Intervention de Sophie Métadier

Séance en hémicycle du vendredi 29 octobre 2021 à 15h00
Projet de loi de finances pour 2022 — Recherche et enseignement supérieur

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaSophie Métadier, rapporteure pour avis de la commission du développement durable et de l'aménagement du territoire :

Si l'on considère que la recherche doit produire des connaissances afin d'orienter les choix de demain, alors nous avons cruellement besoin d'elle pour relever les défis environnementaux qui s'annoncent. La commission du développement durable et de l'aménagement du territoire est particulièrement consciente de son importance pour l'avenir.

L'examen des crédits consacrés à la recherche est l'occasion de mettre en perspective les critiques et la réalité des actions qui sont menées. La commission du développement durable et de l'aménagement du territoire s'est donc saisie pour avis sur les programmes 172, 190 et 193.

Le programme 172 Recherches scientifiques et technologiques pluridisciplinaires est le programme pilote de la recherche française. Ses crédits sont très largement revalorisés, en lien avec la loi de programmation pluriannuelle de la recherche, ce qui est à saluer.

Une grande partie de ces nouveaux moyens accompagne la montée en puissance de l'Agence nationale de la recherche. L'effort financier dont bénéficie l'ANR traduit la volonté d'inscrire le financement de la recherche dans une logique compétitive, grâce aux appels à projets. Cette stratégie permet de mieux cibler les financements vers des thématiques particulières, notamment l'environnement, et de stimuler l'excellence de la recherche française. Toutefois, elle présente plusieurs inconvénients : elle ne finance pas le recrutement de nouveaux chercheurs car le taux de couverture des appels à projets ne permet pas de financer des emplois, et elle conduit à s'interroger sur la continuité des travaux de recherche menés sur des sujets émergents. Il faut donc veiller à maintenir l'équilibre fragile entre les financements compétitifs et les dotations stables allouées aux organismes de recherche historiques.

Le programme 190 Recherche dans les domaines de l'énergie, du développement et de la mobilité durables est celui qui est au cœur des enjeux environnementaux. À première vue, les crédits alloués sont en recul par rapport à l'année 2021. Toutefois, cette baisse constitue en réalité un trompe-l'œil résultant de mouvements de crédits vers le plan de relance, versés l'année précédente. Cette année encore, la lisibilité des crédits du projet de loi de finances, tout particulièrement sur l'articulation entre les crédits des programmes habituels et ceux des programmes conjoncturels, n'est pas au rendez-vous. Faut-il rappeler qu'une lecture aisée des évolutions budgétaires contribue à la bonne information des parlementaires ?

Enfin le programme 193 Recherche spatiale connaît une relative stabilité, même si, ici encore, on peut formuler d'importantes réserves sur la lisibilité des moyens alloués au Centre national d'études spatiales.

Pour avoir une vision exhaustive des montants consacrés à la recherche en matière de développement durable, il faut aussi analyser le programme d'investissements d'avenir et le plan de relance. Ces deux missions témoignent d'un effort important en matière de recherche sur le développement durable. De nombreux appels à projet orientés vers l'environnement sont financés par ces missions comme l'appel à projet Make our planet great again doté de 30 millions d'euros ou le financement de l'avion bas carbone, à hauteur de 404,1 millions d'euros.

Il faut également parler rapidement de la situation des opérateurs à la suite de la crise sanitaire. D'une manière générale, les mesures fortes du Gouvernement pour prolonger les contrats doctoraux, ceux des attachés temporaires d'enseignement et de recherche (ATER), les post-doc et les CDD et pour renforcer la résilience des organismes de recherche a permis d'amortir le choc de la crise. Toutefois, les établissements dont la part des ressources propres est substantielle sont tout particulièrement touchés par la baisse de l'activité. Il nous faudra donc les accompagner.

Enfin, je souhaite évoquer rapidement les travaux de recherche visant à décarboner le secteur de la construction et du bâtiment. Ce domaine de recherche est stratégique pour la transition écologique, le secteur du bâtiment étant le deuxième secteur le plus émetteur de gaz à effet de serre en France. La recherche sur l'amélioration des performances environnementales du secteur de la construction fait l'objet de financements dédiés dans le cadre de la mission interministérielle Recherche et enseignement supérieur (MIRES) et à travers les programmes d'investissements d'avenir. Des réalisations ont déjà vu le jour, notamment la chambre climatique Sense-City de Marne-la-Vallée, financée dans le cadre du PIA 4.

La recherche dans ce domaine est également financée par des dépenses fiscales, en l'occurrence par le crédit d'impôt recherche. À ce titre, les dépenses de recherche exposées pour la réalisation d'opérations confiées à des organismes de recherche publics ouvrent droit au crédit d'impôt pour le double de leur montant. Ce dispositif a été supprimé par l'article 35 de la loi de finances pour 2021. Le maintien du doublement de l'assiette est pourtant particulièrement important pour éviter d'amplifier le risque de baisse des investissements de recherche par les entreprises en période de crise sanitaire.

Si les moyens pour financer la recherche en matière de développement durable existent, ils ne s'inscrivent pas dans une stratégie cohérente, adaptée aux spécificités de ce secteur.

Les crédits de la mission "Recherche et enseignement supérieur" témoignant d'une réelle ambition pour la recherche publique française, j'émets un avis favorable à leur adoption. Toutefois, nous devons impérativement veiller à la pérennité du financement de la recherche en matière de développement durable.

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