Intervention de Mathilde Panot

Séance en hémicycle du jeudi 21 décembre 2017 à 9h30
Projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2018 à 2022 - projet de loi de finances pour 2018 — Motion de rejet préalable

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaMathilde Panot :

Savez-vous combien coûtera le carénage des centrales nucléaires ? Près de 100 milliards d'euros. Où sont donc les grands esprits et les prétendus économistes pour venir nous expliquer, face à ce chiffre, la nécessité absolue de couper dans les dépenses sociales tant l'État est criblé de dettes ? Où donc sont vos magnifiques raisonnements sur la rationalisation des comptes publics ? Nulle part. Déjà, cette année, nous avons recapitalisé EDF et Areva à hauteur de 9 milliards d'euros, sans aucun débat public. Vous faites valser les milliards avec plus d'aisance dans certains cas, et il est certain que vous préférez mener la danse vers les plus riches ou le lobby du nucléaire.

J'appelle toutefois l'attention de la majorité parlementaire et de tous nos collègues sur ce fait élémentaire : des dépenses aussi considérables nous condamnent à ne pas investir suffisamment dans la transition énergétique. Le choix est posé : ce sera les énergies renouvelables ou le nucléaire, et non pas l'un et l'autre. Comprenez-le et nous ne désespérerons pas que vous puissiez rejoindre nos idées et mettre en oeuvre un plan ambitieux qui conduira notre pays aux 100 % d'énergies renouvelables d'ici à 2050. Nous ne sommes pas les seuls à penser que cela est possible et nécessaire. C'est du pays tout entier que proviennent des projets et des examens sérieux du problème.

Un dernier point avant de conclure, monsieur le ministre : votre plan d'investissement de 57 milliards présente seulement 24 milliards d'euros de nouveaux investissements. Le reste était déjà budgété. Pour vous donner une idée du ridicule d'un tel plan, je vous rappellerai que l'Agence internationale de l'énergie estime que les investissements nécessaires pour assurer la transition énergétique s'élèvent à 44 000 milliards de dollars d'ici à 2050, soit 1 300 milliards par an au niveau mondial.

Il est clair que la France ne prendra pas part à cet effort en 2018 et qu'elle renforcera sa dette à l'égard du monde, notamment de celles et ceux qui souffriront le plus du changement climatique. Vous êtes bien loin du compte.

De la même façon, vous prétendez rénover 500 000 logements par an pendant le quinquennat, ce qui est un objectif louable. Mais vous ne prévoyez pour cela que 2,8 milliards d'euros par an et 14 milliards sur cinq ans.

Aujourd'hui, la part de l'investissement public dans la rénovation thermique est de 42 %. Même si elle devait être ramenée à un tiers, il faudrait réunir 7 milliards d'euros annuels de financement public pour la rénovation thermique, soit deux fois et demie le montant que vous budgétez dans votre prétendu grand plan d'investissement. Nous savons compter, monsieur le ministre, et nous savons donc débusquer les contre-vérités où elles se trouvent.

Votre budget est donc hostile à l'écologie. Il est d'un autre temps, où il était possible de penser que tout allait continuer comme avant, vaille que vaille, que tout devait changer pour que rien ne change. Ce temps-là est fini. Ni le gouvernement auquel vous appartenez ni le budget que vous présentez n'est à la hauteur des enjeux actuels. Saisir son époque, ce n'est pas une question d'âge, c'est une question de capacité critique – capacité qui s'envole souvent chez celles et ceux que fascine le bruit sourd des salles de marché et les cours de la bourse.

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