Les missions budgétaires dont nous examinons les crédits répondent à des enjeux dont on ne peut nier l'importance puisqu'elles ont vocation à financer l'ensemble de notre structure institutionnelle, de l'Élysée aux assemblées parlementaires en passant par les services de Matignon, le Conseil constitutionnel, le Conseil d'État et nos autorités administratives indépendantes. Nous devons donc faire preuve d'une grande attention.
S'agissant de la mission "Pouvoirs publics" , notons tout d'abord une stabilité des crédits, y compris pour l'Élysée qui voit son budget se stabiliser à 105,3 millions d'euros, après avoir augmenté depuis le début du quinquennat à raison de 6 millions d'euros chaque année. Les efforts de diminution entrepris sous le précédent quinquennat pour atteindre l'objectif des 100 millions d'euros n'ont pas été poursuivis. La stabilisation intervient en effet après une hausse. Nous regrettons, par ailleurs, le manque de précision de ce budget et déplorons que le contrôle exercé sur ce dernier par la Cour des comptes ne réponde pas à de nombreuses interrogations et observations à son sujet.
C'est aussi un manque de précision que nous observons, comme dans les précédents projets de loi de finances, pour ce qui concerne les coûts des missions d'évaluation des politiques publiques, qu'elles soient menées par les commissions permanentes ou par le Comité d'évaluation et de contrôle des politiques publiques (CEC). Le budget alloué à cette instance, bras armé de l'Assemblée en matière d'évaluation, mériterait d'être détaillé afin que l'on puisse établir des comparaisons avec des institutions analogues à l'étranger. Si le CEC n'a pas à rougir de la qualité de ses travaux, sa mission est suffisamment essentielle pour que ses crédits soient sensiblement augmentés. Aujourd'hui, ils dépasseraient tout juste les 100 000 euros.
La mission Direction de l'action du Gouvernement connaît une augmentation de 11,95 % par rapport à la loi de finances initiale pour 2019. Le PLF pour 2022 traduit la poursuite des efforts en matière de sécurité informatique de l'État. L'Agence nationale de la sécurité des systèmes d'information (ANSSI) bénéficie d'une augmentation de 50 ETPT – équivalents temps plein travaillés – après la création de 40 ETP– équivalents temps plein – en 2021.
En dépit de cette progression continue, on relève en matière de sécurité informatique une grande hétérogénéité des situations dans les différents ministères. La nouveauté de ce PLF pour 2022 est le budget consacré au service de vigilance et de protection contre les ingérences numériques étrangères (VIGINUM) créé par le décret du 13 juillet 2021 et rattaché au secrétariat général de la défense et de la sécurité nationale (SGDSN). Le bleu reste évasif : au sujet des 94 ETP attribués au SGDSN, il indique que « l'ensemble de ces créations de postes permettront la montée en charge du service en charge de la lutte contre les manipulations de l'information ». Le but sera-t-il de lutter contre les ingérences numériques ou plutôt d'alerter au cas où de telles ingérences seraient détectées ?
S'agissant du programme Protection des droits et libertés qui regroupe onze autorités indépendantes, nous ne pouvons que noter la hausse des créations d'ETP pour 2022 dont il bénéficie : 53, notamment au profit de la Commission nationale de l'informatique et des libertés (CNIL).
Nous regrettons cependant qu'en dépit de ces évolutions, la Commission nationale consultative des droits de l'homme (CNCDH) demeure sous-dotée alors même que la charge de travail en matière de respect des droits fondamentaux ne cesse d'augmenter. Sa réactivité dans le cadre de l'élaboration des lois mérite d'être soulignée. Compte tenu de l'importance d'une telle mission, la création d'ETP supplémentaires serait nécessaire.
J'en viens à la mission "Conseil et contrôle de l'État" . Il apparaît indispensable de renforcer les moyens financiers et humains de la Cour nationale du droit d'asile (CNDA), qui doit faire face à l'accélération des procédures. La réforme de l'asile impose notamment de diminuer les délais à cinq mois en formation collégiale et à cinq semaines en juge unique, ce qui relève de l'impossible. Dans le même temps, la cour est confrontée à un accroissement des demandes d'asile examinées par l'OFPRA – Office français de protection des réfugiés et des apatrides –, qui entraîne mécaniquement une augmentation sensible du nombre de recours qu'elle a à traiter. Rappelons que ces objectifs intenables ont conduit les agents de la CNDA à protester par des appels à la grève. Dans ces conditions, nous ne pouvons qu'appeler à abonder le budget de cette juridiction.
Du fait notamment des nombreuses imprécisions et du manque de visibilité qui caractérisent ce budget, le groupe Socialistes et apparentés votera contre les crédits de ces missions.