Intervention de Charles de Courson

Séance en hémicycle du lundi 11 octobre 2021 à 16h00
Projet de loi de finances pour 2022 — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaCharles de Courson :

Monsieur le ministre délégué, vous disposez déjà de prévisions raisonnables au regard des deux décisions suivantes : un plan d'investissement de 30 milliards d'euros jusqu'en 2030, dont le détail sera dévoilé demain matin par le Président de la République et qui s'élèverait à 4 milliards d'euros pour 2022, d'après le journal Le Monde ; et un revenu d'engagement pour les jeunes estimé à quelque 2 milliards d'euros en année pleine – 500 euros par mois pour 300 000 jeunes.

Les décisions gouvernementales relatives au prix de l'électricité et du gaz vont entraîner des pertes fiscales et des demandes de compensation des entreprises concernées. Pour quel montant, monsieur le ministre délégué ?

Il y a deux semaines, lors de notre débat sur La Chaîne parlementaire (LCP), le rapporteur général a reconnu lui-même que les dépenses non budgétées se situaient entre 5 et 6 milliards d'euros. Pour la première fois, le Haut Conseil des finances publiques s'est déclaré incapable de se prononcer sur la plausibilité de la prévision de déficit pour 2022, du fait de l'absence de budgétisation de dépenses liées à des décisions présidentielles ou gouvernementales. Comme l'annonce le journal Le Monde et comme vous venez de le dire, vous allez saisir une nouvelle fois le Haut Conseil pour qu'il évalue vos amendements une fois qu'ils seront déposés. C'est très innovant…

Deuxième caractéristique : ce budget pour 2022 s'inscrit dans un contexte de dérive accélérée de nos finances publiques. Dans l'exposé sommaire de ce budget, vous prétendez avoir redressé des comptes publics en cinq ans. C'est faux ! Là encore, la sincérité n'est pas le fort de l'exécutif.

Selon vos chiffres, notre déficit structurel s'établirait à 3,17 points de PIB en 2022. En réalité, si l'on retient l'analyse du HCFP, il se situerait plutôt à 4,7 points. Ce résultat ne doit pas être comparé avec les niveaux de 2020 ou 2021, dépourvus de pertinence car non significatifs, selon vos propres déclarations. Il faut regarder le déficit structurel de 2017 : - 2,4 points de PIB. Durant votre quinquennat, le solde structurel s'est donc dégradé de 2,3 points, ce qui équivaut à un quasi-doublement. La crise liée à la pandémie de la covid-19 ne saurait dissimuler votre pilotage budgétaire défaillant.

Troisième caractéristique : si le budget pour 2022 traduit une partie des promesses du Président de la République, il n'engage aucune politique d'économies structurelles. Toutes les semaines, les dépenses s'accumulent. À chaque semaine sa nouvelle promesse : plan d'investissements à 30 milliards d'euros ; revenu d'engagement pour les jeunes à 2 milliards d'euros ; hausse de 1,5 milliard d'euros pour le budget du ministère de l'intérieur et le Beauvau de la sécurité ; 700 millions d'euros supplémentaires dans le cadre du Grenelle de l'éducation – ces deux derniers montants seraient budgétés. La liste est longue : c'est l'open bar budgétaire permanent, un vrai budget électoral !

Si nous mettons face à face, d'une part, l'ensemble des recettes de fonctionnement de l'État – 312 milliards d'euros dont 292 milliards de recettes fiscales –, et, d'autre part, nos dépenses de fonctionnement – 427 milliards d'euros –, nous avons un déficit de fonctionnement de 115 milliards d'euros. Pour équilibrer le budget de fonctionnement de l'État, il faudrait donc majorer de 40 % l'ensemble des recettes fiscales.

Quant aux dépenses d'investissement, elles sont très faibles et entièrement financées à crédit : près de 24 milliards en 2022, dont l'essentiel, 60 % – c'est-à-dire 14,5 milliards – correspond à des investissements militaires. En définitive, les investissements civils n'atteignent pas 10 milliards d'euros, soit 2,4 % des 427 milliards d'euros de dépenses de fonctionnement. Si nos communes, nos départements et nos régions étaient gérés comme ça, tout s'effondrerait !

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