Intervention de Karine Lebon

Séance en hémicycle du samedi 6 novembre 2021 à 9h00
Projet de loi de finances pour 2022 — Culture

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaKarine Lebon :

Il est impossible d'ignorer que le budget de la culture pour 2022 enregistre deux records : d'une part il atteint pour la première fois le cap des 4 milliards d'euros, hors audiovisuel public ; d'autre part, il enregistre la plus forte augmentation de ce quinquennat, avec une hausse de 7,5 %, soit 273 millions d'euros de plus par rapport à l'an dernier. À ces deux données incontestables, il faut ajouter une troisième, moins agréable : la culture est non seulement un des secteurs les plus durement touchés par la crise sanitaire mais aussi un des domaines où la reprise sera la plus difficile et où les fragilités seront le plus longtemps perceptibles. Des artistes aux institutions, des créateurs aux publics, la covid-19 a tout bouleversé.

Au travers de ces augmentations, il s'agit donc à la fois de continuer d'accompagner les acteurs culturels dans la sortie de crise et, de manière plus structurelle, de faire face aux différents défis que la crise a d'ailleurs intensifiés et au premier desquels se trouvent les transitions numérique et écologique qui vont bouleverser les usages. De fait, les quatre programmes de la mission "Culture" sont en augmentation tout en bénéficiant de la seconde tranche du plan de relance.

C'est le programme 36 Transmission des savoirs et démocratisation de la culture qui enregistre la plus forte hausse, en raison de la généralisation et l'extension du pass culture, dont le budget est multiplié par trois et s'établit à près de 200 millions d'euros. Après une expérimentation plutôt laborieuse de trois ans, ce dispositif est désormais généralisé à tous les jeunes de 18 ans et sera aussi étendu aux élèves de la quatrième à la terminale. Les toutes premières évaluations montrent que l'objectif quantitatif est atteint, puisque près de 800 000 jeunes ont ouvert un compte, que les mangas sont plébiscités, que le pass n'a guère d'incidence sur le développement de nouvelles pratiques artistiques.

Il y a bien sûr des exceptions comme les Électropicales, que vous avez vues, madame la ministre, à La Réunion. Mais si l'on veut éviter la simple amplification des usages préexistants au pass, se pose la question de la médiation et plus encore d'un véritable et robuste continuum entre le pass et l'enseignement culturel et artistique, singulièrement dans le primaire qui en la matière reste le parent pauvre.

Le programme Création concerne le spectacle vivant et les arts visuels, deux secteurs très marqués par la crise et qui risquent de subir encore de fortes turbulences en 2022. Les dispositifs qui ont soutenu les artistes et les institutions devront être maintenus et irriguer l'ensemble du territoire si l'on veut éviter des catastrophes. Les festivals, qui ont tous beaucoup souffert avec des taux d'annulation très élevés, sont particulièrement fragilisés. La présentation prévue le 1er décembre prochain à Toulouse de la nouvelle politique de l'État à l'égard des festivals est très attendue, particulièrement dans les outre-mer où, comme vous avez pu le constater encore récemment à La Réunion, la vitalité artistique est omniprésente, mais aussi les obstacles qui entravent leur rayonnement. La création il y a quelques semaines d'un fonds spécifique outre-mer par le Centre national de la musique démontre, une fois de plus, la nécessité d'adapter et de compléter les dispositifs aux réalités ultramarines.

Toujours dans ce programme, je souhaite évoquer un projet présenté comme l'une des trois principales réformes du ministère de la culture en 2022 et qui concerne une institution, dont les métiers et savoir-faire séculaires en matière de restauration du patrimoine et de création sont une référence mondiale et mériteraient d'être classés au patrimoine culturel immatériel. Il s'agit du Mobilier national, dont la transformation en établissement public à caractère administratif suscite interrogations et inquiétudes au sein des personnels. La fragilité du modèle économique qui accompagne ce changement de statut pose question, de même que l'absence, dans le projet de décret, de toute référence à l'Atelier de recherche et de création (ARC), ce haut lieu de création, de recherche et d'échange créé par André Malraux en 1964, pourtant au cœur même des missions du Mobilier national.

Je ne reviendrai pas sur le programme Patrimoines doté de plus de 1 milliard d'euros et désormais mieux territorialisé, sinon pour évoquer le grand projet présidentiel du château de Villers-Cotterêts, appelé à devenir la Cité internationale de la langue française. Vous avez déclaré en commission, madame la ministre, qu'elle « fera toute sa part aux langues régionales de France » et je vous en remercie. Permettez-moi tout de même de relayer ici la suggestion de la présidente de la région Réunion, lors des états généraux du multilinguisme de cette fin octobre, auxquels vous avez assisté, qui vous a proposé de dénommer cette nouvelle institution d'envergure « Cité internationale des langues de France ».

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