Intervention de Sabine Rubin

Séance en hémicycle du lundi 11 octobre 2021 à 16h00
Projet de loi de finances pour 2022 — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaSabine Rubin :

Il est une institution culturelle bien connue des Parisiens : c'est le théâtre de la Huchette, où se joue et se rejoue, sans interruption depuis 1954, semaine après semaine, la célèbre pièce de Ionesco, La Cantatrice chauve. Alors que nous nous apprêtons à examiner le dernier PLF du quinquennat, la majorité semble, à sa manière, rendre un vibrant hommage à ce théâtre, affichant la même constance dans la programmation d'une pièce absurde.

En effet, année après année, de PLF en PLFR, malgré les critiques argumentées des oppositions, malgré les rapports alarmants d'économistes ou d'experts, malgré les mobilisations sociales et populaires, malgré la crise, votre gouvernement et sa majorité s'entêtent à poursuivre une politique budgétaire absurde parce qu'injuste et inefficace, même au strict plan économique.

Cette année encore, vous vous apprêtez ainsi à voter un budget qui mine les recettes de l'État, vous obstinant dans cette folle trajectoire de baisse de la fiscalité, digne du monde d'avant – une trajectoire qui ne profite ni aux ménages les plus modestes ni aux entreprises les plus durement touchées par la crise. Les seuls gagnants seront nos concitoyens les plus fortunés et les multinationales les plus grassement subventionnées.

Ainsi, les prélèvements obligatoires, impôts et cotisations sociales baisseront de 6 milliards d'euros, grâce à une nouvelle baisse de la taxe d'habitation et à une nouvelle diminution de l'impôt sur les sociétés, au bénéfice presque exclusif des plus riches et des plus grandes entreprises. Sur l'ensemble du quinquennat, ce sont plus de 50 milliards qui auront été soustraits au budget de la nation : autrement dit, votre politique aura réduit de 50 milliards d'euros nos marges de manœuvre financière, affaiblissant d'autant des services publics dont la crise a pourtant rappelé combien ils étaient nécessaires, même affaiblis par vos mesures successives.

S'agit-il d'épargner aux Français une insupportable pression fiscale dont pâtiraient les plus modestes ? Évidemment non – ou à la marge ! La suppression de l'ISF, sur laquelle vous ne voulez décidément pas revenir, et la création de la flat tax permettent aux 0,1 % les plus riches de voir leur revenu bondir de 25 %, ce qui coûte chaque année 5 milliards d'euros à la collectivité, tandis que la moitié des gains liés à la suppression de la taxe d'habitation seront captés par 20 % des ménages les plus riches, à en croire vos prévisions. Coût de la mesure : 8,8 milliards d'euros.

Concernant les entreprises, la baisse des impôts de production met non seulement à mal les collectivités territoriales mais profite pour les deux tiers à celles de plus de 250 salariés, situées essentiellement dans les secteurs du gaz et de l'électricité, donc polluantes, ou dans la finance. Si encore cette gabegie d'argent public n'était que le fruit passager d'une aide exceptionnelle à de grosses entreprises frappées par la crise… mais non, il s'agit de cadeaux pérennes ! Et que dire des entreprises du CAC40 qui ont engrangé d'une main 51 milliards de dividendes, et licencié de l'autre 60 000 salariés ?

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