Intervention de Michel Castellani

Séance en hémicycle du jeudi 4 novembre 2021 à 15h00
Projet de loi de finances pour 2022 — Santé ; solidarité insertion et égalité des chances

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaMichel Castellani :

La crise sanitaire et économique a vu apparaître de nouvelles formes de précarité et de pauvreté. Alors qu'une embellie se profile dans le champ économique et sur le marché de l'emploi, nous devons prendre garde à ne pas détourner le regard des personnes précaires. Penser que la reprise économique permettra de rompre le cercle vicieux de la pauvreté serait une erreur ; ce serait fermer les yeux sur la situation de beaucoup de nos compatriotes. Car c'est précisément lorsqu'un retour à la normale semble s'amorcer que le risque d'un basculement dans la pauvreté, souvent irréversible, est le plus grand. C'est au moment où nous supprimons les dispositifs exceptionnels, qui ont agi comme un vrai bouclier social, qu'il faut être le plus vigilant.

Nous constatons déjà une hausse du nombre de bénéficiaires du RSA, probablement liée à la fin de la prolongation des droits à l'assurance chômage. L'inquiétude du groupe Libertés et territoires est évidemment renforcée par l'entrée en vigueur de la réforme de l'assurance chômage et ses répercussions sur la pauvreté.

Les crédits de la mission "Solidarité, insertion et égalité des chances " retiennent donc toute notre attention, car ils incluent les moyens destinés à soutenir la stratégie de lutte contre la pauvreté engagée depuis 2018. Les crédits consacrés à cette stratégie sont en hausse, ce dont nous nous réjouissons, mais le récent bilan qui en a été fait par le Gouvernement est mitigé. Ainsi, s'il faut saluer les efforts réalisés en direction de l'enfance, notamment les petits déjeuners à l'école, l'objectif d'augmentation du nombre de places en crèche n'a pas été atteint. Ni cette stratégie ni les dispositifs d'urgence ne permettent de toucher tous les publics. Les plus démunis, les indépendants et évidemment les jeunes passent souvent à travers les trous de la raquette.

Nous le répétons : le contrat d'engagement jeune est sous-calibré pour favoriser l'insertion et remédier à la précarité des moins de 25 ans. Par ailleurs, l'un des axes forts de la stratégie de lutte contre la pauvreté résidait dans la lutte contre le non-recours aux droits. Or le projet de revenu universel d'activité annoncé depuis 2018 a tout bonnement été enterré, alors qu'il aurait dû être la pierre angulaire de cette politique.

Les efforts consentis, dans le projet de budget de la mission "Solidarité, insertion et égalité des chances, " en faveur de la stratégie de prévention et de protection de l'enfance méritent, en revanche, d'être salués. Nous regrettons cependant la diminution des crédits consacrés au dispositif d'accueil des mineurs non accompagnés, d'autant que le projet de loi relatif à la protection des enfants, en cours d'examen au Parlement, prévoit un renforcement du contrôle de ces mineurs sans renforcement de leur accompagnement.

L'attention aux plus vulnérables doit être le fil rouge des deux missions qui nous occupent aujourd'hui. Or, sur cet aspect, monsieur le ministre, notre groupe continue de déplorer les mesures prises en 2020 pour limiter l'accès à l'aide médicale de l'État et la protection universelle maladie. Elles avaient entraîné une réduction de 15 millions d'euros. En vous focalisant sur une fraude que vous considérez vous-même comme très marginale, vous avez pris le risque d'augmenter le non-recours aux droits et de retarder l'accès aux soins de personnes migrantes déjà fragiles. Garantir cet accès est pourtant un devoir collectif éthique et humanitaire.

Je veux évidemment dire un mot de l'article 43, rattaché à la mission "Solidarité, insertion et égalité des chances" , qui contient la mesure que vous avez opposée à notre proposition – soutenue par l'ensemble des groupes d'opposition et par des députés de la majorité – d'individualiser l'AAH. En proposant un abattement forfaitaire sur les revenus du conjoint, vous ne répondez pas aux besoins d'autonomie et de dignité des personnes handicapées. Le groupe Libertés et territoires continuera évidemment de défendre la déconjugalisation de l'AAH et nous ne désespérons pas de vous convaincre.

Je terminerai par quelques mots sur la mission "Santé" . Si elle peine à proposer une véritable politique de santé publique et de prévention, nous notons avec satisfaction l'augmentation de la subvention à l'agence de santé de Wallis-et-Futuna – un territoire cher à notre collègue Sylvain Brial, que je salue –, qui complétera utilement la dotation d'investissement accordée l'an dernier. Nous devrons nous assurer de la concrétisation de ces investissements. En effet, le sous-financement chronique de l'agence et l'isolement du territoire, renforcé depuis l'épidémie, rendent urgente l'amélioration de l'accès aux soins des habitants de Wallis-et-Futuna.

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