Intervention de Jennifer De Temmerman

Séance en hémicycle du mardi 26 octobre 2021 à 15h00
Projet de loi de finances pour 2022 — Défense ; anciens combattants mémoire et liens avec la nation

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJennifer De Temmerman :

Alors que, dans un contexte international sillonné par les crises, les menaces se multiplient, nous souhaitons envoyer un signe fort de soutien aux armées, qui continuent d'assurer notre sécurité, tout comme nous tenons à rendre hommage à l'engagement de l'ensemble des soldats et des anciens combattants.

Je commencerai par la mission "Défense" , qui concentre 40,9 milliards d'euros en 2022, soit une augmentation de 1,7 milliard en un an. En un mot, les engagements budgétaires sont tenus. Faut-il pour autant s'arrêter là ? Non : le seul fait de respecter la loi de programmation militaire ne justifie pas de clore le débat. Notre groupe vous adresse donc trois griefs.

Le premier tient à l'article 7 de la loi de programmation militaire, qui prévoyait expressément une actualisation législative de ladite programmation. En juin dernier, vous vous êtes pourtant contentés d'organiser un simulacre de débat, nous empêchant de rectifier la trajectoire financière en prenant en compte la montée des périls et les retards de certaines livraisons. Le Sénat a pourtant identifié 7,4 milliards d'euros de surcoûts non prévus. Au-delà des seuls effets de la pandémie, certains choix, comme la cession de vingt-quatre avions Rafale d'occasion à la Grèce et à la Croatie, pour un total de 960 millions d'euros, devront être compensés pour respecter vos engagements.

Nous saluons cependant les efforts déployés pour renforcer la base industrielle et technologique de défense (BITD), qui totalise 200 000 emplois répartis dans près de 2 000 entreprises.

Nous réitérons en revanche nos inquiétudes liées à la remise en cause du « contrat du siècle » avec l'Australie, en particulier pour les employés de Naval Group. Le groupe Libertés et territoires regrette que le bleu budgétaire, faute d'actualisation avant sa publication, passe sous silence les effets de cette crise indo-pacifique.

Seconde remarque : notre groupe prend acte de l'effort budgétaire mené pendant le quinquennat pour maîtriser les surcoûts des OPEX et des MISSINT – missions intérieures –, qui devraient atteindre 1,2 milliard d'euros en 2022. Cependant, l'avenir reste incertain, et l'année 2022 sera celle de la transformation, notamment pour l'opération Barkhane. Même si vous refusez de parler de retrait du Mali, la situation demeure floue. Nous commençons à réduire notre présence en fermant nos bases au nord du pays. Ce désengagement est d'autant plus inquiétant qu'aux dernières nouvelles il apparaît que les autorités maliennes envisagent de négocier avec des groupes terroristes.

Alors que la lutte contre le terrorisme dans cette zone concerne l'ensemble de nos partenaires européens, force est de constater que nous restons bien seuls. La task force européenne Takuba n'a pas recueilli l'adhésion de tous nos voisins : nos alliés européens manquent à l'appel.

Ce constat me conduit à regretter la modestie de votre ambition européenne. En commission, vous avez évoqué le Fonds européen de la défense (FED), doté de 8 milliards d'euros pour la période 2021-2027. À l'échelle du continent, c'est peu : cela représente à peine plus de 2,50 euros par citoyen européen et par an. Comment penser l'avenir de la défense européenne dans ces conditions ? Dans un contexte international qui voit de nouvelles alliances se créer sans nous, à l'image du traité AUKUS, seule une coopération européenne pleine et entière nous permettra de préparer l'avenir.

Troisième et dernier point : notre groupe appelle à dresser un bilan carbone des armées. Doter le bleu budgétaire d'une composante verte constituerait un réel atout pour assurer la transition écologique du ministère des armées. Nous saluons les deux stratégies qui existent déjà pour la biodiversité et la performance énergétique, mais les enveloppes qui leur sont dédiées restent modestes – seulement 3 millions d'euros en 2022 pour la biodiversité. Le ministère doit se donner les moyens d'aller plus loin en la matière.

J'en viens à la mission "Anciens combattants, mémoire et liens avec la Nation" , laquelle, dotée de 1,92 milliard d'euros de crédit, continue de témoigner de notre reconnaissance et de l'importance que nous accordons aux politiques de réparation et de mémoire. Le groupe Libertés et territoires insistera sur deux points.

D'une part, le budget pour 2022 accuse une nouvelle baisse de 200 millions d'euros, poursuivant une diminution constante depuis 2017. Nous saluons cependant la revalorisation du point de PMI, à laquelle 32,8 millions d'euros seront consacrés. Réclamée de longue date, elle arrive tardivement, par un heureux hasard, juste avant les élections.

D'autre part, notre groupe déplorait que le futur projet de loi de reconnaissance pour les harkis ne trouvât aucune traduction dans le budget initialement présenté. Il aura fallu un amendement de dernière minute du Gouvernement pour rectifier le tir. Nous aurions préféré que, dans un souci de sincérité et de respect du Parlement, vous adoptiez une méthode de travail différente.

Pour conclure, en dépit de ces griefs, notre groupe renouvellera son soutien aux budgets des armées et des anciens combattants.

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