Intervention de Émilie Guerel

Séance en hémicycle du lundi 21 juin 2021 à 16h00
Article 1er de la constitution et préservation de l'environnement — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaÉmilie Guerel :

Depuis l'adoption de la Charte de l'environnement en 2004, la multiplication et l'intensification des phénomènes climatiques, l'accélération de la désertification et de la montée du niveau des mers et des océans, le développement des catastrophes naturelles et la disparition d'un nombre croissant d'espèces végétales et animales changent la donne et appellent une réponse forte. Celle-ci repose, notamment, sur l'inscription, après un processus démocratique inédit, de la préservation de l'environnement, de la protection de la diversité biologique et de la lutte contre le dérèglement climatique dans notre loi fondamentale.

Si cette réforme prolonge les révisions constitutionnelles de 2005 et de 2008 relatives à l'environnement, elle suit une procédure novatrice et unique. En effet, le grand débat national a mis en évidence la double demande des Français pour davantage de démocratie participative et pour une transition écologique plus juste. Afin de répondre à ces attentes, le Président de la République a choisi de lancer une Convention citoyenne pour le climat, premier exercice de cet ordre par son ampleur et par celle du champ traité. Dans un exercice de démocratie délibérative inédit, 150 citoyennes et citoyens tirés au sort, venus de tous les territoires et de tous les milieux, représentatifs de la richesse de la diversité française, ont travaillé durant neuf mois et rencontré des dizaines d'experts afin de proposer des mesures concrètes pour relever le défi climatique en matière de transition écologique et pour accélérer la lutte contre le changement climatique.

En première lecture, nous avions consacré la préservation de l'environnement et, en son sein, la protection de la diversité biologique et la lutte contre le dérèglement climatique, comme un principe constitutionnel plein et entier. Nous entendons aller encore plus loin que les textes et la jurisprudence actuels en faisant de la préservation de l'environnement non plus seulement un objectif à valeur constitutionnelle, mais bel et bien un principe à valeur constitutionnelle. En effet, un objectif à valeur constitutionnelle ne comporte qu'une obligation de moyens et nécessite, pour être atteint, l'intervention du législateur, là où la règle constitutionnelle a un caractère impératif. Cette élévation normative permettra de mieux concilier la protection de l'environnement avec d'autres principes constitutionnels. Il est donc nécessaire que l'enjeu environnemental figure au premier rang de notre texte fondamental, au cœur des autres principes constitutionnellement garantis, placés au sommet de l'ordre juridique français.

Comme l'a rappelé à l'instant M. le rapporteur, afin que la préoccupation environnementale innerve chaque politique publique, nous souhaitons maintenir le verbe « garantir », qui fait la force juridique du texte. Les conséquences de l'emploi de ce verbe ne sont pas neutres, et telle est notre volonté. Tout d'abord, il introduit un principe d'action positive pour les pouvoirs publics locaux et nationaux, en instituant un droit constitutionnel à l'environnement. Ensuite, il leur impose une quasi-obligation de résultat pour la préservation de l'environnement, laquelle s'inscrit dans la dynamique jurisprudentielle contemporaine, ainsi qu'une quasi-obligation de moyens, pour les inciter à lutter contre le dérèglement climatique de manière efficace. En créant cette garantie à la charge des pouvoirs publics, nous complétons utilement l'article 2 de la Charte de l'environnement, qui dispose que « toute personne a le devoir de prendre part à la préservation et à l'amélioration de l'environnement ».

Vous l'aurez compris, le maintien du verbe « garantir » dans cet article est essentiel, car notre objectif est de disposer d'un texte ambitieux, à la hauteur des défis écologique et démocratique du XXIe siècle. En adoptant ce texte, nous ferons de la France le premier État européen, et l'un des premiers pays au monde, à inscrire la lutte contre le dérèglement climatique dans sa loi fondamentale, ce qui démontrera notre volonté de poursuivre notre action, notamment internationale, contre le changement climatique. Il s'agit d'une avancée fondamentale et déterminante.

En première lecture, nous avions défendu le texte voulu par la Convention citoyenne pour le climat ; en commission des lois, lors de l'examen du texte en deuxième lecture, nous avons fait le choix de réaffirmer cette ambition, mais aussi de tenir compte de la volonté du Sénat afin d'avancer vers le référendum, en substituant au verbe « lutter » le verbe « agir ». Le Conseil d'État l'avait d'ailleurs recommandé, dans un avis rendu le 14 janvier 2021.

Depuis 2017, notre activité législative a démontré que la question environnementale était une priorité du Président de la République et de la majorité. Nous avons accéléré la transition écologique avec l'adoption de mesures concrètes et pragmatiques, comme l'engagement vers une sortie des énergies fossiles pour atteindre la neutralité carbone, l'inscription dans la loi de la diminution de 40 % des émissions de gaz à effet de serre d'ici à dix ans, la fermeture des centrales à charbon d'ici à 2022, la création d'un Haut Conseil pour le climat ou encore la création de l'Office français de la biodiversité.

Aujourd'hui, nous avons la possibilité et la responsabilité collective de réaliser cette ambition – en accélérant la lutte contre le dérèglement climatique, en renforçant la protection de la diversité biologique et en matérialisant l'engagement de la France à se mobiliser pour l'environnement –, mais aussi de faire vivre notre démocratie. Pour toutes ces raisons, je vous invite à voter pour ce texte ambitieux et fondamental.

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