuis plusieurs années, des libéraux, comme vous, tentent d'imposer leur modèle de flexisécurité. Être moderne, ce serait accepter un travail flexible en contrepartie d'une hypothétique sécurisation du parcours de vie. Dans le cas présent, ces salariés doivent assumer la flexibilité mais sans aucun filet de sécurité.

Voici un cri d'alerte que vous avez peut-être reçu : « Monsieur le député, pas moins de 2 millions de personnes ont été oubliées des plans de relance. La situation de ces salariés s'est détériorée – divorces, expulsions, suicides – sous le triste quotidien des oubliés du quoi qu'il en coûte. Cette proposition de loi est vitale. Nous vous demandons de la soutenir et de convaincre vos collègues et de la voter. Comme l'a déclaré Jeanne Balibar lors de la cérémonie des Césars, il y a non-assistance à personne en danger. »

Mes chers collègues, ce message, envoyé par le collectif des précaires de l'hôtellerie, de la restauration et de l'événementiel, vous l'avez tous vu dans votre boîte de réception. Il illustre la très forte attente de ces salariés en emploi discontinu. La plupart d'entre eux sont aujourd'hui en fin de droits en raison des périodes de confinement et des restrictions sanitaires imposées à leur secteur d'activité. Ils se sentent oubliés par l'État, car si les salariés en emploi stable ont bénéficié de mesures de soutien, notamment du chômage partiel, la plupart de ceux en emploi discontinu n'ont eu aucune mesure d'accompagnement.

Avec ce texte, nous vous proposons de répondre à cette détresse financière, sociale et psychologique vécue par les intermittents de l'emploi. Pour ce faire, nous avons un double objectif : d'une part, instaurer de manière pérenne des droits relevés en matière d'assurance chômage ; d'autre part, bien entendu, répondre à l'urgence par des mesures de solidarité concrètes et de soutien financier immédiat. Nous proposons donc de compenser les pertes exceptionnellement engendrées par la crise sanitaire et par l'arrêt subit des activités de ces salariés.

Comment pourrait-on tourner le dos à cette souffrance, à ces cris d'alerte, alors que 100 % des grandes entreprises du CAC40, qui annoncent des dividendes records, ont touché des aides publiques ? En pleine pandémie, les actionnaires toucheront 22 % de rémunération en plus et empocheront la coquette somme de 51 milliards. Après avoir dévoré le pactole du plan de relance, ils ne rendront rien ; tel est le miracle des aides données sans aucune contrepartie. La solidarité ne peut être réservée aux plus riches !

L'autre grande injustice que nous vous proposons de lever, c'est celle qui concerne l'assurance chômage. Votre réforme, imposée de manière dogmatique et sans tenir compte des réalités vécues par les privés d'emploi, doit entrer en vigueur au 1er juillet. Nous vous offrons la possibilité de faire machine arrière, afin de ne pas venir sanctionner des salariés déjà en grande difficulté.

Voici la question que des intermittents de l'emploi m'ont posée : comment se réjouir de voir la ministre du travail, de l'emploi et de l'insertion défendre sa réforme de l'assurance chômage alors qu'elle massacrera, lorsqu'ils reprendront leur activité, ceux-là mêmes qui n'ont déjà plus rien ? Le mot « massacrer » est cru mais il est à la hauteur de la colère et de l'attaque que subiront les 1,2 million de personnes qui verront leur allocation baisser dès la première année, selon les projections réalisées par l'UNEDIC.

Du reste, les premières victimes du changement de calcul du salaire journalier de référence seront bien les intermittents de l'emploi. Pour eux, ce sera la double peine : déjà victimes d'une crise économique violente et d'un statut de travailleur précaire, ils seront également punis par une réduction de leurs droits au chômage. Non seulement le montant journalier baissera, mais le nombre de jours indemnisés également.

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