Intervention de Agnès Firmin Le Bodo

Séance en hémicycle du jeudi 21 octobre 2021 à 9h00
Projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2022 — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaAgnès Firmin Le Bodo :

Nous entamons ce matin l'examen du dernier projet de loi de financement de la sécurité sociale de la législature. Il porte malheureusement encore les stigmates de la crise sanitaire que nous traversons depuis le mois de mars 2020. Le déficit de la sécurité sociale devrait atteindre 21,6 milliards en 2022 et se maintenir dans la durée aux alentours de 15 milliards. Ce n'est donc pas, monsieur le ministre, un texte de retour à l'équilibre.

Certes profond, le déficit social que nous sommes amenés à approuver se justifie toutefois par l'ampleur et la longévité des mécanismes d'amortissement déployés pour lutter contre les conséquences sanitaires, économiques et sociales de la crise de la covid-19. Entre 2020 et 2022, le pays aura ainsi dépensé près de 40 milliards en tests, vaccins et soutien aux établissements de santé. Dans le même temps, les recettes de la sécurité sociale se sont réduites sous l'effet du recul de l'activité. Les deux tiers du déficit de l'année 2020 sont ainsi imputables à la baisse des cotisations ; un effet ciseaux soudain et très marqué, qui traduit l'importance de l'effort contracyclique consenti par le pays pour résister au choc sanitaire.

Il y a toutefois des raisons d'espérer et de croire à la lumière au bout du tunnel. La première d'entre elles est le retour de la croissance. Le dynamisme du redémarrage de l'activité économique profite aux comptes de la sécurité sociale, qui s'améliorent nettement en 2022, avec une réduction de 13 milliards du déficit prévu par rapport à 2021. Nous déjouons ici tous les pronostics et confondons les prophètes de malheur qui prédisaient l'apocalypse. Avec une croissance de 6,3 % prévue pour 2021 – la plus forte de toute la zone euro –, nous démontrons sans ambiguïté que la stratégie du Gouvernement et de la majorité était la bonne. Parce que c'est d'abord la croissance qui permettra de recouvrer l'équilibre dans les comptes, nous avons la preuve que le « quoi qu'il en coûte » n'était pas une folie dépensière, mais bien une nécessité et la meilleure des choses à faire pour préserver l'outil économique et préparer le rebond.

La seconde raison d'espérer réside dans l'amélioration de la situation épidémique. Même si l'expérience nous invite à la plus grande prudence en matière de prévision sanitaire, nous abordons l'examen des comptes sociaux de la nation dans un contexte de repli épidémique que le succès de la campagne de vaccination permet d'appréhender avec davantage de sérénité que par le passé. Alors que le surcoût lié à la covid-19 s'élevait à 15 milliards en 2021, une provision de 5 milliards a été intégrée à l'ONDAM 2022 pour financer les dépenses exceptionnelles liées à l'épidémie. Vous l'avez dit, monsieur le ministre, en dehors des dépenses liées à la crise sanitaire, l'ONDAM continuera de progresser fortement en 2022 : plus 2,7 % hors mesures issues du Ségur de la santé.

Le projet de loi marque une rupture avec le passé. Pour la première fois, aucune économie ne sera demandée à l'hôpital public. Nous regrettons toutefois que ce moratoire ne s'applique pas au prix du médicament. Depuis plusieurs années, le secteur pharmaceutique supporte des baisses d'environ un milliard d'euros qui le fragilisent, comme la crise l'a démontré et comme mon collègue Philippe Vigier l'a fait remarquer. Si le plan de relance permet à l'industrie pharmaceutique d'investir de manière massive, un moratoire sur la baisse des prix des médicaments lui aurait peut-être permis de redevenir le leader qu'elle a été et, ainsi, de marcher sur ses deux jambes.

Parce que tout vient à point à celui qui sait attendre, le groupe Agir ensemble se réjouit de la réapparition des médicaments biosimilaires dans le PLFSS, pour la première fois depuis 2014. Ne leur sont toutefois imputés que 6 millions d'économies, alors que la Cour des comptes estime leur potentiel de réduction des dépenses de l'assurance maladie à près de 700 millions. Pourquoi ne pas aller plus vite dans ce domaine ?

Le PLFSS pour 2022 poursuit par ailleurs les engagements de revalorisation salariale des soignants et d'amélioration du système de santé pris dans le cadre du Ségur de la santé en juillet 2020. Au total, 12 milliards y seront consacrés, dont 2 milliards supplémentaires pour la montée en charge du Ségur à l'hôpital, pour les revalorisations dans le secteur médico-social issues des accords Laforcade et pour de nouvelles revalorisations destinées aux salariés les plus modestes.

Il faut le redire et les en remercier encore : durant de longs mois, c'est l'ensemble des personnels soignants qui ont été mis à rude épreuve et qui ont tenu bon en première ligne face au virus. La crise a mis en lumière la faiblesse de leur rémunération. Le Ségur a permis d'apporter une réponse immédiate pour reconnaître l'engagement de celles et ceux qui portent notre système de santé à bout de bras.

Sur ce point, permettez-moi toutefois une remarque. Veillons à ne pas créer de nouveaux « oubliés » dans le secteur médico-social. Je pense notamment aux personnels soignants des foyers de vie, qui dépendent des départements, ou aux éducateurs dans le champ du handicap. Ils se trouvent aujourd'hui exclus du fameux complément de traitement indiciaire de 183 euros nets, parce que la structure qui les emploie ne correspond pas aux critères du Ségur. Cette revalorisation différenciée est incomprise des personnels. Elle est, par ailleurs, source de difficultés à recruter pour ces établissements, qui peinent à attirer des infirmiers ou des aides-soignantes par manque d'attractivité.

Les accords Laforcade ont permis d'élargir le Ségur au champ du médico-social et ont répondu à la frustration éprouvée par bon nombre de soignants de ce secteur. Notre groupe s'en réjouit mais considère qu'il est impératif de corriger les dernières insuffisances de ces accords et de s'engager dans une trajectoire de revalorisation qui ne laisse personne sur le côté.

Le Ségur de la santé a été un succès à tout point de vue pour notre système de santé et en particulier pour l'hôpital, abandonné depuis bien trop longtemps par nos politiques publiques. Nous sommes fiers d'appartenir à une majorité qui a réalisé cet investissement historique de 9 milliards d'euros pour reconnaître et revaloriser les compétences de celles et ceux qui soignent, et de 19 milliards d'euros pour moderniser et transformer notre système de santé. Ce PLFSS en est la traduction. Il permettra d'investir 2 milliards d'euros dans les hôpitaux et les EHPAD dès 2022.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Cette législature étant désormais achevée, les commentaires sont désactivés.
Vous pouvez commenter les travaux des nouveaux députés sur le NosDéputés.fr de la législature en cours.