Intervention de Stéphane Viry

Séance en hémicycle du lundi 8 novembre 2021 à 9h00
Projet de loi de finances pour 2022 — Économie ; investissements d'avenir ; engagements financiers de l'État

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaStéphane Viry :

Ce budget de la mission "Économie" est le dernier d'une législature marquée par les promesses : promesse d'innovation, promesse de compétitivité et promesse de modernité. Avec une compétitivité lestée, une industrie exposée à tous les vents de la concurrence déloyale, une innovation inaccessible et une richesse territoriale en perdition, non seulement le renouveau économique de la France n'est pas advenu, mais un profond sentiment d'injustice, suscité par les faux serments du Président, alimente la défiance populaire contre toute la classe politique et institutionnelle.

En 2017, le candidat Emmanuel Macron se présentait comme l'acteur du progrès économique, mais la stratégie a fait cruellement défaut durant ces cinq dernières années. Les quelques évolutions éparpillées d'une politique sans cohérence n'ont pas servi un plus grand dessein, celui de guérir les fractures sociales, économiques et territoriales de notre nation. La vision désincarnée de la production proposée par le Président et sa majorité, c'est la croissance sans la prospérité, l'innovation sans la prospective, le profit sans l'investissement.

L'objectif de la mission budgétaire Économie est de bâtir le socle d'une production au service de l'intérêt général. Or l'intérêt général en France, actuellement, c'est l'industrie : retrouver nos 2 millions d'emplois industriels perdus en trente ans ; retrouver l'âme de nos régions vidées de leurs usines ; créer des conditions de prospérité pour nos entreprises, et notamment pour les entreprises de taille intermédiaire.

Au soir de cette législature, notre devoir de parlementaires est de tirer les conclusions de cinq années d'égarements économiques et sociaux.

La politique conduite jusqu'ici est celle des petits pas sur un chemin incertain. Quand le rétablissement de notre fiscalité vers les standards européens arrache quelques miettes de compétitivité, le coût horaire du travail industriel français demeure 72 % plus élevé qu'en Espagne. Quand l'innovation devient une priorité pour le Président de la start-up nation, personne au Gouvernement n'est en mesure de construire une politique industrielle dépassant le simple saupoudrage budgétaire. Quand Emmanuel Macron promettait en 2017 un « vrai plan Marshall de la réindustrialisation de nos territoires économiquement perdus », ni l'exécutif, ni la majorité présidentielle n'ont été capables de contrer l'extension des déserts industriels, culturels et médicaux.

Madame la ministre déléguée, par ce budget, vous administrez la pénurie. Bruno Le Maire avait appelé à un assainissement des finances publiques une fois la crise sanitaire atténuée. Pourtant, avec son plan France 2030, par exemple, le Président de la République entretient l'illusion que l'État peut tout en jouant le rôle d'un planificateur omniscient, de l'alimentation à l'espace.

Ce n'est pas avec 30 milliards d'euros en cinq ans, soit 6 milliards d'euros par an, autrement dit 1 % du budget annuel de l'État, que nous ramènerons les industries, que nous redonnerons des perspectives à ceux qui ont perdu leur emploi, qui ont perdu leur commerce, qui ont perdu, en somme, ce qui faisait le socle de la cohésion nationale.

Au demeurant, France 2030 n'est que la petite sœur électoraliste du plan d'investissement de 57 milliards d'euros lancé en 2017 et tombé, depuis, dans les limbes de votre administration.

La mission Économie du projet de loi de finances pour 2022 illustre les lacunes de votre action publique. C'est une mission technocratique dont les objectifs, les indicateurs et les programmes n'offrent aucune vision pour la France. Qui saurait, après quatre ans d'action, définir votre programme économique ? Personne, car vous ne voyez rien au-delà des chiffres !

Cette mission du budget dévoile également votre ignorance des corps intermédiaires. Les associations professionnelles économiques vous parlent, vous ne les écoutez pas. Elles demandent plus de productions stratégiques et moins de carcans administratifs : vous leur offrez exactement l'inverse.

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