Intervention de Emmanuelle Ménard

Séance en hémicycle du jeudi 21 octobre 2021 à 9h00
Projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2022 — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaEmmanuelle Ménard :

Pas moins de 21,6 milliards : c'est le montant du déficit prévu de la sécurité sociale pour l'année 2022. Un déficit adopté sans broncher en Conseil des ministres le 7 octobre dernier et qui ne semble pas inquiéter le Gouvernement, puisqu'il s'est félicité en commission, par la voix du ministre des solidarités et de la santé, de présenter un budget de sortie de crise sanitaire. Vous affichez ce déficit comme une bonne nouvelle, dans la mesure où il baisse par rapport à ceux de 2021 et de 2020. Mais nous aimerions savoir comment vous comptez le financer.

En seulement trois exercices budgétaires, la dette sociale progresse, en effet, de près de 100 milliards d'euros ! Si certaines dépenses directement liées à la crise sanitaire devraient logiquement refluer en 2022 – principalement celles concernant les vaccins et les tests –, nous sommes en droit de nous inquiéter de la hausse des dépenses ordinaires et de la dette structurelle, encore un peu plus creusée par le Ségur.

Certes, l'exercice est difficile : comment conjuguer, à quelques mois de l'élection présidentielle, les gages à donner aux acteurs de la santé, sans pour autant tomber dans un clientélisme électoral trop voyant ?

Quel enseignement tirer de cet exercice de fildefériste ? En premier lieu, que les réformes structurelles, censées changer le fond de notre système de santé, n'y sont pas. Pourtant, après avoir été éprouvés par plus dix-huit mois de crise sanitaire, trois confinements et un système sanitaire à bout de souffle, les Français étaient en droit d'en attendre un peu plus. Et ce petit plus, ce n'est pas seulement une revalorisation des salaires même si, pour les sages-femmes notamment, le geste était nécessaire en attendant de réviser de manière urgente le statut de leur profession, ainsi que je le propose dans l'un de mes amendements.

Alors, où sont les mesures audacieuses et structurelles nécessaires pour réformer en profondeur le système de santé et le rendre à même de résister à de nouvelles épidémies ou à d'autres phénomènes sanitaires encore inconnus ? Faut-il rappeler qu'en 2020, en pleine période de covid-19, 5 700 lits d'hôpital ont été supprimés, alors qu'au même moment on nous disait qu'il fallait en ouvrir 12 000 supplémentaires en réanimation pour faire face à la crise. Selon la DREES, vingt-cinq établissements publics et privés ont fermé l'an dernier, sous l'effet des réorganisations et des restructurations.

Mais ce n'est pas tout : le phénomène de pénurie de soignants atteint une dimension cataclysmique dans certains hôpitaux. Entre ras-le-bol et épuisement des équipes, cette lame de fond affecte de plein fouet infirmiers et aides-soignants, cœur battant de notre système sanitaire. Je ne parle même pas des déserts médicaux pour lesquels nous n'avons toujours pas trouvé de solution. Je ne résiste pas à l'envie de vous rappeler la réponse de la ministre de la santé lorsque, en 2017 déjà, je demandais la suppression du numerus clausus pour pallier le manque de médecins en France : « Madame Ménard, vous dites des bêtises ! » Deux ans plus tard, vous vous rendiez à l'évidence et engagiez enfin cette réforme qui nécessitera malheureusement dix ans avant de produire ses premiers effets.

Comment ne pas regretter également l'aveuglement du Gouvernement – votre aveuglement – face à la question de la fraude sociale. La sonnette d'alarme a déjà été tirée, que ce soit grâce aux travaux du magistrat Charles Prats, de la sénatrice Nathalie Goulet ou, à l'Assemblée nationale, du député Pascal Brindeau. J'ai déposé des amendements qui pourraient entraîner des économies, visant à proposer des mesures concrètes et à mettre un coup d'arrêt à cette fraude massive : la balle est dans votre camp !

Alors que votre Gouvernement a annoncé – il était temps ! – un plan national pour le développement des soins palliatifs et l'accompagnement de la fin de vie, d'un montant de 171 millions d'euros…,

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