Il y a peu de temps, j'ai rencontré un cadre de l'industrie sucrière, un lobbyiste, qui me dressait le tableau suivant : dans les années 2000, on a fait entrer le sucre, et donc la betterave, dans la mondialisation, avec la disparition des taxes douanières. C'était négocié avec l'Organisation mondiale du commerce (OMC). Dans le même temps, l'Union européenne publiait étude sur étude pour démontrer que la libéralisation était la solution. Les quotas ont sauté, ce qui a conduit à une surproduction et à un effondrement des cours. Maintenant, en gros, c'est le Brésil qui fixe les prix au niveau mondial et, de fait, le cours de la betterave a plongé : il a été divisé par deux en deux ans.
L'an dernier, quatre sucreries ont fermé : celle d'Abbeville, chez moi dans la Somme, mais aussi celles de Toury, Bourdon et Cagny. Or la seule réponse de l'Europe et du Gouvernement à la crise et à la dérégulation économique consiste à y ajouter la dérégulation chimique avec le retour des néonicotinoïdes. Pour cause de concurrence et de compétitivité, justifie-t-on. C'est à peu près la même histoire pour les céréales, la viande et le lait.
Face à ce fléau mondial et global, que proposez-vous depuis deux ans avec la loi EGALIM 1 ? Du bricolage, une usine à gaz législative à base de contrats et d'accords-cadres, d'indicateurs de prix et de médiation. Sans surprise, ces sparadraps ne tiennent pas. Comme c'est un fiasco, que proposez-vous aujourd'hui avec cette proposition de loi « EGALIM 1,5», comme l'a appelé mon collègue Dominique Potier ? Vous rebricolez sur le bricolage – avec une petite amélioration, puisque vous parlez maintenant, timidement, de rapports de forces et de contraintes –, vous recolmatez le colmatage ! Pourquoi ? Parce que vous tournez autour du pot de la mondialisation. Parce que vous n'osez pas attraper le taureau du libre-échange par les cornes.
Vous allez me demander ce que, moi, je propose. Or vous savez ce que je propose depuis quatre ans maintenant…