Le dernier budget du quinquennat demeure, s'agissant de la mission "Enseignement scolaire" , dans la ligne idéologique libérale dans laquelle s'est inscrit le Gouvernement depuis le début de la législature. Certes, les crédits de la mission augmentent de 2,49 % par rapport à l'an dernier, atteignant 55 milliards d'euros, mais sans pour autant répondre aux besoins réels de l'école.
Les AESH sont ainsi maintenus dans la précarité, malgré l'instauration d'une nouvelle grille salariale. Dans la mesure où beaucoup de ces emplois sont des temps partiels subis, les salaires perçus permettent à peine de survivre. De plus, les 4 000 ETP supplémentaires créés pour 2022 seront bien insuffisants – vous le savez – face aux besoins réels. En effet, 15 000 enfants étaient privés d'AESH à la rentrée dernière, dont 1 000 sans aucune solution de scolarisation.
À cet égard, la généralisation des PIAL, qui visent à économiser des postes face à l'augmentation importante des notifications des MDPH – maisons départementales des personnes handicapées –, a contribué à dégrader les conditions de travail des AESH, qui sont amenés à accompagner en même temps plusieurs élèves d'établissements différents.
Par ailleurs, malgré des demandes répétées et des besoins plus qu'avérés, le manque de médecins scolaires n'est pas comblé : au contraire, on en compte cinquante-trois de moins que l'an passé. La difficulté à recruter des médecins scolaires est en partie due au niveau de salaire et au très grand nombre d'élèves à prendre en charge, un seul praticien pouvant en avoir 46 000.
Plus généralement, alors que vous annonciez une « revalorisation historique » du salaire des enseignants, ces derniers devront encore prendre leur mal en patience. En effet, lorsque l'on regarde dans le détail les 700 millions d'euros de crédits que vous annoncez pour cette mission, l'on s'aperçoit que seuls 260 millions seront concrètement consacrés à cette revalorisation.
À ce jour, selon l'OCDE, la France demeure à la traîne par rapport à la moyenne des autres pays, avec un salaire inférieur de 7 % pour les enseignants en début de carrière et de 18 % pour ceux ayant entre dix et quinze ans d'ancienneté. Nous sommes donc encore bien loin de l'objectif annoncé à la suite du Grenelle de l'éducation « de rejoindre le peloton de tête des pays de l'OCDE ».
Par ailleurs, vous persistez dans la réforme du bac, alors que l'instauration du contrôle continu a créé une inégalité entre les élèves, désormais détenteurs d'un diplôme qui n'aura plus la même valeur selon l'établissement dans lequel il aura été obtenu.
En outre, vous continuez de fermer des lycées professionnels – trente-quatre en quatre ans – et vous supprimez des postes d'enseignant. Vous semblez donc penser que les lycées professionnels peuvent être peu à peu remplacés par les filières de l'apprentissage par voie scolaire. Au lieu d'être mis en concurrence, ils devraient plutôt être tous deux préservés et renforcés, en ce qu'ils répondent à des besoins différents.
Nous retrouvons ici votre vision de l'éducation, qui se résume trop souvent à la notion d'employabilité – vision également à l'œuvre dans l'enseignement supérieur. Vous l'avez d'ailleurs concrétisée lors de l'organisation de la première université école-entreprise, en partenariat avec Veolia.
Cette année encore, les cadeaux à l'école privée se poursuivent, alors que vous reconnaissez vous-même que la progression des flux d'élèves vers ces établissements s'est arrêtée. Les crédits alloués au privé, qu'il s'agisse du pré-élémentaire, de l'élémentaire, du collège ou du lycée, augmentent plus que ceux du public.
Quant aux suppressions de postes, votre logique se retrouve dans le second degré, où ce sont 1 354 emplois qui disparaissent, alors que le nombre d'élèves devrait augmenter de 23 900.
Au milieu de tout cela, un îlot semble préservé dans l'école républicaine : l'école élémentaire. Dans ce domaine, vous créez 1 369 postes et vous dédoublez les classes, ce qui est une bonne chose. Mais cet îlot n'est qu'un leurre destiné à masquer tout le reste. Vous allez d'ailleurs l'anéantir à son tour avec, en préambule, l'expérimentation qui sera menée à Marseille et qui autorisera un directeur d'école à recruter lui-même ses équipes pédagogiques, titulaires ou non.
Ce qui se joue avec cette expérimentation est la potentielle fin de l'actuel mode d'affectation des enseignants et, à travers lui, du lien entre le concours et le poste. Au fond, c'est le statut de fonctionnaire des enseignants qui est ici attaqué. En effet, si cette expérimentation était généralisée, les écoles publiques fonctionneraient dès lors comme les écoles privées sous contrat, ce que, pour l'instant, vous n'assumez pas.
À la fin du quinquennat, vous aurez dangereusement abîmé l'école publique républicaine, en occultant sa mission émancipatrice et en renforçant le déterminisme social. Voilà pourquoi le groupe La France insoumise ne votera pas les crédits de la mission "Enseignement scolaire" .