Despotisme démocratique : c'est le danger contre lequel Alexis de Tocqueville alertait les sociétés qui se battaient pour l'égalité des conditions. Ces mots étaient simples. On dirait que chaque pas que les nations démocratiques d'Europe font vers l'égalité les rapproche du despotisme. Partout, l'État arrive de plus en plus à diriger par lui-même les moindres citoyens et à conduire seuls chacun d'eux dans les moindres affaires.
Deux cents ans plus tard, nous y sommes. Pour assurer l'égalité de tous devant la loi, vous organisez la privation de libertés et de nombreux droits : liberté d'instruire en famille quasi sacrifiée pour 0,02 % d'élèves susceptibles d'être affectés par un discours séparatiste, liberté d'expression, avec le retour masqué de la loi Avia pourtant largement censurée par le Conseil constitutionnel, et naturellement liberté de culte que vous contraignez en faisant passer les associations cultuelles régies par la loi de 1905 d'un régime de déclaration à un régime d'autorisation.
Autant le dire tout de suite, vous faites fausse route. Pour régler la question du séparatisme, la solution est non dans la restriction des libertés mais bien dans l'affirmation de notre identité. Pour rendre ces restrictions plus acceptables, vous les présentez, et on peut aisément le comprendre, comme les rançons concédées à un mal qui nous frappe : le séparatisme islamiste. C'est du moins ce que nous avions espéré lorsque Emmanuel Macron avait, en octobre dernier, prononcé ces mots : « le problème, c'est le séparatisme islamiste, ce projet conscient qui se traduit souvent par la constitution d'une contre-société. »
La désillusion n'a hélas pas tardé : les islamistes, ennemis parfaitement identifiés dans le livre du ministre de l'intérieur, sont largement absents de votre projet de loi : dommage.
Ce n'est pourtant pas faute de vous avoir alertés par tous les moyens, y compris en déposant 125 amendements que je ne pourrai pas défendre, une fois encore, une fois de plus, en raison du temps législatif programmé par votre seule volonté. La situation est cocasse : au moment de parler de la défense des valeurs de la République, ce sont les parlementaires que vous muselez !
Face à cette menace, une réponse forte était pourtant requise, sans faux-semblants ni discours feutrés, car, vous le savez, les islamistes n'ont nullement l'intention de se contenter de régner en maîtres dans tel ou tel quartier : c'est l'ensemble de notre pays qu'ils veulent conquérir.
Il aurait fallu, comme je l'ai défendu dans une proposition de loi déposée en février dernier, écrire dans la loi qu'en France on ne porte pas le voile dans l'espace public, parce que chez nous, les femmes comme les fillettes sont libres. Il aurait fallu affirmer qu'en France, le sport n'est pas affaire de religion et qu'en cas contraire, les subventions sont supprimées. Il aurait aussi fallu écrire noir sur blanc que les imams doivent prêcher en français et que, s'ils s'y refusent, ils devront au moins payer une amende ou quitter notre pays. Il aurait fallu se donner les moyens de lutter contre les bars communautaires en créant une nouvelle licence pour mieux les contrôler. Il aurait fallu se donner les moyens de lutter réellement contre la polygamie en supprimant les allocations d'une mère qui se dit célibataire, alors qu'elle est mariée religieusement à un homme déjà marié à une autre femme.