Intervention de Valérie Rabault

Séance en hémicycle du mardi 2 novembre 2021 à 15h00
Projet de loi de finances pour 2022 — Plan de relance ; plan d'urgence face à la crise sanitaire

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaValérie Rabault :

Nous examinons les deux missions budgétaires Plan de relance et Plan d'urgence face à la crise sanitaire ; je commencerai par la première. Messieurs les ministres, lorsque vous nous l'avez présentée, vous avez indiqué vouloir « construire la France de demain ». Or, plus d'un an après son lancement, l'objectif n'est pas totalement atteint, comme je vais tenter de le démontrer.

Plutôt que de construire un plan d'investissement ciblé, vous avez préféré faire du saupoudrage, avec cent treize mesures, aussi diverses que la rénovation énergétique des bâtiments publics – par ailleurs très bienvenue –, le replantage de haies ou encore le plan Vélo.

Les dernières données publiées par l'OCDE – l'Organisation de coopération et de développement économiques – montrent que la France fait partie des cinq pays qui mettront le plus de temps à retrouver leur niveau de richesse d'avant-crise. J'entends bien que la croissance y est dynamique, mais la chute y a été plus importante qu'ailleurs ; ce qui compte, c'est donc le différentiel de richesses au bout de deux ans. Or le rattrapage n'est possible qu'avec un plan structuré ; faire du saupoudrage ne crée pas d'effet d'entraînement suffisant pour l'économie.

L'an dernier, lorsque nous en avons débattu, j'avais proposé d'investir de façon massive et ciblée dans cinq secteurs clés : l'agriculture – car la moitié des agriculteurs partira à la retraite dans les quinze prochaines années –, la santé – pour laquelle rien n'a été prévu dans la mission "Plan de relance," ni l'an dernier ni cette année –, l'énergie, les transports et enfin la souveraineté numérique.

L'annonce d'un deuxième plan de relance par le Président de la République, à l'horizon 2030, sonne à la fois comme une avancée positive, car elle évite le saupoudrage, et comme le désaveu du premier plan de relance, annoncé et lancé en septembre 2020.

Autre écueil, vous aviez souhaité un lancement rapide du plan de relance. Or, en matière de consommation des crédits, je n'ai pas la même lecture que Mme la rapporteure pour avis et M. le rapporteur spécial. En effet, le taux de consommation des crédits de paiement du plan de relance a été révisé à 69 % pour 2021, alors que vous aviez fixé un objectif initial de 100 %. Ainsi, 30 % des crédits ouverts pour 2021 n'ont pas été consommés ou ne le seront pas. Cette sous-consommation est particulièrement importante pour les programmes Écologie et Cohésion, pour lesquels le taux de consommation prévisionnel a été respectivement abaissé à 74 % et 59 % en 2021. Ce n'est pourtant pas faute de vous avoir interpellés tout au long de l'année sur la sous-consommation chronique de ces crédits, que nous avons constatée sur le fameux logiciel Chorus, utilisé à Bercy. À chaque nouvelle alerte, vous vous êtes obstinés à nous répondre que les organismes utilisaient bien leur trésorerie, que Chorus n'était pas entièrement à jour, et ainsi de suite. Malgré toutes les réponses que vous avez avancées, je constate que vous révisez finalement la consommation des crédits de la mission, pour 2021.

Enfin, au-delà du saupoudrage et de la sous-consommation de certains crédits, il est permis de s'interroger sur quelques effets concrets de ce plan de relance. Je prendrai l'exemple de la rénovation énergétique des logements privés, qui constitue selon vous « un axe important du plan de relance » – vous avez bien raison. Sur ce point, la lecture de l'annexe budgétaire – il faut toujours lire ces documents – est très instructive. L'objectif – fixé par le Gouvernement lui-même, et non par nous – était de faire sortir 80 000 logements du statut de passoire thermique en 2021. Finalement, cela n'a concerné que 2 500 logements, soit trente-deux fois moins que l'objectif initial ! Pour 2022, vous avez réduit l'objectif de 80 000 à 20 000 logements ; c'est quatre fois moins. Je crains que cela n'affecte durablement la croissance. Ces chiffres nous interpellent quant aux effets concrets du plan de relance. Nous avons donc déposé plusieurs amendements d'appel.

Enfin, nous nous mobilisons pour le minimum jeunesse car les annonces faites ce matin par le Président de la République nous paraissent très en deçà des besoins.

Je conclurai sur la mission "Plan d'urgence face à la crise sanitaire" , qui s'éteint, avec seulement 200 millions d'euros de crédits prévus. Là aussi, nous vous avons alertés en commission, car certains programmes n'ont pas été achevés en 2021 et il faut laisser un peu de marge de manœuvre pour 2022. Les députés du groupe Socialistes et apparentés ne voteront donc pas les crédits de ces deux missions.

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