Nous sommes à nouveau réunis pour évoquer la question des retraites à travers l'examen des crédits du compte d'affectation spéciale "Pensions" et de la mission "Régimes sociaux et de retraite" . La commission des affaires sociales a donné un avis favorable à l'adoption de ces crédits.
Le Gouvernement a déposé plusieurs amendements dont je souhaite ardemment l'adoption : deux amendements, tout d'abord, pour financer le versement de l'indemnité inflation, dispositif destiné à répondre à la situation difficile que connaissent actuellement beaucoup de nos concitoyens ; un amendement, ensuite, pour revaloriser les allocations versées aux harkis, conformément aux engagements du Président de la République, afin de mieux leur exprimer la reconnaissance de la nation.
Parmi les préoccupations que nous nourrissons tous dès qu'il s'agit de retraite, une inquiétude revient régulièrement : à quel âge pourrai-je partir à la retraite ? Pour apporter quelques éléments de réponse, j'ai souhaité cette année dresser un état des lieux des enjeux et des débats autour de cette question complexe de l'âge dans le système de retraite, en choisissant l'angle de l'équité, celle entre les générations et celle entre les situations.
L'équité entre générations tout d'abord, car le constat est clair : nous vivons plus longtemps mais l'âge moyen de départ à la retraite augmente moins vite que notre espérance de vie. En conséquence, la durée de versement des retraites s'élève et les dépenses augmentent elles aussi. En outre, la génération du baby-boom arrive à l'âge de la retraite : cet important contingent de cotisants devenant un contingent de retraités, la soutenabilité du système est menacée. Nous ne pouvons pas nous contenter d'assister passivement à la dégradation de l'équilibre financier de notre système de retraite en en rejetant les conséquences sur les générations qui viendront après nous : il nous faut dès maintenant prendre les mesures nécessaires pour freiner ce phénomène. Or, comme l'expose mon rapport, les mesures portant sur l'âge ont prouvé leur capacité à restaurer l'équilibre financier du système. Face à une situation budgétaire aussi difficile, la question de la nécessité d'une nouvelle réforme portant sur l'âge doit donc être posée.
Équité entre situations ensuite, en trouvant la juste réponse à cette question : comment mesurer la pénibilité d'un métier pour évaluer si celui qui l'exerce doit bénéficier d'un âge anticipé de départ à la retraite ? Cette réponse ne peut plus passer par les régimes spéciaux, bien qu'il faille dépasser l'opposition entre leur maintien sans condition et leur suppression pure et simple. Ces régimes, comme celui des mineurs, s'inscrivant bien souvent dans un statut complet destiné à compenser des conditions de travail difficiles, leur disparition ne peut se faire que dans le respect des espérances légitimes des personnes concernées. Cette exigence se traduit parfois par le recours à la clause du grand-père, comme dans le cas de la SNCF ; cette solution est simple, mais extrêmement coûteuse. Pour permettre à toute personne travaillant dans des conditions difficiles de pouvoir partir plus tôt à la retraite, il nous faut plutôt définir des critères de pénibilité universels, peut-être en ayant recours, au sein de chaque branche, à la négociation collective, gage d'acceptabilité.
Pour être bonne, la hausse de l'âge de départ à la retraite devra être acceptable, compréhensible et efficace, c'est-à-dire être régulière et continue. C'est en gardant à l'esprit ces trois nécessités qu'il conviendra de choisir entre les différents mécanismes disponibles, que sont le relèvement de l'âge d'ouverture des droits, de la durée de cotisation ou de l'âge d'accession au taux plein. Si aucune de ces options ne fait l'unanimité, j'ai relevé, lors des auditions menées pour la préparation de mon rapport pour avis, une forte opposition au mécanisme de l'âge pivot, jugé à la fois peu compréhensible, peu acceptable et peu incitatif.
Enfin, la question de l'âge de départ à la retraite va de pair avec la nécessité d'adopter des mesures visant à rapprocher les 60-64 ans du marché de l'emploi, notamment en permettant aux personnes occupant un emploi difficile de se reconvertir.
Pour conclure et pour reprendre les mots d'une célèbre écrivaine, « le seul mauvais choix est l'absence de choix ». Et je profite de cette intervention pour remercier Gabriel Livney, administrateur-adjoint, de m'avoir accompagné dans la rédaction de ce rapport pour avis.