Nous examinons ce matin une proposition de loi instaurant deux dispositifs : le tiers payant dans les maisons et centres de santé et un conventionnement sélectif dans les zones sous-denses. Ces deux outils ont vocation à répondre partiellement au problème des déserts médicaux. Avant tout diagnostic positif, il convient de faire un état des lieux historique – comment en sommes-nous arrivés là ? – pour pouvoir proposer un traitement de fond.
Je ne crois pas que la France souffre d'un problème de déserts médicaux. Elle souffre plutôt d'une inégalité territoriale et sociale d'accès aux soins. L'expression « désert médical » est impropre pour qualifier des disparités géographiques importantes et persistantes, car les effectifs de médecins sont globalement importants par rapport à la moyenne des pays de l'OCDE – 3,3 médecins pour 1 000 habitants en France, contre 4,1 en Allemagne et 2,8 au Royaume-Uni. Si 99,9 % de la population accède à un médecin généraliste en moins de vingt minutes, 8,1 %, selon les statistiques de la DREES, fait face à une situation de faible accessibilité et vit sur un territoire où l'offre de soins, bien que présente, est insuffisante pour répondre à la demande de soins, ce qui allonge les délais d'attente pour la prise de rendez-vous et accroît la charge de travail des professionnels. Ces disparités sont plus complexes et plus fines qu'il n'y paraît à première vue : elles sont parfois infra-départementales et divergent selon les spécialités.
En 2007, la DREES relevait globalement au niveau d'égalité semblable à celui de 1983. Mais du fait du vieillissement de la population médicale, aggravée par les fortes variations du numerus clausus entre 1977 et 1993 et les départs à la retraite qui en résultent, la tension démographique atteint un niveau jugé critique jusqu'en 2027 : autrement dit, dans moins de dix ans, le nombre de praticiens devrait progresser.
Enfin, les nouvelles aspirations des professionnels, en phase avec les nouvelles organisations du monde du travail, privilégiant l'équilibre entre vie privée et professionnelle, le travail en équipe et la diversité des modes d'exercice, accentuent ce phénomène.
Notre groupe est favorable à une vision holistique, et non symptomatique, qui renforce l'organisation des soins, en particulier dans les territoires sous-denses, et pose la question des politiques d'aménagement du territoire, du logement et des transports et de leur lien avec la politique de santé. Compte tenu des aspirations des jeunes générations professionnelles et des besoins des patients, nous devons repenser les relations entre patients, professionnels de santé et puissance publique, en renforçant le dialogue.