La commission de la défense nationale et des forces armées a d'ores et déjà donné un avis favorable à l'adoption du budget de la défense ; s'agissant de nos militaires, l'abstention ne fut pas de mise.
Les effets bénéfiques de la loi de programmation militaire sont déjà tangibles. La politique de fidélisation que nous menons et une LPM à hauteur d'homme ont permis à l'armée de terre d'éviter 1 000 recrutements en 2021, soit l'équivalent d'un régiment entier ; ce sont ainsi 47 millions d'euros de coûts de recrutement et de formation qui ont été économisés.
Les effets dévastateurs de la RGPP – révision générale des politiques publiques –, débutée en 2008, sont donc en passe d'être jugulés, quatorze ans plus tard. C'est sans doute le début d'un cercle vertueux : l'armée de terre va réduire ses recrutements de 10 % en 2022, ce qui réduira la pression sur ses capacités d'hébergement et de formation des nouvelles recrues. Les sommes importantes que nous investissons dans la défense sont donc cruciales ; plus encore, elles sont investies de manière efficiente et productive, et nos hommes le constatent.
Une telle politique doit être poursuivie et accompagnée d'un changement de paradigme, afin qu'elle continue à libérer les énergies. J'ai consacré mon avis budgétaire de cette année à la démarche de simplification inaugurée l'an dernier par l'armée de terre, conformément à la vision stratégique du CEMAT – chef d'état-major de l'armée de terre – à l'horizon 2030, dont elle constituait le quatrième axe.
Il s'agit en fait d'une nouvelle démarche de performance dont la finalité est de libérer du temps pour la préparation opérationnelle en réduisant les procédures à faible valeur ajoutée. Plus de 300 « irritants » ont été débusqués sur le terrain, et ils ont déjà été en partie résolus par des décisions du CEMAT. Cependant, la résolution de près de la moitié d'entre eux nécessitera le concours d'une entité externe à l'armée de terre : la task force « simplification » a inauguré en septembre des ateliers pour les étudier, qui intègrent les directions et les services du ministère.
Il me semble utile que la représentation nationale s'intéresse à cette démarche, qui est à maints égards source d'inspiration. L'examen des irritants recensés est en effet révélateur de besoins, de freins et de lacunes qui doivent nous faire réfléchir.
Premièrement, ces irritants révèlent un besoin accru de subsidiarité. Comme ailleurs dans le privé ou dans l'administration, les armées sont en proie à des biais bureaucratiques et souffrent de surcharge informationnelle. L'organisation matricielle du ministère et de l'armée de terre renforce la dépendance des jeunes chefs à l'égard de multiples décideurs. Il sera intéressant de voir quelles solutions originales seront proposées par les armées pour renouer avec la subsidiarité, la prise de risque et le travail collaboratif.
Deuxièmement, la lecture du fameux « top 14 » des irritants – en tant que Varoise, je ne peux qu'y être sensible – est révélatrice de certains manques de ressources qu'il faudrait prioritairement combler en cas de crise. Je n'y reviens pas ; ce sont des sujets que nous avons déjà abordés l'an dernier.
Troisièmement, de nombreux irritants sont liés à l'application de normes civiles inadaptées à la spécificité militaire ou qui n'opèrent pas de distinction entre les activités ordinaires, les activités opérationnelles et les activités d'entraînement. Par exemple, l'armée de terre doit demander une dérogation pour obtenir le droit de ne pas équiper ses blindés d'étiquettes signalant les angles morts des poids lourds de plus de 3,5 tonnes. En attendant, lesdites étiquettes ont été achetées. Par ailleurs, l'adaptation des bâtiments à la circulation des personnes à mobilité réduite – places de stationnement, ascenseurs, rampes d'accès – est citée de manière récurrente comme une norme rigide et coûteuse. Que ce soit à la 1
Enfin, l'armée de terre n'a pas pu obtenir de dérogation préfectorale au contrôle technique volontaire des chronotachygraphes – mouchards de temps de conduite et de vitesse –, ce qui impose le retour en métropole de certains véhicules non spécifiques de plus de 3,5 tonnes. C'est le cas du véhicule-citerne Sherpa en Guyane ou du PPLOG – porteur polyvalent logistique – à Djibouti.
Mon avis se conclut par quelques recommandations ou réflexions, qui doivent servir à lutter contre les cas concrets de complexité et à traiter certaines difficultés à l'échelon interministériel, que je considère comme pertinent. Par exemple, je milite depuis deux ans pour que nous nous dotions collectivement d'un tronc commun à tous les ministères pour les formations de secourisme et de lutte contre l'incendie. Cela permettrait aux réservistes ou aux militaires formés par les armées d'exciper d'une compétence tout aussi valable dans le civil pour améliorer leur employabilité. Il me semble qu'une telle démarche contribuerait à la résilience de l'ensemble de la nation.
Je tiens enfin à remercier les administrateurs de la commission de la défense et des forces armées, qui ont produit un travail remarquable.