La discussion que nous avons ce soir avait déjà eu lieu en 1905. Au député Chabert, qui voulait interdire la soutane, Aristide Briand avait répondu que l'interdiction des signes religieux exposerait à deux risques : l'intolérance et le ridicule. Il expliquait en effet que l'ingéniosité combinée des tailleurs et des hommes d'Église aurait tôt fait, sitôt qu'un vêtement religieux serait interdit, d'en concevoir un autre, qu'il faudrait à son tour interdire…
Il me semble que les positions sont claires. Cependant, Mme Genevard, pour le plaisir de l'échange, je réitère ma question, à laquelle vous n'avez pas répondu – peut-être ne le ferez-vous pas davantage quand je l'aurai répétée. Si votre amendement est adopté, un citoyen portant une kippa pourra-t-il aller chercher un courrier dans un bureau de poste ? Manifestement non, mais j'aimerais que vous le disiez clairement !
Je trouve en effet que les membres de votre groupe sont parfois bien silencieux : vous trouvez toujours les mots pour désigner l'une des convictions spirituelles de notre pays mais lorsque vos propositions ont des conséquences sur une autre de ces convictions, vous ne savez plus quoi dire, comme si vous étiez gênés ! J'espère que vous ne cédez à aucun clientélisme et que vous êtes parfaitement républicains. J'aurais apprécié que vous assumiez de dire que le port de la kippa est désormais interdit dans les bus et les métros et que les citoyens de confession juive ne pourront plus aller au bureau de poste avec une kippa. Je ne sais pas si la République aura progressé, mais l'intolérance et une forme d'autoritarisme, sans doute. Vous voyez bien, quoi qu'il en soit, combien vos amendements de circonstance n'ont vraiment rien à voir avec la loi de 1905.