Pour le dernier projet de loi de finances du quinquennat, le ministère de la transition écologique affiche un budget de près de 50 milliards d'euros dont vous revendiquez le « niveau historique », madame la ministre.
C'est oublier que, cette année, comme toutes celles qui l'ont précédée, les agents au service de la transition écologique seront moins nombreux pour faire face à l'urgence climatique, puisque vous supprimez 347 ETP. C'est oublier, également, que les changements de périmètre effectués au cours du quinquennat ont conduit à gonfler les chiffres de votre ministère. Ainsi, le logement est désormais sous votre tutelle, alors que, jusqu'en 2020, il était sous la responsabilité du ministère de la cohésion des territoires.
Alors oui, je suis prêt à reconnaître que votre budget est en hausse, mais cette augmentation est toute relative et, en l'état, elle ne nous permettra pas de faire face aux défis de la transition écologique.
L'exemple de la rénovation énergétique est à cet égard éloquent. Le projet de loi de finances consacre 2 milliards d'euros supplémentaires au dispositif MaPrimeRénov'. C'est un progrès, puisque le plan de relance prévoyait initialement de dépenser la même somme en deux ans ; c'est toutefois insuffisant pour permettre à l'ensemble du parc privé français de parvenir à la neutralité carbone d'ici à 2050, d'autant qu'aucune visibilité n'est donnée quant à la poursuite du programme à compter de 2023.
J'ai également des réserves sur les modalités de versement de la prime. Pour en bénéficier, il n'est nul besoin d'attester que les travaux entrepris conduiront à des gains énergétiques. Dans ces conditions, la prime risque d'encourager les petits travaux, sans prioriser les gestes les plus performants, ni même inciter à la rénovation globale.
De même, les différentes mesures proposées pour accompagner les Français face à la hausse du prix de l'énergie sont perfectibles. Le bouclier tarifaire permettra, certes, de restreindre la hausse de prix pour l'année 2022, mais elle sera répercutée sur les factures de 2023. Autrement dit, au lieu de faire payer les Français tout de suite, on leur fait crédit. Nous aurions préféré une baisse de la fiscalité, à l'instar de ce qui est fait pour l'électricité.
Par ailleurs, vous prévoyez une hausse limitée de la ligne budgétaire dédiée au chèque énergie pour 2022. Pourtant, la hausse des prix de l'énergie risque de se poursuivre. Il aurait fallu, d'une part, renforcer les moyens alloués au dispositif et, d'autre part, prévoir des mesures pour augmenter le taux de recours. Aujourd'hui près de 25 % des ayants droit ne font pas usage de leur chèque.
Je veux également évoquer, brièvement, la question de notre mix énergétique. Le rapport de RTE nous a appris une chose : nous ne pourrons pas atteindre la neutralité carbone sans développer significativement les énergies renouvelables. Ces besoins d'investissements se font particulièrement sentir dans les zones non interconnectées où le développement d'une énergie décarbonée est synonyme d'indépendance énergétique. À cet égard, nous regrettons que le projet de loi de finances ne prévoie pas de soutien massif au déploiement du renouvelable. Pourtant nos retards s'accumulent en la matière, concernant notamment l'éolien en mer.
Le bilan du quinquennat est décevant s'agissant d'un autre enjeu majeur : la protection de la biodiversité. Seul 0,14 % du budget de l'État y était consacré en 2020 selon le CESE Depuis lors, ce chiffre est en progression, mais il reste nettement insuffisant. Pis, depuis 2017, les effectifs des opérateurs n'ont cessé de décliner. À ce titre, le maintien des postes au sein de l'Office français de la biodiversité, des agences de l'eau et du Conservatoire du littoral, ainsi que la création d'une vingtaine de postes pour les parcs nationaux, s'apparentent davantage à un moratoire sur les suppressions de postes qu'à une véritable stratégie de reconquête de la biodiversité.
Le fonds Barnier a vu ses ressources renforcées dans le PLF pour 2022. La majorité de ces financements sera toutefois dédiée aux victimes de la tempête Alex d'octobre 2020, dans les Alpes-Maritimes, ce qui laisse peu de moyens pour les opérations visant à accroître la résilience de nos territoires.
Des efforts substantiels sont en outre nécessaires pour lutter contre la pollution. Chez moi, nous sommes préoccupés par la pollution maritime qui ravage la mer Méditerranée. C'est pourquoi, nous défendrons un amendement visant à donner à la Corse les moyens de lutter contre pollution aux hydrocarbures.
Madame la ministre, comme vous l'affirmez dans un document de présentation du projet de loi de finances, « il n'y a pas de transition écologique possible sans moyens financiers massifs », « sans constance et visibilité pour les ménages et les entreprises », « sans agents sur le terrain ». Aujourd'hui, ces conditions ne nous semblent pas réunies. Le groupe Libertés et territoires votera donc contre l'adoption des crédits de cette mission.