Intervention de Christine Pires Beaune

Séance en hémicycle du jeudi 28 octobre 2021 à 15h00
Projet de loi de finances pour 2022 — Cohésion des territoires

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaChristine Pires Beaune :

L'examen de la mission "Cohésion des territoires" , que je rapporte au nom de mon collègue Jean-Louis Bricout, c'est d'abord l'examen du budget du logement, et force est de constater que votre politique du logement est une catastrophe industrielle. Le Président de la République, au début de son quinquennat, avait déclaré qu'il souhaitait un choc d'offre pour relancer la construction de logements, mais c'est plutôt l'offre qui a été choquée. Après être passé de 338 000 en 2014 à 438 000 en 2017, le nombre de logements mis en chantier a baissé chaque année de votre mandat, pour retrouver le niveau de 2014 !

Le stock de logements à construire est également sous tension, alors que l'écart entre les logements autorisés et commencés est passé de 70 000 en 2017 à 6 000 fin 2020. Si, sur la période de septembre 2020 à août 2021, 453 600 logements ont été autorisés à la construction grâce à l'effet post-municipales et au déstockage d'une partie des projets bloqués par la crise sanitaire, ce niveau demeure cependant limité par rapport au quinquennat précédent. Surtout, la progression sur la période est essentiellement portée par les logements individuels, qui connaissent une augmentation de 24 %, contre 7,2 % seulement pour les logements collectifs. Par rapport aux douze mois précédant le premier confinement, le nombre de logements autorisés et commencés au cours des douze mois écoulés est encore en baisse, de 0,9 % et 0,4 % respectivement. La reprise se fait attendre.

La tension est d'autant plus forte sur la production de logements sociaux, qui a malheureusement connu la même courbe. Les impacts des variations de TVA et de cotisation à la CGLLS, les effets de la réduction de loyer de solidarité (RLS), qui a divisé par deux l'autofinancement des bailleurs sociaux, et la suppression de la taxe d'habitation, ont cassé la dynamique qui existait à la fin du quinquennat précédent. Aujourd'hui, 2 millions de Français attendent un logement social et les durées d'attente n'ont jamais été aussi élevées – elles dépassent dix ans dans la plupart des communes de la métropole du Grand Paris.

Mais ceux qui ont la chance d'être logés, en logement libre ou social, ne sont pas mieux lotis. En effet, vous avez fait de votre quinquennat une croisade contre les aides au logement. Entre la baisse de 5 euros en 2017 et la sous-revalorisation de l'inflation entre 2018 et 2020, ce sont en moyenne 500 euros qui ont été perdus durant votre mandat par les bénéficiaires de l'APL, soit l'équivalent d'un mois de loyer. Au 1er janvier 2021, avec la mise en œuvre de la réforme de contemporanéisation du calcul des ressources, ce sont 580 000 bénéficiaires qui sont sortis de l'APL selon les chiffres de la DREES, la direction de la recherche, des études, de l'évaluation et des statistiques. En outre, 29,6 % des bénéficiaires restants ont vu leur APL baisser, de 73 euros en moyenne. Selon vos propres chiffres, cette réforme fait donc près de 2 millions de perdants pour 115 000 nouveaux entrants. Vous assumez pleinement le fait d'économiser 1,1 milliard d'euros sur le dos des familles modestes.

Bien sûr, vous présentez des crédits en hausse grâce à l'effort conséquent porté sur le programme 177 et l'hébergement d'urgence. C'est notamment la conséquence du maintien de certaines places hivernales au-delà de la période habituelle, ce qui avait entraîné une rallonge de 700 millions d'euros en LFR, ou loi de finances rectificative. Nous saluons, bien entendu, cet effort et l'attention particulière portée depuis trois ans à la situation des femmes isolées dans ces parcours. Cependant, à l'aune des éléments précédents, on ne peut que constater que c'est l'insuffisance de l'offre de logements dignes et abordables qui entraîne ce besoin croissant d'hébergement. Dois-je rappeler l'engagement du Président de la République qui, le 27 juillet 2017, à la préfecture du Loiret, lors d'une cérémonie de naturalisation, déclarait : « Je ne veux plus, d'ici la fin de l'année, avoir des femmes et des hommes dans les rues, dans les bois ou perdus » ? Cet engagement, le Président de la République l'a réitéré lors de ses vœux aux Français le 31 décembre 2017 : « Je veux que nous puissions apporter un toit à toutes celles et ceux qui sont aujourd'hui sans abri. » Force est de constater qu'à la fin de son mandat, l'engagement ne sera pas tenu, et nous le regrettons.

Enfin, notre groupe Socialistes et apparentés ne comprend pas, à propos du programme 112, que les crédits de l'action relative à la lutte contre les algues vertes en Bretagne soient en légère baisse, alors que la Cour des comptes, dans un rapport de juillet dernier, a sévèrement jugé l'insuffisance du soutien de l'État à la lutte contre leur prolifération par la réduction des intrants agricoles. Quels engagements pouvez-vous prendre en la matière ?

Je vous remercie de votre attention et vous prie de m'excuser de devoir vous quitter, car il me faut prendre le dernier train – qui, comme vous le savez, monsieur le secrétaire d'État, n'est pas un TGV.

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