Les outre-mer, notamment La Réunion, connaissent un vieillissement accéléré de leurs populations. C'est l'effet inverse du baby-boom des années 1960. Ainsi, en 2020, 19 % des Réunionnais avaient plus de 60 ans, ce qui représente dix points de plus qu'il y a vingt ans. En 2050, un quart de la population aura 60 ans et plus, et le nombre de personnes âgées de plus de 75 ans sera multiplié par quatre.
Autre constat, l'entrée en dépendance dans les outre-mer est précoce, et le taux de personnes dépendantes y est trois fois plus élevé qu'en France métropolitaine. Alors que cette dépendance précoce est multifactorielle – chômage, pauvreté, alcoolisme, cherté de la vie, mal-logement – et connue de tous, le Gouvernement traîne des pieds en matière de lutte contre les exclusions.
Pourtant, vous en conviendrez, il s'agit bien là d'une problématique de santé publique. Sur la base de ce constat, des réponses sociales et professionnelles doivent y être apportées, car c'est une bombe à retardement, et les défis à relever sont immenses. Pour y faire face, dans les années à venir, nous aurons un besoin accru de professionnels spécialisés dans l'aide à la personne tels que les aides à domiciles ou les aidants familiaux.
Votre gouvernement fait montre de bien peu de considération et de reconnaissance envers ces professions, qui doivent devenir de véritables métiers de la fonction publique, avec un statut leur conférant un temps de travail réglementaire et un revenu à la hauteur de leur travail. Certaines des personnes concernées ne disposent que d'une heure par jour pour réaliser les tâches ménagères et alimentaires, tandis que d'autres doivent cumuler le nombre de bénéficiaires. Chaque jour, ces personnes se dévouent envers nos aînés et les personnes porteuses de handicaps ; chaque jour, elles prennent en charge des situations difficiles, notamment quand les bénéficiaires présentent des troubles du comportement ou un lourd handicap.
L'aide à domicile est un secteur d'avenir et un vivier d'emplois à La Réunion, du fait de l'accélération du vieillissement de la population et de la dépendance précoce des individus. Ce secteur d'activité est amené à prendre de l'importance, car les besoins sont là ; malheureusement, il est peu attractif. Vous devez améliorer les conditions de travail des professionnels concernés, car il y va de leur bien-être au travail mais aussi de la qualité de la prise en charge des publics vulnérables dont ils s'occupent.
Vous avez également oublié les infirmiers de nos hôpitaux, qui se battent depuis deux ans contre l'épidémie de covid et sauvent ainsi des vies. Cependant, par votre faute, nombre d'entre eux ont été suspendus de leurs fonctions parce qu'ils refusaient de se soumettre à l'obligation vaccinale. À La Réunion, cela a été le cas pour soixante-dix soignants et deux personnels d'EHPAD, pour lesquels vos décisions autoritaires ont eu de graves conséquences. Avez-vous un minimum de reconnaissance et de respect pour ces personnes ? Je ne le pense pas.
Comme si la situation n'était pas suffisamment déplorable, vous choisissez même de les matraquer devant leur lieu de travail, comme tout le monde a pu le voir en Martinique. Le jour où vous sortirez de votre bulle et où vous vous mettrez à la place de ces gens, peut-être les choses pourront-elles commencer à changer !
Outre le personnel médical, les hôpitaux aussi sont touchés. Pourquoi ne voulez-vous pas revaloriser le coefficient géographique de La Réunion ? Vous le savez aussi bien que moi, le coefficient en vigueur ne permet pas aux hôpitaux de faire face aux charges liées à l'éloignement, à l'insularité, aux risques naturels et aux facteurs sociaux locaux. Le coefficient géographique n'est donc plus adapté à la réalité des coûts locaux. Il ne prend pas non plus en compte, par exemple, l'acheminement des médicaments et des matériels médicaux.
La revalorisation que nous demandons est une condition nécessaire pour que les établissements de La Réunion s'installent durablement dans le paysage hospitalier français comme des pôles d'excellence. Elle permettrait au CHU – centre hospitalier universitaire – de La Réunion de disposer de moyens adaptés à la santé des familles réunionnaises, mais également de donner des perspectives plus positives aux malades, qui souffrent, et aux personnels soignants, qui subissent des conditions de travail difficiles.
La Réunion et l'outre-mer en général font partie de la France. Hier, lors de l'examen du texte relatif à la vigilance sanitaire, le ministre Véran déclarait, la main sur le cœur, être du côté des outre-mer. Il est à son aise au bal des hypocrites, un bal où l'on ne me verra pas danser ! Les outre-mer attendent toujours une politique de justice sociale et ne voient dans ce texte aucune réponse durable.